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Adriana se retrouva quelques heures plus tard dans un endroit inconnu, les yeux bandés et les mains attachées à ce qui lui semblait être une poutre en béton. Elle était assise par terre , ses jambes repliées contre elle-même, frigorifiée mais surtout apeurée. Il n'y avait aucun bruit, comme si elle était perdue au milieu d'un désert et que personne autre qu'elle n'était présente.

Elle ne sût combien de temps elle attendit ainsi, immobile mais l'attente fut interminable jusqu'à ce qu'on lui retire le bandeau. Elle n'eut besoin de s'ajuster à la lumière parce qu'il faisait sombre et que seule une lampe allumée sur une table en acier éclairait l'entrepôt. Elle ne pouvait voir que quelques fenêtres, en hauteur, qui lui permettaient de voir le jour se lever. Néanmoins, le plus terrifiant dans tout ça était le linoléum sur lequel elle était, mais aussi la bouche d'égout et le tuyau d'arrosage. Elle n'eut la possibilité de se demander combien de personnes avaient été tuées ici que trois autres hommes entraient. Elle en connaissait déjà trois sur quatre.

L'homme en costume, jeune, qui semblait être le meneur lors de son kidnapping. Il était encore plus horrible que la première fois qu'elle l'avait vu. Son caractère machiavélique ressortait par tous ses pores. De plus, il portait une affreuse cicatrice sur la joue qui semblait s'être infectée à multiples reprises avant de guérir, la rendant boursoufflée. Néanmoins, ce qui l'effrayait le plus était son regard noir, sans humanité.
L'homme qui l'avait trouvée et mise dans le coffre, une petite main. Celui-ci avait un physique si classique qu'elle ne l'aurait pas reconnu s'il ne portait pas la même tenue. Il était passe partout et c'était sûrement une force. Il fila avant même qu'elle ne s'en rende compte.
L'homme qui avait commandé des lasagnes au restaurant. Ce dernier, elle le reconnaissait aisément pour l'avoir épié plusieurs minutes. Il avait le même regard que le premier mais pourtant, elle y voyait au fond de ses prunelles, une légère lueur attrayante, comme des étoiles dans une nuit noire. Il portait encore ses habits clairs de la veille, contrastant avec ceux sombres de ses acolytes.

Celui qu'elle ne connaissait pas était beaucoup plus âgé mais surtout beaucoup plus sérieux et prestant. Elle se refusa de le regarder plus longtemps, effrayée.

« Tu as intérêt à avoir une bonne raison pour l'avoir gardée. C'est une témoin, tu t'en rends compte ? On ne garde jamais de témoins. » Le senior secoua la tête, agacé, tout en regardant sa montre. « Sa fille ? »

« Je suppose. Je l'avais jamais vue avant. »

« Tu n'avais qu'une mission, Beto, éliminer l'associé et les gens présents avec lui... alors... élimine-la. C'est simple. »

Il fit un simple geste de la main avant de partir en direction de la sortie. Mirko le suivit, amusé par le ton belliqueux de son père tout en buvant paresseusement un soda de fast food. Adriana ne put se retenir de penser qu'il agissait toujours ainsi, flegme et insouciant. Du moins, à chaque fois qu'elle le voyait, il avait l'air de se moquer du monde et des gens qui l'entouraient. Pourtant, ce n'était pas complètement le cas et il se retourna une dernière fois comme s'il voulait imprimer son visage sur sa rétine avant que celui-ci ne soit détruit par une balle.
Beto se frotta la mâchoire anxieusement avant d'interpeller sa famille. Il se sentait humilié que son paternel ne soutienne pas sa décision et le regard suffisant de son cadet l'agaçait au plus au point.

C'était lui le futur chef du groupe et il était temps qu'il impose ses idées.

« On pourrait la garder ? » Son petit frère fit demi tour tout en scrutant son père qui plissait les yeux. Il n'arrivait à dire si c'était de la curiosité ou de l'agacement. « Ça nous permettrait d'appuyer notre pouvoir. »

« C'est le seul moyen pour toi de te faire une meuf ? Par la force ? »

« Mirko ! Tais-toi ! » Il haussa les épaules comme s'il n'avait pas exprimé une évidence. Beto parlait d'elle comme si elle n'était qu'un objet sans vie, sans pensée et liberté, comme si elle ne venait pas de voir son père mourir devant ses yeux. « Tu as raison. Tu vas la ramener à la maison et tu vas t'en occuper. Il n'y a rien de plus terrifiant pour nos associés juges que de marier leurs filles par la force. Elle sera notre porte d'entrée pour agrandir les affaires. En plus, elle ne pourra plus parler à la police comme ça. » Beto fit les gros yeux, il ne pensait pas à une telle alliance. Il voulait seulement s'amuser quelques temps avant de la tuer ou de créer un réseau de prostitution. « Qu'est-ce que tu attends ? Détache-la, on rentre. »

Le plus jeune des trois ne put se retenir de rire discrètement alors que l'autre détachait Adriana. Celle-ci profita de cette diversion pour essayer de fuir à la première opportunité. Elle frappa d'un faible coup Beto qui jura tout en tenant sa lèvre fendue. Néanmoins, son action fut vaine puisque Mirko attrapa fermement son bras tout en secouant la tête. Le contact visuel ne dura que quelques secondes, seulement le temps que l'aîné se redresse et approche, pourtant il semblait que le monde s'était arrêté de tourner, comme si l'univers avait décidé de leur accorder un No man's land.

« Ne te débats pas. Ça sera bien pire. » Ce n'était qu'un murmure mais qui la traversa de part en part. Il resserra son emprise et pour la première fois depuis qu'elle l'avait rencontrée, elle eut peur de lui. « Et n'essaye pas de me frapper, si t'as peur de mon frère, crois-moi, tu as bien plus à craindre avec moi. »

« Laissez-moi partir. Je dirai rien. Je quitterai le pays et vous me verrez plus jamais. »

« Ça marche pas comme ça. T'es pas tombé sur le bon frère. »

Beto arriva à leur hauteur alors il la relâcha, passant en dernier pour fermer la porte du hangar mais surtout pour s'assurer que son frère n'userait pas de son pouvoir pour brutaliser, plus que nécessaire, la jeune femme. Il faisait dorénavant jour et sa famille n'avait besoin de se faire remarquer. Il les regarda monter dans leur voiture puis quitter la zone industrielle. Il n'était pas impatient de rentrer dans la maison familiale alors il s'appuya sur le capot de sa voiture pour regarder les alentours. C'était calme à cette heure-ci, seuls quelques camions venaient et repartaient, inconscients de ce qu'il pouvait se passer à quelques mètres d'eux. Il secoua la tête à ses pensées avant de s'allumer une cigarette, laissant la fumer envahir son vide intérieur tout en le noircissant un peu plus.

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