Chapitre 16-1

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Plusieurs jours après, j'avais encore du mal à dormir à cause de la violente attaque dont nous avions été victimes, mes parents et moi. Malgré tout ce qui s'était passé, j'étais revenue travailler le lundi auprès de Yeraz. Il avait essayé de me contacter à de nombreuses reprises toute la journée du dimanche, mais je n'avais pas pris la peine de répondre à ses appels ni à ses messages.

J'étais encore bouleversée, traumatisée par les récents évènements survenus quelques jours plus tôt. Je faisais tout pour éviter Yeraz. Il avait beau me convoquer dans son bureau, j'y envoyais Timothy ou Ashley à ma place. Il faisait exprès de multiplier ses déplacements pour se retrouver seul, dans le véhicule, avec moi, mais je le devançais et me rendais par mes propres moyens à ses rendez-vous d'affaires. Chaque jour qui passait, le silence creusait entre nous un trou de plus en plus profond.

Assise dans le fauteuil du salon, tablette à la main, j'écoutais Timothy énumérer les dernières tâches qu'il nous restait à réaliser pour le gala de charité de Thanksgiving qui aurait lieu après-demain. Il était tôt ce matin et mon assistant parcourait énergiquement la pièce tout en lisant ses notes à voix haute :

— ... contacter le service de voiturier, vérifier les assurances...

— C'est fait ! le coupai-je.

— Et les photographes ?

— Ashley est dessus. La presse devra rester à l'entrée, mais nos équipes se chargent de couvrir l'évènement.

Timothy exhala un long soupir avant de venir s'affaler sur le canapé.

— Ronney, vous avez fait un travail d'orfèvre. Où étiez-vous toutes ces années ?

Je soulevai les épaules pour lui dire que je ne le savais pas moi-même. Il ajouta :

— Vous êtes une personne incroyable.

Son sourire se fana et son regard se voila. Mon assistant déclara avec sincérité :

— C'est un honneur de passer ces derniers mois à vos côtés. Vous les avez rendus moins... difficiles à supporter. Bientôt, nos chemins se sépareront, que vais-je regretter le plus ? Sûrement pas ce tyran pour qui nous travaillons. Je vous vois, Ashley et vous, plus que je vois ma propre famille. J'ai toujours rêvé de partir d'ici, de faire enfin quelque chose que j'aime et qui me fasse vibrer, mais aujourd'hui, je vous avoue que j'ai peur de quitter tout ça.

Je hochai tristement la tête. Timothy avait passé tellement de temps au service de Yeraz qu'il en avait développé de manière inconsciente et involontaire le syndrome de Stockholm pour seul instinct de survie. Et si pour moi c'était de même ? Quelle personne normale pouvait rester là à subir des remontrances toute la journée ? Qui se faisait braquer dans un restaurant et revenait travailler pour la personne qui avait commandité tout ça ? Un soudain effroi me parcourut le corps. Étais-je malade, moi aussi ? Étais-je devenue complètement dépendante de Yeraz ? La voix de Timothy me sortit de ma torpeur :

— Heureusement, tout cela se finit bientôt. Avec les références que nous aurons, nous pourrons travailler auprès de n'importe qui. Lorsqu'on a eu monsieur Khan comme patron, plus personne ne peut nous effrayer. Pas vrai ?

Je tentai de sourire, mais mes lèvres refusèrent de m'obéir. Timothy tourna alors sa tête vers l'entrée du séjour et se leva d'un bond du canapé, les traits crispés. Je suivis son regard et vis Yeraz faire irruption dans la pièce, la mine sombre. D'ici, je pouvais apercevoir ses larges cernes qui ombrageaient ses yeux. Il s'adressa à mon assistant sur un ton plein de reproches :

— Je ne vous paye pas pour vous reposer ni pour discuter ! Avez-vous préparé le matériel pour ma réunion de ce matin ?

Timothy allait prendre la parole, mais un geste impérieux de Yeraz le réduisit au silence.

— Rangez-le. Nous sommes attendus, miss Jimenez et moi, chez monsieur Saleh.

Je me levai en le fixant avec méfiance.

— Miss Jimenez, Isaac nous attend, dehors. Dépêchez-vous d'aller le rejoindre !

— Mais...

— Hamza n'a pas beaucoup de temps à nous accorder. Il souhaite s'entretenir avec nous après que je lui ai fait part des changements qui devront être apportés sur l'accord Kayser. Il insiste pour que vous soyez présente.

Je ne pouvais pas refuser de me rendre à ce rendez-vous avec lui. Le restaurant de mes parents était en jeu. Il fallait absolument arrêter cet engrenage dans lequel ils étaient plongés depuis tant d'années.

Je me tournai vers Timothy.

— Je vous rejoins dès que j'ai fini. Vous trouverez la personne à contacter pour les assurances dans la tablette.

Timothy s'exécuta sans perdre de temps. Yeraz m'attendait à l'entrée du séjour avec une posture stricte. Au moment de sortir de la pièce, il se décala pour me laisser passer. Nos regards appuyés se croisèrent. Je refoulai le plus fort possible la sensation étrange que j'éprouvais pour lui.

Ugly Ronney T1 : mafia romance [Français]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant