Les créatures du Nord [Hopemin]

Chapitre 132

Jimin baissa les yeux vers la fiole, dirigea son regard plein de tristesse sur Hoseok, puis pria silencieusement pour que le remède fonctionne. Cette eau était le gage du puissant amour qu'il ressentait pour Hoseok, cet amour qui l'avait poussé à souhaiter mourir pour oublier ses si nombreux tourments.

« Si les dieux existent, puissent-ils avoir fait de ma mère la porteuse d'un remède contre la mort... »

Il ouvrit avec une douceur palpable la bouche de son amant et y versa le contenu de la fiole magique. Il avait l'impression que son cœur allait bondir hors de sa poitrine, fuir le plus loin possible : il avait tellement peur que ses efforts restent vains, que cela ne fonctionne pas. Les secondes s'égrainèrent, rythmées par les palpitations de son cœur. Son regard était focalisé sur le visage paisible de son amant : il attendait un signe, n'importe quoi.

Alors qu'il désespérait, son regard bascula lentement sur le torse dénudé de Hoseok : la plaie, celle au niveau de son cœur, un voile d'eau s'y était déposé. Il couvrait sa blessure et peu à peu, Jimin sentit les larmes lui monter aux yeux en voyant qu'elle se refermait lentement. C'était miraculeux, absolument incroyable !

Au bout de bien trop longues secondes pour Jimin, la plaie s'estompa complètement pour ne laisser place qu'à une cicatrice peu visible.

« Hyung ? Hyung ? »

Hoseok demeura étendu, les yeux clos, muet. Jimin s'apprêtait à prendre une nouvelle fois la parole quand il se rendit compte que l'eau magique formait un filet enchanté autour de la jambe de son amant : sa blessure au mollet, elle devait probablement être elle aussi en train de se refermer...

Lorsque le processus s'acheva et que l'eau qui ondulait élégamment autour de sa jambe s'effaça, Hoseok sembla avoir récupéré des couleurs. La mort l'avait fait pâlir mais désormais Jimin lui trouvait l'air presque... vivant.

« Hyung... Hoseok-ah, tu m'entends ? S'il te plaît... je t'aime, hyung, tu me manques tellement... »

Son ton désemparé et ses mots désespérés furent les dernières choses qu'il fallut au cœur de l'apothicaire pour esquisser un premier mouvement, suivi d'un de plus et d'encore un. Jimin, parce qu'il avait posé une main sur son torse à ce niveau précis, perçut immédiatement les battements faibles de son cœur et aussitôt son regard s'illumina. Les paupières de son amant papillonnèrent, s'ouvrirent lentement, et Jimin prit une mine ahurie : ses iris, elles étaient teintées d'un bleu d'eau extrêmement pur, surnaturel. C'était absolument magnifique.

Toutefois ce bleu, il ne put l'admirer longtemps : Hoseok referma immédiatement les yeux et se décala pour s'allonger sur le flanc avant de tousser bruyamment. Il cracha l'eau qui l'avait sauvé sans même le savoir. Or Jimin, lui, il le sut : les yeux de son aîné avaient retrouvé leur couleur onyx habituelle, c'était bel et bien l'eau sacrée qu'il avait crachée. Il n'en avait plus besoin, raison pour laquelle son corps s'en était débarrassé.

« Jimin ? »

La voix de Hoseok était éraillée, ses cordes vocales étaient encore faibles, jamais il n'avait parlé d'une voix si rauque. Il était épuisé, tout ça avait grandement éprouvé son corps. Il ignorait complètement tout ce qui venait de se dérouler, et par la même occasion il ignorait comment Jimin avait bien pu le sauver de la mort certaine qu'il avait pourtant cru frôler de très près.

« Hyung, par les dieux, t'es vivant ! »

Le cri de son petit hybride, Hoseok crut bien qu'il avait scindé son crâne douloureux en deux. Il était malade de hurler aussi fort ?

Jimin le prit dans ses bras avec un tel enthousiasme qu'il lui fit mal. Il n'en revenait pas : Hoseok, son Hoseok, il était vivant ! Son cœur battait à tout rompre, son âme entière était en fête et il respirait bruyamment pour s'éviter de pleurer une fois de plus. Penché au-dessus de Hoseok, il l'enlaçait au niveau des épaules pour poser la tête dans son cou de nouveau chaud qui lui faisait chaque seconde comprendre un peu plus qu'il ne s'agissait pas d'un doux rêve. Hoseok était bel et bien de retour chez les vivants.

« J'ai cru t'avoir perdu, lui murmura-t-il lorsqu'il senti que l'apothicaire enroulait les bras autour de sa taille, j'ai eu si peur que tu n'ouvres plus jamais les yeux...

- Qu'est-ce qui s'est passé ?

- Tu étais mort mais j'ai prié les dieux, et ma mère... elle m'est apparue et m'a donné un philtre. C'est lui qui t'as redonné la vie. J'arrive pas à y croire, mais toi, tu... j-j'ai eu tellement mal de te voir sans vie... »

Et alors qu'il prononçait ces mots, il resserra instinctivement son étreinte et vint déposer un baiser sur l'épaule de son amant qui avait du mal à assimiler ce qu'il venait d'entendre. Il avait donc ressuscité ? Les dieux hybrides existaient bel et bien ? Son esprit rationnel ne parvenait pas à y croire.

Sans lâcher Jimin, Hoseok se redressa et s'assit pour se blottir plus agréablement contre lui. Un sourire attristé naquit sur ses lèvres lorsqu'il sentit de minuscules gouttes d'eau choir sur son épaule et continuer leur course silencieusement. Alors il frotta amoureusement le dos de son cadet et laissa un baiser s'échouer dans sa chevelure argentée.

Jimin s'écarta de lui en reniflant bruyamment et, alors qu'il s'apprêtait à dire encore une fois à son Hoseok à quel point il était heureux de le retrouver, son amant l'attira à lui et l'embrassa avec une fougue tendre qui fit couler quelques larmes de plus des yeux du petit hybride. Il avait vécu un véritable ascenseur émotionnel, son cœur n'en pouvait plus d'être ainsi malmené. Le jeune hybride n'arrivait plus à s'exprimer autrement que par des larmes – de joie cette fois-ci. Il avait été si brisé.

Retrouver les lèvres de Hoseok était un bonheur sans nom et maintenant qu'il les avait connues sans vie, il mesurait encore plus l'amour qu'il leur portait. Qu'elles étaient délicates, les lèvres de son apothicaire. Douces, rassurantes, trop timides pour oser esquisser le moindre mouvement. Et pourtant, qu'est-ce que Jimin les aimait. Alors il appuya un peu plus le baiser, s'accrocha fermement aux épaules de son aîné et finit par plonger de nouveau la tête dans son cou. Il avait besoin de le serrer contre lui, de le serrer fort, si fort, car il ne voulait plus le lâcher. Lorsqu'il l'avait laissé seul il était mort ; il n'était plus question qu'il prenne un tel risque.

S'il le pouvait, il ne le lâcherait plus jamais...