4

942 26 8
                                    

Après la soufflante de son père, Beto partit avec quelques uns de ses hommes pour rencontrer un policier et ainsi récupérer le sac d'Adriana. Mirko en profita pour faire réchauffer un plat dans le micro-onde. Tout juste chaud, il le prit pour rejoindre la chambre de la jeune femme, remerciant intérieurement son frère pour avoir laissé la clé.
Il n'eut à peine le temps d'ouvrir la porte que la brune tendit son poignard en vaisselle vers son visage. Il attrapa son poignet avant qu'elle ne fasse un mouvement mais finalement, elle descendit sa main en voyant que c'était lui. Elle pinça ses lèvres tout en reculant, se rendant compte de son acte déraisonnable. Mirko afficha un demi-sourire, enjoué de voir qu'il avait eu raison sur l'arme mais aussi qu'elle se retirait lorsque c'était lui. Il posa son assiette sur le bureau avant de se retourner et de s'appuyer contre celui-ci. Elle s'était éloignée à toute vitesse, sa menace raisonnant dans sa tête.

« C'était une bonne idée. » Il croisa ses bras contre son torse tout en la scrutant. Elle portait encore sa robe mais celle-ci était dorénavant froissée et tachée. Ses cheveux n'étaient plus aussi lisses et son maquillage avait coulé à cause de ses émotions. Pourtant, il lui trouvait encore quelque chose de spécial comme le soir dernier au restaurant. « Sauf que, si tu veux blesser quelqu'un avec une arme artisanale, il vaut mieux que tu prennes... » Il se pencha pour attraper un bout de vaisselle plus fin mais pointu pendant qu'elle le guetter sans retenue. « ...celui-là parce qu'on dirait pas mais il faut beaucoup de force pour rentrer dans la chair. » Il s'approcha, le regard amusé mais Adriana le prit comme un avertissement. Elle recula jusqu'à se retrouver contre le mur, son cœur battant la chamade. « Celui-ci sera plus facile à faire rentrer plusieurs fois, rapidement. Et il faut viser les artères, pas besoin de viser si haut, t'es toute petite. » Il lui montra l'objet, jouant avec entre ses doigts avec aisance. « Efficace. »

« Je suis désolée, ne me faites pas de mal. »

Elle ferma les paupières de toutes ses forces. Elle pouvait sentir son souffle contre son crâne dorénavant et la peur absurde qu'il l'embrasse comme Beto tirait ses entrailles. Elle ferma les poings, se raidissant tout en le suppliant intérieurement de la laisser tranquille. Quelques larmes s'échappèrent, glissant sur ses pommettes jusqu'à la commissure de ses lèvres. Celles que Mirko avait épié sans retenu dans le restaurant. Il les dévisagea une nouvelle fois, s'arrêtant sur la plaie encore ouverte, se retenant de la frôler de son pouce. Il ne put que serrer la mâchoire de colère. Il n'avait jamais été proche de son frère mais celui ci devenait incontrôlable, n'agissant que selon des pulsions tout en oubliant les valeurs de sa famille.

« Il t'a frappée ? » Elle secoua la tête pour démentir. Cet acte était bien plus complexe que ça, bien plus humiliant pour la jeune femme. « Comment est-ce qu'il a fait ça ? »

« Il m'a embrassée de force et m'a mordue pour se venger de la claque. » Il résista à l'envie de jurer, de localiser son frère, de le battre jusqu'à ce qu'il supplie et formule les règles de leur mère. À la place, il lui donna le morceau d'assiette tout en évitant de toucher sa peau. Son regard orageux trompa celle-ci qui pensa simplement qu'il était repoussé par cette proximité. « Qu'est-ce que.. vous faites ? »

« Garde ce bout dans ta table de chevet ou sous ton oreiller. Si jamais il tente quoique ce soit, protège toi avec. »

« C'est votre frère. Pourquoi est-ce que vous me donnez une arme ? » Elle fronça les sourcils, confuse, mais il haussa seulement les épaules. Il n'avait aucune envie de lui offrir sur un plateau les failles de sa famille. « Et ça ne l'arrêtera que partiellement, pas vrai ? »

« Effectivement. On est plutôt coriace mais c'est plus... amusant de... te donner une chance. »

Selon tous ses souvenirs, il s'était toujours battu mais surtout, il avait toujours manié le couteau. Son père l'avait éduqué dans ce sens afin d'assurer les missions familiales. Ses mains et ses bras, maintenant adultes, gardaient les traces de son enfance et de son apprentissage. D'autres cicatrices étaient plus profondes, crées par d'autres, comme son frère mais il les avait rendues. Ces combats les avaient formatés dès le plus jeune âge à se haïr. Les années n'avaient rien arrangé alors qu'ils se construisaient avec des personnalités opposées.

