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Léo arriva en trombe devant la maison des ravisseurs. À peine il eut le temps de claquer la portière qu'il sautait dans les bras de son meilleur ami. Ils se connaissaient depuis suffisamment longtemps pour être des frères de cœur, bien plus fidèles que des frères de sang. Adriana resta en retrait, épuisée par les derniers jours et incapable de décider ce qui était le mieux à faire. Et, de toute manière, il lui était impossible de prendre la fuite, de faire plus de deux pas sans s'écrouler.

« Putain mec, j'ai cru t'étais mort ! Je t'ai cherché partout, j'ai regardé un million de fois les vidéos de surveillance ! »

« C'est à cause de Beto. Ils font du trafic d'humains et il a voulu faire affaire avec eux pour... » Ils se lâchèrent enfin pour se regarder. Léo ne put se retenir de grimacer, écœuré par les blessures de son ami. « Il faut que des gars viennent nettoyer. Il y a mes empreintes partout et ils sont tous morts. »

« T'inquiète, ça sera fait. »

Mirko acquiesça et avant d'entrer dans la voiture, il ouvrit la portière arrière pour la jeune femme qui n'essaya pas de se battre, passant d'une main à une autre comme si elle n'était qu'un objet. Les deux hommes n'eurent besoin d'échanger sur la destination que Léo prenait la route. Elle appuya sa tête contre la vitre pour fermer les paupières et se sortir au moins, grâce à son esprit, de cet enfer. Elle termina par s'endormir, non pas par apaisement d'être sortie mais seulement à cause de la chute d'adrénaline.
Elle fut réveillée par Mirko qui la secouait légèrement. Elle ne sursauta pas, lasse, et ne demanda pas où elle était alors qu'elle ne reconnaissait pas les lieux. Elle se laissa guider dans l'accueil puis dans l'ascenseur, suivant derrière tout en fixant le sol, n'ayant aucun intérêt à regarder ou à repérer des issues. Elle était seulement usée. Il l'invita à entrer et elle n'eut besoin de le questionner pour comprendre qu'elle était seulement dans l'appartement de Léo. Elle pouvait y voir des photos de lui, de sa famille et de ses amis. Ça n'avait rien à voir avec la maison des Castellano et elle se demanda comment ils pouvaient être amis.

« J'ai mis vos affaires dans la chambre d'amis. »

« Adriana va la prendre. Je dormirai dans le canapé. Et on ne reste qu'une nuit, t'inquiète. »

« Faites comme chez vous, je vous laisse tranquille quelques heures. Je vais voir avec les gars pour nettoyer et je vous envoie le doc. » Mirko le remercia par un simple hochement de tête. « Pas de bêtise. Vous en avez suffisamment fait, je crois. »

« Très drôle. »

Cette fois, ce fut la brune qui s'interposa, ne supportant pas le second degrés dans une telle situation. Il ne répondit pas et partit, laissant les deux blessés seuls. Mirko souffla, soulagé d'être enfin dans un endroit, privé, sécurisé mais surtout loin de tout acte de torture. Du moins, physique parce que pour sûr, la jeune femme était douée pour le torturer mentalement. Pourtant, cette fois, elle semblait éteinte et il espérait étrangement que ça change rapidement parce qu'il ne supportait pas son immobilité.

« J'te laisse te doucher en première. »

« Tu en as bien plus besoin que moi. » Elle le regarda pour la première fois depuis qu'ils étaient sortis de la maison et son regard ne plut pas à Mirko. Il rêvait de la secouer comme un prunier, de la faire revenir, mais aucune violence physique qu'il connaissait n'aiderait. Pour le reste, il n'avait aucune compétence. « Vas y, s'il te plaît, j'ai pas envie de me battre. »

« Sers-toi à manger, au moins. »

Elle acquiesça et il attendit qu'elle se dirige vers la cuisine pour s'éclipser dans la salle de bain. Dès qu'il referma la porte, il s'y appuya pour relâcher la pression. Après la sortie de la maison, la douleur de son corps s'était soudainement enflammée jusqu'à un point où il avait eu le souffle coupé et la nausée. Pourtant, il avait tenu la conversation à Léo et avait même marché sans aide jusqu'à cet endroit. Néanmoins, seul avec ses pensées et sa souffrance, il lâcha prise, laissant un râle se libérer de sa poitrine. Un léger toquet se fit immédiatement entendre, Adriana inquiète, était juste derrière.

« Tout va bien ? »

« ...Ouais.... Ouais. » Il se décolla de la porte comme si son toquet venait de créer une décharge électrique dans son dos. « Je vais bien. Je me suis juste cogné contre le lavabo. »

« Ne te blesse pas plus que tu ne l'es déjà. »

Il ne répondit pas, trop souffrant pour accepter son sarcasme. Il ôta la veste prêtée par son meilleure ami puis son bas, se retenant de gémir une nouvelle fois alors que le frottement de son pantalon contre la plaie infectée le brûlait. Il fit l'état des lieux de ses blessures.
De son visage, son œil, sa pommette, sa lèvre. Il était certain que son assaillant était droitier.
De son torse, ses coups de lame simplement pour le torturer, de l'hématome longeant ses côtes fêlées.
De sa cuisse, plantée par un couteau.
Il alluma le jet d'eau et ne prit pas la peine d'attendre une température agréable pour s'y glisser. Le sang coula à ses pieds mais il n'en fut pas surpris et se lava seulement. Adriana, elle, sortit quelques aliments du frigo pour cuisiner un repas rapidement. Ils avaient peu eu l'occasion de manger et de boire ces derniers jours et même si elle gardait une boule de nerf dans l'estomac, elle mourrait d'envie de se nourrir.

Et Mirko fut soulagé de sentir l'odeur en sortant.

« T'as cuisiné ? » Elle acquiesça, un sourire pincé sur les lèvres. Il s'était bandé de compresse rapidement avant de s'habiller confortablement. « Je peux en manger ? »

« J'ai prévu une portion pour toi. » Il s'approcha, ravi alors qu'elle tendait déjà une assiette entre eux.

« Merci, tu vends du rêve. »

Ils s'installèrent tout deux à la table, chacun à un opposé. « J'arrive pas à croire qu'on soit sorti. »

« Moi non plus, ça partait vraiment mal. »

« Et maintenant ? Qu'est-ce que tu vas faire de moi, Mirko ? »

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