Chapitre 5-4

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Je fus une fois de plus étonnée lorsqu'il m'ouvrit la porte d'une Bentley d'un rouge flamboyant, il avait visiblement ces bonnes manières incrustées en lui. Il s'assit ensuite au volant du véhicule et démarra le moteur qui rugit au premier coup d'accélération. Je n'étais toujours pas calmée. En fait, j'étais plus en pétard que jamais, mais je pris sur moi pour essayer de ne pas le montrer.

— Vous n'avez pas peur de vous faire abîmer votre voiture dans ce quartier peu fréquentable ?

Il éluda un instant la question puis répondit lentement, les yeux rivés sur la route :

— Je plains la personne qui oserait la toucher.

— À la prochaine, il faudra tourner à droite.

Yeraz mit le clignotant sur la gauche.

— Mais que faites-vous ? Vous avez dit que vous me rameniez chez moi !

— Je le ferais quand je l'aurais décidé.

Je fermai les yeux comme si j'avais mal entendu avant de les rouvrir, agacée.

— Où allons-nous et de quel droit venez-vous envahir ma vie privée ?

Ma voix était cette fois-ci froide et ferme. Je remontai mes lunettes et attendis sa réponse.

— Ronney, nous sommes pieds et poing liés tous les deux. Vous envahissez mon espace en semaine, j'ai décidé de faire pareil le week-end !

Je tombai des nues. Il comptait me gâcher ces deux jours merveilleux de liberté. Étais-je condamnée à rester auprès de cet homme chaque jour du reste de mon existence ?

— Démissionnez et vous n'entendrez plus parler de moi.

— J'en rêve ! m'insurgeai-je, mais je ne peux pas. J'ai besoin de cet argent. Qu'est-ce que vous croyez ? Que je me lève le matin en dansant dans ma salle de bain, heureuse de venir vous retrouver ?

Les yeux toujours fixés sur la route, il attendit comme pour se laisser le temps d'assimiler mes paroles puis répondit :

— Ça ne m'enchante pas plus que vous. Pour être franc, en plus d'être une femme pas jolie et d'un ennui terrible, vous êtes naïve et sans aucun intérêt pour moi. Et c'est quoi cette voix ridicule que vous prenez lors de ces doublages ? Ça a été une véritable torture pour mes oreilles.

Yeraz attendait sûrement que je proteste, blessée par ses mots, mais ce n'était pas le cas. Je tournai ma tête pour regarder le paysage défilé à travers la vitre et décidai à passer outre. Ce n'était pas marrant de se disputer avec moi, car je ne me mettais jamais en colère même si au fond, une Ronney révoltée hurlait de toute ses forces. Le temps était splendide, mais tout était gris en moi. Je devais me reprendre.

— Où allons-nous ?

— Déjeuner.

La tête toujours tournée vers la vitre, mes pensées m'emmenaient là où je ne voulais pas aller : Caleb. Ma tête se remplit d'images de nous deux, de ces longues balades que nous faisions dans les collines de Sheryl Valley, de ces couchers de soleils romantiques, ses baisers, sa peau...

Ma portière s'ouvrit, le visage grave et le regard profond de Yeraz me ramenèrent trop brutalement à la réalité. Je n'arrivais pas à croire ce qu'était devenue ma vie. Ma compagnie se résumait désormais aux ténèbres. Je croisai les bras, la mine boudeuse et refusai de sortir de la voiture.

— Je ne veux pas rester avec vous. Vous ne pouvez pas me forcer sinon...

— Sinon quoi ?

Le jeune homme s'appuya sur la carlingue de la Bentley et se pencha vers moi. Les mille nuances de son regard si noir me figèrent sur mon siège. Sa beauté à la fois terrifiante et magnétisante me dérangeait. Derrière ses traits absolument parfaits se cachait une laideur que j'avais perçue dès notre première rencontre.

— Sinon, j'appelle la police.

Ma voix s'entendait à peine.

Yeraz eut ce mauvais ricanement que je haïssais. Il me tendit alors son téléphone.

— Vous trouverez le numéro d'Ernesto Marconie, le chef de la police, dans mes contacts. Nous étions encore ce matin au téléphone ensemble.

Je blêmis intérieurement.

— La justice, c'est nous. La politique, c'est nous et l'ordre, c'est nous. Soyez donc toujours du bon côté. J'espère que mon petit conseil vous servira à l'avenir.

Yeraz se redressa en me jetant un regard peu amer avant de tourner les talons. Il se dirigea ensuite vers l'entrée d'un restaurant à la façade sobre, élégante et magnifique, de style Art Nouveau. Je descendis de la voiture et regardai désemparée tout autour de moi. J'étais de retour à Asylum.

Ugly Ronney T1 : mafia romance [Français]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant