Ugly Ronney T1 : mafia romance [Français]

Chapitre 5-6

Je restais sans voix. Mon mutisme ne paraissait pas le surprendre. Yeraz était prêt à tout pour se débarrasser de moi et moi, j'étais prête à tout pour rester le plus loin possible de cet homme. Pourtant, une force en moi résistait. À Sheryl Valley, les avis d'expulsion étaient nombreux ainsi que les abus de contraventions qui servaient de techniques d'intimidation sur la population ou encore les saisies de nos biens pour telles ou telles raisons sans parler du racket. Toutes les administrations, jusqu'au plus haut de l'état, étaient corrompues et le peuple soumis.

— Non, tout n'a pas un prix, Yeraz.

Le jeune homme, surpris, fronça les sourcils. Sa mâchoire se contracta et il éclata d'un petit rire mauvais. Son attitude froide et sarcastique m'agaçait. Je pris le ton le plus ferme que possible aidé par les verres de vins rouges bus quelques instants plus tôt :

— Je ne travaille pas pour vous, mais pour Camilia ! Vous ne m'achèterez pas avec vos millions.

Yeraz se rembrunit. Son poing, posé sur la table, se referma.

— Je ne coucherai jamais avec vous et tomberai encore moins amoureux. Alors nous sommes condamnés à nous supporter. Je vais vous rendre la vie impossible, Ronney.

Il avait articulé chaque lettre de mon prénom comme j'avais fait pour le sien. Son regard noir était désormais menaçant. Je passai ma langue sur mes lèvres asséchées et répondis d'une voix posée et juste :

— Même si la survie de l'humanité dépendait de nous, je ne coucherai jamais avec vous non plus. Vous représentez tout ce que je déteste. Je ferais mon boulot, car je ne laisse pas tomber les gens, même mon pire ennemi. Je ne suis pas comme ça.

J'avais l'impression que le temps s'était figé autour de nous. Nous nous défiâmes du regard puis Yeraz déclara la mâchoire serrée :

— Nous devons y aller, je dois honorer une réunion d'affaires.

Sa voix était dépourvue de toute amabilité.

— Allez-vous encore me kidnapper ou allez-vous vous décider à me ramener dans le tiers monde ?

Il fit un petit signe de la main sans me lâcher de son regard glacial et le serveur arriva dans la seconde. Sans lui laisser le temps de me répondre, je me levai de ma chaise, pressée de quitter ce lieu.

Impossible de rester assise dans cette salle d'attente contiguë. J'arpentai la pièce en me refaisant le film de mon déjeuner avec Yeraz. Cet homme avait le don de me faire sortir de mes gonds. Perdue dans mes pensées, je n'avais pas entendu mon orthodontiste, madame Wolfe, m'appeler.

— Ronney ? insista-t-elle.

Je sursautai quand sa main toucha mon épaule.

— Tout va bien ?

Une vague d'inquiétude traversa les traits resplendissants de cette femme d'âge mûr, toujours impeccablement coiffée.

— Oui, ça va.

Madame Wolfe hocha la tête avec un sourire poli. Son visage au teint clair était rehaussé de lèvres parfaitement peintes.

— Suivez-moi, je vais vérifier le travail du mois dernier.

Sa voix, basse et douce, trahissait un léger accent british. Étonnée, je remarquai que pour une fois, elle n'avait pas l'air d'être sous l'emprise de stupéfiant.