« Mange maintenant et évite de jeter une nouvelle fois sur le mur. Les employés n'ont pas à nettoyer tes caprices. » Lorsqu'il rejoignit la porte, elle se précipita vers lui en panique pour attraper son bras et le retenir. Il se libéra brusquement comme si son contact venait de le brûler. « Qu'est-ce que tu veux ? »

« Je... » Elle sonda son regard mais celui-ci était indéchiffrable comme s'il préférait se barricader derrière ses longs cils. Elle racla sa gorge pour reprendre constance avant de reprendre. Elle se devait de profiter de son geste gentillet pour avoir plus. « Je veux voir votre père. C'est lui qui prend les décisions, non ? Je veux négocier avec lui. »

« Tu n'as aucun moyen de négocier. » Il plissa légèrement les yeux, interrogateur, et elle s'y perdit de nouveau. Elle ne pouvait s'empêcher d'y scruter les étoiles. « Alors, assis-toi sur ta chaise et mange ton assiette. Si tu as envie de discuter, c'est avec mon frère. Ne me fais pas regretter mon geste de pure pitié. »

« Sinon... sinon je m'enfuirai. Je trouverai un moyen. » Il gloussa tout en s'approchant jusqu'à ce qu'elle n'ait plus le choix que de relever le menton pour avoir une chance de le regarder. Cette fois, elle se battit contre ses propres instincts et ne recula pas. « Je suis prête à tout. Et, sinon, dès que j'aurai une chance, je vous anéantirai. Tous. » Il souriait farouchement, amusé, tandis qu'elle essayait de se montrer provocatrice et redoutable. Toutefois, ses efforts étaient vaincs. Mirko n'avait plus de peurs depuis bien longtemps et il n'avait besoin que de se tenir devant elle pour qu'elle se fasse toute petite. « Si tu ne... »

« Tu me tutoies ? »

« Je... » Elle piqua un fard. « Tu ne mérites aucune marque de respect. »

« Tu ne me connais pas. »

« J'en sais suffisamment sur toi...Mirko. » Elle posa son index sur son torse et il la laissa faire, prenant plaisir à voir cette rébellion,  mais rien ne sortit de sa bouche parce qu'en réalité, elle ne connaissait rien de lui, même son caractère et ses intentions étaient indéchiffrables. « Tu es méchant et... mauvais. »

« Oui, enfin, pas besoin d'une longue enquête pour ça. » Il inclina la tête tout en avançant d'un pas, réduisant à néant la résistance en face de lui. « Moi, je sais qui tu es. » Contrairement à Beto, lui, investiguait toujours sur l'entourage, surtout lorsqu'il était dans son domicile, surtout lorsqu'il ressemblait à Adriana. « Adriana Cascio, fille unique d'un grand juge mais qui a toujours refusé de vivre sous son aile. Elle a toujours vécu dans le déni quant aux affaires frauduleuses de son daron. Pourtant, même le meilleur juge n'a pas une telle vie luxurieuse sans un petit plus à côté. Elle a un petit appartement à peine emménagé et un travail dans une boutique de ville. Et son portable est loin d'être envahi par des messages d'inquiétude malgré son absence et la mort de son cher père. En plus, sa mère a décidé de divorcer et de refaire sa vie en.... »

« ...Arrête, Mirko, s'il te plaît... » Elle baissa la tête, touchée. « C'est bon, t'as gagné. Laisse-moi. »

Il perdit son sourire face à sa mine déconfite et les mots de Beto ressortirent comme une prémonition. Il venait de lui donner l'arme idéale puis l'avait humiliée. « Je vais parler à mon père mais seulement parce qu'il faut un contrat de mariage pour mon frère et toi. Je sens que tu vas être la perte de ma famille. »

CosmosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant