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Mirko ne prit pas la peine de passer par la salle de bain avant de se coucher. Il était épuisé par son voyage et ne souhaitait qu'une chose, s'allonger dans son lit. Il retira ses chaussures avant de s'écrouler, encore habillé. Comme habituellement, il passa sa main contre les lattes de son sommier pour sentir son couteau mais fut surpris de ne rien sentir. Le sommeil prit la fuite subitement pour laisser place à l'angoisse. Il se releva pour soulever son matelas et fut surpris de le voir au sol. Il l'attrapa et remarqua directement le sang. S'il y avait bien une chose qu'il faisait toujours, c'était de nettoyer ses armes.

« Adriana. »

Il abandonna le couteau avant de se précipiter en dehors de sa chambre. Malgré l'heure tardive, il ne fit pas l'effort d'être silencieux et courut jusqu'à la jeune femme. Il toqua de toutes ses forces à la porte mais rien n'y faisait, après les derniers événements, celle-ci n'avait pas quitter son lit. Il perdit patience mais avant qu'il ne force la serrure, il se rendit compte que celle-ci était déjà lésée. Lorsqu'il entra, il alluma la lumière, se moquant de la réveiller. Toutefois, elle n'eut aucune réaction, le faisant paniquer un peu plus. Il s'approcha d'elle à toute vitesse avant de la secouer.

« Adriana ! » Elle ouvrit les yeux sans pour autant prendre la peine de le regarder. Il fut rassuré par la chaleur de sa peau et en profita pour détailler la pièce. Le linge en sang à ses pieds ne le rassura pas. « Qu'est-ce que t'as fait ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ? »

« Laisse-moi. » Elle referma ses paupières pendant que d'autres larmes flouaient sa vue. « Je veux juste dormir. »

Il tira sur ses manches pour s'assurer qu'elle ne s'était pas coupée les veines comme elle l'avait menacé avant de partir. Il fut soulagé de voir ses avant-bras sans égratignures. Néanmoins, il remarqua les hématomes puis la plaie hideuse sur son doigt. « Tu t'es coupé le doigt avec mon couteau ? » Elle acquiesça seulement. Il passa son pouce sur sa plaie, il pouvait y voir le passage d'un fil mais surtout le style de suture de son frère, malgré la peau dorénavant déchirée. « Beto t'a fait des points. » Une nouvelle fois, elle hocha la tête. Son menton se mit à trembler et il ne put que la regarder confusément. « Pourquoi est-ce que tu n'as plus tes points alors ? » Elle préféra ne pas répondre plutôt que de raconter la mutilation qu'elle avait subi. « Est-ce que tu as perdu ta putain de langue en même temps ? »

« J'suis juste fatiguée. »

Il dut se retenir de lui faire un commentaire malgré son ton désagréable. « Est-ce que tu veux que je te soigne ? Ça mérite des points et une désinfection. »

« Comme tu veux. »

Il se leva sans argumenter pour trouver le trousse de secours dans la salle de bain. Celle-ci avait été rangé par la gouvernante de la maison. Et, connaissant bien la maison et ses habitants, elle avait remplacé le matériel abimé par Beto pour du neuf. Lorsqu'il rejoignit la jeune femme, il ne put retenir une pointe d'inquiétude au creux de son estomac en la voyant toujours dans la même position. Celle qui bougeait tout le temps, qui luttait encore et encore semblait à bout de souffle. Il prit place à ses côtés et posa sa main sur ses cuisses comme son frère l'avait fait.

« J'ai pas d'anesthésie. À la maison, on en a jamais utilisé. » C'était comme une excuse pour la douleur qu'il allait occasionner mais elle ne répondit pas. « J'ai eu mes premiers points de suture quand j'avais quatre ans. J'étais tombé de mon vélo et je me suis ouvert l'arcade. » Il pointa du doigt une fine cicatrice qu'elle ne regarda pas. « C'est mon père qui a fait les points, sans anesthésie. » Il commença à la coudre mais la douleur qu'elle ressentait sur ses côtes camouflait celle qu'il provoquait. Il fut surpris de son absence de réaction. « Quand j'ai pleuré, il m'a donné un coup si fort qu'il m'a ouvert l'autre côté. »

Cette fois, elle quitta le vide en face d'elle pour regarder son visage. Il avait effectivement une cicatrice de chaque côté, presque imperceptible du fait de leurs années mais elles étaient bien là, racontant son histoire. Elle se demanda combien pouvait-il en avoir, encore, sous son pull ou sous son pantalon. Puis, elle repensa aux petits garçons sur la photo de la chambre de Mirko. Il était jeune, un peu plus de quatre ans mais il souriait malgré tout, malgré un père qui le cognait parce qu'il pleurait. Et elle fit de même, des larmes silencieuses coulèrent sur ses joues.

« Je te fais si mal que ça ? » Elle secoua la tête. « Mon histoire est pas si triste que ça, pleure pas. »

« Il faut que je te montre quelque chose. »

« Laisse-moi terminer le dernier point, tu veux bien. » Il le fit avant d'envelopper sa plaie dans un pansement. À peine son matériel rangé, il resta à ses côtés. « Alors ? » Elle attrapa l'ourlet de son haut pour le surélever mais il la retint d'un geste brusque. « Qu'est-ce que tu fais ? T'es dingue ou quoi ? » Elle leva les yeux au ciel tout en se libérant. « Tu sais que je déteste quand tu fais ça, t'as de la chance d'être blessée. »

Elle leva son t-shirt pour lui montrer le B, dorénavant gravé sur sa peau. Mirko se releva immédiatement pour abandonner Adriana. Il fila jusqu'à la chambre de Beto pour donner un coup d'épaule sur la porte qui s'ouvrît brusquement. Celui-ci dormait mais sortit son arme de sous son oreiller pour le pointer vers son cadet. C'était un simple réflexe mais la décision de le laisser tendue vers sa tête était conscient. Néanmoins, le plus jeune n'eut aucune crainte et s'approcha jusqu'à ce que le revolver soit contre sa poitrine.

« Comment t'as pu faire un truc comme ça ? » Il attrapa son bras pour le replier, tournant l'arme sous le menton de Beto. « C'est une meuf, sans moyen de se défendre et tu viens de la scarifier. »

« Je fais ce que je veux d'elle et t'as rien à dire ! »

« J'ai mon mot à dire parce que je vis ici ! »

L'aîné se libéra et quitta son lit, profitant de la fatigue des derniers jours de son frère. Néanmoins, il n'eut le temps de pointer une nouvelle fois son arme vers Mirko que leur père arrivait. « Dans le salon. Tout le monde. Tout de suite. »

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