Détraqué

chapitre 13

Désormais avec un verre de vin rouge à la main, j'observais Atanas qui ne touchait même pas à son verre me dévisager depuis le canapé à côté de celui sur lequel j'étais assise. J'en bu une grande gorgée du mien alors que je n'aimais même pas le vin rouge, et l'interrogeais.

- Tu ne comptes pas boire ?

- Non, l'alcool me donne la gerbe.

Je haussais les sourcils. De toute manière, il faisait déjà assez d'actions de cinglé lorsqu'il était sobre.

- Dis-donc, tu es un homme exemplaire, ironisais-je.

Il inclinait la tête sur le côté. Je sursautais lorsque l'un des chiens qui avait tué son frère ce midi se fraya un chemin sur le canapé sur lequel j'étais assise.

Je le regardais en grimaçant.

- Tu devrais le remercier, il t'a sauvé de mon frère, c'est lui qui lui a asséné la morsure fatale.

Je levais la tête vers lui.

- S'il pouvait me débarrasser des deux frères ça serait encore mieux.

Je remarquais que le doberman avait une tache marron foncé en forme de carré sur l'oreille, c'était mignon.

- Comment est-ce qu'il s'appelle ? demandais-je alors.

Atanas me regarda avec pitié comme si j'étais devenue cinglée, comble de l'ironie.

- Tu crois vraiment que je donne des prénoms à mes chiens ?

Je haussais les épaules.

- Alors lui ça sera Spasitel.

Cela signifiait « sauveur » et ça lui correspondait bien, en fin de compte.

Atanas m'observait sans rien dire, et je soupirais.

- Bon tu n'as pas un truc plus intéressant à proposer ?? m'exclamais-je alors. On pourrait aller en boîte par exemple !

Un faux rire lui échappa.

- Pour que tu tentes de t'échapper ? Non merci, ça ira. Et puis je ne sors pas en boîte, je n'aime pas ça.

Mes yeux s'agrandirent de surprise.

- Genre toi, un mafieux, tu n'apprécies pas d'aller en boîte pour chopper tout ce qui bouge ?

Il prit un certain temps à répondre.

- Tu vas me sortir que tu préfères attendre de trouver la bonne ? ironisais-je.

Il commença à me fixer droit dans les yeux.

- J'ai déjà couché avec des femmes, mais pas énormément. Elles ne m'intéressent pas vraiment. Quand je suis en sale état et que j'ai besoin de parler, je préfère me confier à mes gars plutôt que d'aller me trouver une fille à baiser.

Je me moquais ouvertement de lui.

- Genre toi, tu te confies à tes gars ?

Je vis alors un petit sourire malsain se dessiner sur ses lèvres, puis il se leva.

- Allez viens, je vais te les présenter.

Je secouais instantanément la tête.

- Si c'est pour que l'un d'entre eux ou même tous essaient d'abuser de moi, ce n'est pas la peine. Je connais un peu le fonctionnement de ceux qui t'entourent avec les femmes, désormais.

Il passa à côté de moi et m'attrapa le bras pour que je le suive.

- Oh non ne t'inquiètes pas, ils ne te feront pas le moindre mal, dit-il d'une manière si énigmatique que je commençais à me demander où était le piège.

Tandis que Spasitel nous suivait à la trace, nous descendions un étage pour accéder au sous-sol dans lequel je m'amusais à ramener mes conquêtes quand j'habitais encore ici. Il ne se situait pas très loin de la cave dans laquelle j'étais retenue prisonnière.

Quand il ouvrit la porte, une forte odeur de putréfaction me monta au nez ainsi qu'une extrême fraîcheur. Mais comme il n'avait pas encore allumé la lumière, je ne comprenais pas de quoi il s'agissait.

Puis il l'alluma et... je restais sans voix. Dans cette salle, il y avait peut-être une centaine de cadavres tous assis en cercle comme une sorte d'arène. Atanas se rendit au milieu et me fit signe de le rejoindre avec un grand sourire.

En m'approchant de plus près, je remarquais le cadavre du type qui avait essayé de m'agresser il n'y avait pas longtemps.

- Voilà ceux à qui je me confie. Ils sont très pratiques, ils ne me contredisent jamais.

Et il commençait à serrer la main à certains cadavres comme pour les saluer tout en leur faisant la discussion.

J'étais tombée sur un fou. Un psychopathe sanguinaire qui finirait sûrement par me placer dans cette même salle si je ne coopérais pas...