C'était dans une contrée paisible que trois commerçants avaient jadis décidé de s'installer : une vallée tranquille ceinte par un fleuve qui naissait dans les montagnes du nord et rejoignait ensuite la vaste mer en contrebas. Ils s'y établirent avec leur famille et très rapidement, ce petit endroit paradisiaque obtint bonne réputation auprès des curieux et de ceux qui rêvaient d'ailleurs. Peu à peu, le campement devint un village et le village une ville, une ville de puissants commerçants aussi riches qu'ambitieux.
Les alentours ne tardèrent pas à être explorés, exception faite des montagnes du nord, trop escarpées pour qu'il soit envisageable de s'y aventurer. Il s'agissait de hauts pics rocheux qui avaient pour pied des collines dans lesquelles on allait peu : des loups y avaient été observés à plusieurs reprises et on craignait ces bêtes.
Des années plus tard, on découvrit que la montagne abritait en réalité d'étranges créatures à moitié humaines et capables de se changer entièrement en loup. Le lieu où ils demeuraient était inconnu, mais ils patrouillaient régulièrement dans les montagnes et les collines. Ils avaient une langue et des coutumes étrangères, ils vénéraient des divinités dont ils croyaient qu'elles vivaient dans une source que de fait ils gardaient secrète. Ils se vêtaient – sous forme semi-humaine – de tissus grossiers et vivaient dans des grottes dont ils refusaient là encore de révéler l'emplacement.
Les hommes étaient intrigués, fascinés plus qu'effrayés, car malgré leurs apparences de prédateurs ces hybrides étaient des créatures foncièrement pacifiques. Ils ne tuaient que pour se nourrir et ne se battaient que pour défendre leurs terres.
Le temps passait et chacun apprenait à vivre avec à la conscience la présence de l'autre. La curiosité l'emporta rapidement, ils voulurent tous deux en savoir plus quant à leurs voisins. Les humains apprirent leur langue aux hybrides qui, quant à eux, les renseignèrent au sujet de la géographie de la vallée et de ses environs – esquivant toujours les questions à propos de leurs montagnes. Une entente des plus cordiales se noua, ils éprouvaient une fascination et une curiosité commune.
Certains hybrides quittèrent la tribu pour se mêler aux urbains, mais l'inverse ne fut jamais fait : le raffinement humain était à des kilomètres du dénuement des grottes hybrides. De plus, les hommes avaient en leur cœur une fierté exacerbée qui leur faisait dire que puisqu'eux avaient une ville, leur race était supérieure à celle de leurs voisins. Impensable donc pour eux de choisir d'aller vivre avec ce peuple.
Les hybrides étaient parfaitement bien accueillis à la ville : on aimait leur humilité et leur gentillesse, et les enfants adoraient les chouchouter lorsqu'ils en voyaient un dans la rue. Pouvoir caresser le pelage d'un loup avait toujours été inimaginable, alors ils étaient ravis de la présence de ce peuple.
Ils étaient donc en paix à cette époque, et même si les hybrides cultivaient le secret à de nombreux sujets, chacun savait qu'il pouvait faire confiance à l'autre et c'était là tout ce qui comptait.
Malheureusement, après de nombreuses décennies d'abondance, la vallée connut une sécheresse pire que toutes celles qu'elle avait vécues jusque là : le fleuve se vidait, la chaleur estivale devenait insoutenable et cette ville paradisiaque devint le théâtre de nombreux décès. L'eau avait à ce point déserté que le niveau du fleuve avait baissé comme jamais. Impossible pour les paysans d'abreuver cultures et bêtes. La famine menaçait, et les bateaux des commerçants étaient trop gros pour pouvoir circuler sur un fleuve dont le niveau était si bas. C'était risqué, la coque aurait sans aucun doute subi de nombreux dommages, un naufrage aurait pu se produire. Seuls quelques rares marchands avaient accepté de s'y risquer, et bien évidemment, il avait fallu payer pour ça : les prix des produits avaient flambé, dépouillant la ville d'une grande partie de ses biens.
Les humains avaient tenté de trouver une solution, et ils avaient cru en tenir une lorsqu'ils étaient allés demander aux hybrides de leur donner de l'eau de leur source secrète, dont ils savaient qu'elle coulait même pendant la sécheresse. Ces derniers acceptèrent à condition que l'eau ne serve à abreuver que ceux qui en avaient besoin, et ils ajoutèrent comme condition que ce soient les hybrides qui le leur amènent, afin que la source demeure secrète.
Les humains avaient immédiatement accepté et de l'eau leur fut fournie quotidiennement. Malheureusement, un hybride vivant en ville révéla que seule la moitié était utilisée pour abreuver ceux qui se mouraient, l'autre avait été vendue à des paysans qui voulaient sauver une infime partie de leurs récoltes, ainsi la ville faisait quelques bénéfices.
Furieux de s'être ainsi fait tromper, les hybrides cessèrent d'offrir leur eau sacrée aux humains : c'était l'eau de leurs divinités, il était pour eux impie de la jeter à la terre sans ménagement. Les humains tentèrent en vain de s'expliquer, et peu à peu, souffrant eux aussi de la sécheresse couplée à la canicule, les hybrides présents à la ville regagnèrent leur horde où l'eau demeurait abondante.
Les humains tentèrent de soutirer aux hybrides l'emplacement de leur source, mais ces derniers furent les plus malins et jamais le secret ne fut dévoilé. Ce fut ainsi que peu à peu, la rancœur s'installa dans les cœurs des hommes : ils se sentaient trahis.
Au fil des années, les hybrides obtinrent la réputation d'être des sauvages, des prédateurs imprévisibles auxquels on ne pouvait pas faire confiance. Des tensions naquirent, dissimulées derrière des sourires hypocrites : malgré la haine, les deux camps ne souhaitaient en aucun cas une guerre, d'autant plus que malgré tout, c'était des années et des années de paix qui se trouvaient derrière eux. Ils ne souhaitaient pas les effacer pour les remplacer par leur sang.
Néanmoins, à la mort du chef humain, celui qui le remplaça fut son fils cadet, car l'aîné était mort lors de la sécheresse : il avait voulu naviguer pour ramener à son peuple de quoi se ravitailler. C'était un jeune homme bon et juste, mais cette traversée s'était mal passée, et le jeune homme avait péri avec son équipage. Depuis, son petit frère nourrissait une rancœur sans borne vis-à-vis des hybrides à cause de qui, selon lui, son frère était mort.
Une fois cet être au cœur sombre à la tête de la ville, tout avait basculé.
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J'espère que ce début vous plaît, je voulais correctement mettre en place ce qui allait arriver, sauf que c'est un peu le bordel comme vous pouvez le voir. X)
Comme mentionné dans l'avant-propos, je posterai les trois premiers chapitres en même temps le 19 septembre, dès que mon Yoonmin Piégé sera terminé.
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Les créatures du Nord [Hopemin]
Fanfiction[Terminé] Humains et hybrides avaient toujours vécu en harmonie, les uns dans la vallée, les autres dans les montagnes du Nord. Pourtant, après de nombreuses années de tranquillité, des tensions avaient commencé à se former entre les peuples. C'étai...