Épisode 3.11 : Panique et Révisions

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Jeudi 3 Avril 2014

Leo soupira. Il pleuvait assez fortement et l'effet nouveauté de son look s'était grandement estompé depuis quelques jours. Tout le monde s'y était habitué au point qu'il était à nouveau tombé dans l'anonymat et l'indifférence de ses camarades de classe. Il s'était même pris des remarques de certains qui jalousaient sa dernière performance en anglais, car il avait encore une fois réussi à avoir la plus grosse note de la classe sans aucun effort.

Et puis là, le trajet en bus commençait à sérieusement s'éterniser. La pluie frappait les vitres, tentant désespérément d'entrer pour caresser les visages des voyageurs, tandis que le véhicule était bloqué à cause des voitures, qui n'avançaient plus. Il considéra que c'était une chance que des couloirs spécifiques aux bus avaient récemment été ouverts, mais ce n'était pas suffisant pour ne pas s'ennuyer.

Leo fixa d'un regard vide l'extérieur. Si seulement le trajet pouvait aller plus... Vite.

Il considéra ses pouvoirs, qu'il n'avait que trop peu eu l'occasion d'utiliser récemment. Pas depuis le rhume en fait. Ça faisait un peu trop longtemps à son goût.

Il savait qu'il ne pouvait pas accélérer le temps. Seulement l'arrêter, le remonter et le ralentir. Arrêter le temps dans cette situation ne servirait absolument à rien, et le remonter ne ferait que l'empirer, puisque non seulement il n'avait aucune alternative, mais en plus Stan lui avait demandé au détour d'une conversation mercredi de n'utiliser ce pouvoir qu'en dernier recours, car il était assez dangereux. Leo lui avait bien demandé pourquoi, mais le dieu était resté étrangement silencieux par la suite. Quelque chose dans son regard le terrifiait, mais le garçon n'aurait su mettre le doigt dessus.

Donc il ne lui restait plus que l'option de ralentir le temps. S'il ralentissait le temps autour de lui-même, ça ne servirait à absolument rien. En revanche, s'il l'utilisait sur lui-même...

Leo plongea la main dans son sac pour en ressortir son bonnet. Non seulement ça allait cacher le roussissement de ses cheveux, mais en plus ça lui permettrait de se protéger de cette petite brise qui traversait le bus. Il prit aussi un cahier et un stylo, histoire de ne pas avoir l'air trop suspect et de donner l'air d'être en intense réflexion. S'il ne bougeait pas trop, alors personne ne devrait remarquer qu'il bouge au ralenti.

Une fois prêt, et après avoir fait mine d'observer ses notes pendant trente secondes, il mit son stylo à sa bouche et observa l'extérieur, histoire de garder un œil sur la progression du bus. Il commença l'expérience.

La pluie tombait désormais bien plus rapidement à ses yeux. Le bus avançait et s'arrêtait tous les dix mètres en accéléré. Le garçon voulait sourire, parce qu'il avait l'impression de se trouver dans un de ces films, où les scènes sont volontairement accélérées pour montrer le passage du temps quand rien d'important ne se passe. Un... Time-lapse ? Ouais, c'est ça, un time-lapse.

Il se concentra du mieux qu'il put pour voir où en était le véhicule, pour pouvoir se remettre en phase avec le temps au moment où il approcherait de chez lui. Une seconde d'inattention et il pourrait rater son arrêt.

Trois minutes – pour lui – passèrent. Il constata qu'il n'était plus loin de Gradignan. Il décida de ramener le temps à la normale, puis de jeter un coup d'œil à sa montre en argent... Avant de sentir son cœur s'arrêter l'espace d'un instant.

Dix-neuf minutes !? Mais je ne les ai utilisé que trois ! C'était illogique ! Quand il remontait le temps, ce n'était pas considéré comme une utilisation de plusieurs minutes. Juste d'une s'il ciblait précisément le moment où il remontait le temps. Alors pourquoi est-ce que là ça en comptait comme dix-neuf ?

Il se mit à réfléchir. Puis il grimaça. Il était vrai que quand il arrêtait le temps, sa jauge de magie n'allait pas dans son sens et continuait de se vider selon son temps d'utilisation. Mais ici, sa jauge de magie était plus ou moins liée au temps extérieur plus que le temps supposé d'utilisation, ce qui, du point de vue de l'Univers, devait être plus logique.

Grognant et se sentant humilié par l'entité cosmique, Leo vissa encore plus profondément son bonnet sur sa tête pour éviter qu'une mèche rousse ne s'en échappe, puis descendit du bus.

Il prit son temps pour rentrer, sachant que de toutes façons, il allait se cloitrer dans sa chambre pendant encore une cinquantaine de minutes.

Il entra chez lui, salua rapidement ses parents sans aller les voir, puis fit ce qui était prévu.

Lundi 14 Avril 2014

Ses professeurs et ses parents avaient été catégoriques : ce n'était pas parce qu'il était enfin en vacances qu'il pouvait s'amuser toute la journée et ne rien faire. Il lui fallait activement réviser, car dans un peu moins de deux mois, il allait passer le bac !

Bon après, cela concernait surtout les autres élèves de sa classe, puisque lui n'avait pas décidé de réviser à la dernière minute et il avait fait un point d'honneur de réviser au moins trois à quatre soirs par semaine, et ce depuis le début de l'année. Cela ne l'empêcha quand même pas de passer un peu de temps tous les jours à continuer de réviser, car il était bien trop facile d'oublier ces connaissances qu'il savait n'allaient pas vraiment être utiles au reste de sa vie*.

Rien n'est inutile.

Les mots de Stan résonnèrent dans sa tête. Il se rappelait avec exactitude de la conversation qu'il avait eu avec le dieu là-dessus. Certes rien n'est inutile, et il savait qu'il avait besoin de ces connaissances pour avoir de bonnes notes au bac, mais il doutait très sérieusement de l'application en situation réelle des fonctions mathématiques. Enfin... Mieux valait garder ces données en tête. Au cas où.

*Et j'en veux pour preuve le fait que j'ai oublié 90% de ce que j'ai appris à l'école en dehors de la base des bases ! Bien évidemment, je ne vous incite pas à ne pas étudier, au contraire, puisque le plus vous oubliez, le plus de chances vous aurez de ne pas trouver de travail et de vous retrouver contraint à écrire des séries de romans avec l'espoir infime que ça puisse fonctionner car c'est plus ou moins tout ce qu'il vous reste comme lot professionnel. Grermf.

Les Chroniques de Loutre-Monde - Tome 1 : Le Garçon qui est Mort Trop de FoisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant