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À peine Mirko avait quitté la chambre qu'il s'était dirigé dans le bureau de son père. Bien entendu, il n'avait pas exprimé le besoin d'Adriana de négocier ses conditions de vie mais seulement qu'ils se devaient de protéger la famille par un contrat de mariage. Il espérait maintenait que celle-ci aurait suffisamment de prestance pour défendre ses droits parce qu'il ne pourrait le faire pour elle mais surtout que son père imposerait les règles nécessaires. Il ferma la porte derrière lui, à regret. Cette pitié qu'il ressentait pour elle devenait insoutenable, si bien qu'il trépigna d'impatience et fit les cents pas. Elle l'avait touché d'une manière qu'il ne connaissait pas, dès le premier soir au restaurant. Il avait cru halluciner en la revoyant dans le hangar, comme si l'univers s'en était mêlé et il détestait ça.
Dans la pièce, il ne restait plus que le patriarche, Beto et Adriana. Elle était à côté de ce dernier qui tenait en sa possession un dossier beige. Il comportait toutes les informations sur celle-ci.

« Je veux qu'on fasse ça rapidement. » Ils acquiescèrent, en accord avec le chef de famille. Aucun des deux n'avaient envie d'être ici, l'un à côté de l'autre, la lèvre fendue. « Je ne céderai pas sur le mariage ainsi qu'un petit fils. Il nous faut un héritier. »

« Beto pourrait trouver une femme qui l'aime et qu'il aime. C'est pas ce que vous souhaitez pour lui ?»

« Les affaires avant. » Il écrivit sur un papier blanc d'un crayon à son nom. Pour lui, l'amour n'avait aucun intérêt simplement parce qu'il avait eu lui-même le cœur brisé par la mort de sa femme. Il s'était promis de s'en protéger dans l'avenir et de garder éloigner ses fils de cette faiblesse. « Ce mariage nous ouvrira beaucoup de portes dans le droit. Tu nous aideras, d'ailleurs, ça aussi ce n'est pas négociable. Tu nous mettras en contact avec les anciens collègues de Monsieur Cascio. » Elle serra les poings tout en regardant le sol, détestant soudainement son propre père de l'avoir mise dans une telle situation. Il aurait dû partir seul, la laisser en dehors de cette histoire. À la place, il l'avait placé en plein milieu d'une guerre qu'elle ne comprenait pas. « Nous, nous te donnerons tout ce dont tu as besoin, vêtements, nourritures et tout ce que tu souhaites en extra. Tu as le droit d'être dans la maison, libre, mais si tu veux sortir, tu seras accompagnée. »

« J'aimerais une chose. »

« Je t'écoute. »

« J'aimerais que... j'aimerais garder ma chambre... j'aimerais que Beto ne me touche pas avant le mariage. »

Celui-ci quitta sa chaise, s'opposant à cette idée. Il n'était aucunement gagnant et tout tournait à son désavantage depuis qu'elle était entrée dans sa vie. Lui qui souhaitait seulement s'amuser avec elle devenait un mari, sans même goûter au plaisir charnel. Si Mirko avait été là, il lui aurait sûrement dit que ce n'était qu'une histoire de karma et que c'était complètement mérité. Il eut soudainement l'envie de sortir et de mettre son poing dans son visage.

« Hors de question ! » Sa jugulaire devint proéminente de colère et Adriana repensa au conseil de Mirko sur les meilleurs endroits où planter un couteau. Elle regrettait sa porcelaine sous son oreiller. Elle aurait pu le planter, là, et tant pis si elle en mourrait. « J'ai aucun avantage à ce deal ! Je veux faire ce que je veux d'elle ! »

Son père se leva à son tour, les poings appuyés contre son bureau. Si son cadet avait été là, il aurait adoré la scène. « Je te déconseille de parler ainsi, dans cette maison, dans ma maison. Il y a des règles ici alors rassieds toi. Tout de suite. » Beto le fit, sans broncher et Adriana dut se pincer les lèvres entre elles pour retenir son contentement de s'afficher en plein milieu de son visage. « Si tu ne voulais pas subir de telles règles et être tranquille, tu n'avais qu'à te débarrasser d'elle quand je te l'ai demandée, à plusieurs reprises. » Il se retourna vers la brune qui gardait ses yeux vers le parquet. « Quelque chose à rajouter ? »

« Je ne pourrai jamais partir ? »

« Nous verrons quand vous nous donnerez un petit fils. » Il mentait et elle le sentit à son ton. Elle était soit captive, soit morte. « C'est tout ? » Elle acquiesça, soulagée néanmoins d'être libérée de Beto pendant quelques semaines, peut-être même quelques mois avec un peu de chance. Elle espérait seulement trouver un plan pour s'enfuir avant le fameux mariage mais surtout, avant d'être mère d'un enfant de cet homme.  « Alors, sortez. »

Elle ne se fit pas prier et se releva pour prendre la sortie à toute vitesse, si bien qu'elle loupa le regard assassin de Beto. Dès lors qu'elle ferma la porte derrière elle, elle s'y appuya pour inspirer profondément, se rendant compte qu'elle avait retenu son souffle dès qu'elle avait vu le chef de famille. Quand son cœur cessa ses rebonds désordonnés contre sa cage thoracique, elle rouvrit les paupières mais ce dernier s'emballa de nouveau. Cette fois, la raison était tout autre. Mirko était appuyé contre le mur d'en face, de sa plus belle indifférence alors qu'il était, pourtant, impatient voire inquiet de connaître le verdict de cette entrevue.

« Alors ? »

« Je vais me marier et avoir des enfants avec lui. » Il essaya de garder sa nonchalance mais son léger froncement de sourcils le trompa. « Mais... je suis libre de mes mouvements dans la maison. Et j'ai demandé à ce que Beto ne me touche pas avant le mariage. »

« Ce n'est pas pour ça qu'il le fera pas. »

« Laisse-moi profiter de ma petite victoire. S'il te plaît. »

Il inclina la tête tout en la regardant partir, préférant ne pas argumenter parce qu'en réalité, c'était une grande défaite. Adriana restait à la merci de la famille Castellano, jusqu'à la fin de ses jours. Beto n'était pas du genre à suivre les dires de son père. Ainsi, elle acceptait seulement de vivre ici, sous leurs conditions. Tout son avenir était dorénavant corrompu.
Malgré la conclusion désastreuse de l'entrevue, il épia sans retenue sa robe qui épousait ses courbes ainsi que ses pieds nus qui foulaient le parquet. Il ne se rappelait pas avoir vu une femme ici et ainsi, gracieuse et délicate, on aurait dit une sorte de fantôme ou d'ange, venu d'ailleurs. Il souffla face à son obnubilation.

Beto ne tarda pas à sortir à son tour. À l'inverse de la jeune femme qui était sortie calme et apaisée, celui-ci était en rage, les joues rouges et les tempes suantes. Après le départ de la brune, le patriarche avait utilisé toutes ses qualités de chef pour le remettre à sa place.

« Tout va comme tu veux ? » Mirko souriait malicieusement. « On pourrait croire que tu es en colère. »

« Va te faire foutre. »

Le cadet ne put s'empêcher de rire tandis que son frère lui envoyait son majeur en sa direction tout en partant.

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