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Beto enferma Adriana dans une des chambres de la maison. Malgré la fatigue, celle-ci ne perdit pas de temps pour fouiller chaque recoin. Lors du trajet, elle s'était imaginée un manoir vampirique, sombre et glauque. Pourtant, à l'inverse, c'était une demeure lumineuse et moderne. Il était certain qu'ils avaient de l'argent mais que celui-ci était sale, taché par le sang, notamment celui de son père.
Elle ne trouva rien dans les tiroirs ou les placards. L'endroit était vide et neuf comme si rien n'avait été utilisé. Tout était neutre mais surtout, rien ne pouvait servir d'arme.

Elle profita du calme pour s'allonger dans le lit, appréciant la couette et son odeur de lessive. Au moins, tout était propre et confortable. Elle ferma les paupières, inspirant profondément pour s'apaiser. Toutefois, dès qu'elle s'endormait, le visage de son père en sang revenait. Elle ne comprenait pas les derniers événements. Son paternel était un simple juge qui voyageait de temps en temps avec des collègues pour des courses équestres. Quand elle était plus jeune, et vu qu'il n'était que deux, elle allait avec lui. Il était apprécié et reconnu pour sa profession.
Pourtant, il semblait avoir eu de mauvaises rencontres.
Le mot associé résonnait dans la tête d'Adriana. Comment son père avait-il pu s'associer avec ce genre d'hommes ? Pour quelles raisons ? Est-ce que son père truquait les paris ? À ses pensées, elle ne put retenir quelques pleurs qu'elle dut sécher rapidement en entendant le verrou. Elle se redressa sans pour autant prendre la peine de se lever.

« Je t'apporte à manger. » De son pied, Beto claqua la porte, la faisant sursauter bêtement. Il posa son repas sur le bureau avant de se retourner. Il avait quitter sa veste pour ne garder que sa chemise légèrement ouverte. Elle pouvait y voir d'autres cicatrices et ça l'effraya.  « T'as intérêt à manger. J'veux pas d'une femme maigre. »

« Laissez-moi partir, je vous en supplie. Je ne ferais aucun bruit. Je disparaîtrais pour toujours. »

« Mais on n'a plus trop le choix maintenant, tu crois pas ? En plus, j'ai aucune confiance en toi. On ne garde pas de témoins, dans ma famille, pour dormir sur nos deux oreilles. »

« Comment dormir après avoir tué ? »

« Il y a bien pire que tuer. »

Elle essaya de reculer dans le lit alors qu'il s'avançait tel un prédateur. Il fut plus rapide qu'elle et attrapa ses chevilles pour l'attirer vers lui. Dorénavant, seuls quelques centimètres séparaient leur visage mais surtout leurs lèvres. Pour seule réponse, elle les plissa, espérant le dissuader mais ce ne fut que plus tentant. Il serra sa mâchoire de sa poigne jusqu'à ce qu'elle geigne de douleur. À peine elle n'eut le temps d'ouvrir sa bouche qu'il l'embrassait avidement mais surtout violemment, la mordant jusqu'au sang pour se venger de sa claque quelques heures plus tôt.

Comme s'il ne venait pas de la blesser, il s'éloigna, tout en essuyant son menton du sang d'Adriana qui n'avait pu retenir ses larmes. Il ne cacha pas son sourire victorieux avant de quitter la pièce, sans oublier de verrouiller. La jeune femme s'approcha de son plateau pour y prendre puis jeter l'assiette contre le mur blanc. La nourriture glissa contre celui-ci lentement tandis que la porcelaine s'étalait au sol. Elle attrapa un morceau tout en l'évaluant. Il ne lui avait pas donné de couvert mais ce débris était suffisamment tranchant pour blesser quelqu'un. Ce fut à son tour de se réjouir.

Beto, lui, retourna vers la cuisine où son frère mangeait, assis sur le comptoir.

« Alors ? T'as nourris ton animal de compagnie ? »

« Je crois qu'elle a jeté son assiette. » Il haussa les épaules. « Peut-être qu'elle va se couper les veines si je la laisse encore mariner seule quelques heures, j'aurai pas besoin de me marier. » Mirko acquiesça tout en faisant une grimace, pensant surtout au fait qu'elle avait sûrement créé une arme coupante pour le poignarder à la prochaine occasion. Il resta néanmoins silencieux, une autre cicatrice ne serait qu'une autre manière de se moquer des inaptitudes de son aîné. « Elle est complètement folle. »

« T'avais qu'à la buter comme prévu. »

« Si les gars ne m'avaient pas balancé, j'aurai pris mon pied et je m'en serai débarrassé. » Il ouvrit le frigo à la recherche d'un repas. « De toute manière, dans quelques années, ils n'auront plus le choix de suivre ce que je décide. »

« Ne mets pas en terre papa avant l'heure. » Ses épaules remontèrent de frustration face au besoin de pouvoir de Beto. « Pour le moment, t'es même pas capable d'identifier qui est dans une voiture. Ça aurait été un tireur, il y aurait eu plusieurs morts de notre côté. »

L'aîné se retourna, en rage. Il attrapa le col du pull de Mirko qui ne broncha pas. Seule sa commissure droite relevée trahissait son amusement. C'était si simple de toucher l'ego de son frère. « Va te faire foutre ! T'es qu'un second et quand je serai le nouveau chef de la famille, tu ne seras plus rien. Sois tu te soumettras, sois je te butterai. T'entends ? »

« Essaye pour voir. » Il était suffisamment proche pour voir une goutte de sang sur son menton. Il fronça les sourcils, perdant son impassibilité. Son regard devint noir. « Tu l'as frappée ? » Il inclina la tête, jugeant s'il était préférable de se taire ou d'enfoncer le clou. Il n'eut le temps d'élaborer une réflexion sérieuse qu'il avait déjà plaqué Beto contre le frigo. « La maison est un endroit de paix, je te rappelle. La violence y est proscrite surtout contre les femmes. Règles de maman. »

« Maman n'est plus là. » Mirko serra la mâchoire. Il voulait le tuer, là, tout de suite, sortir le couteau de sa poche et le planter dans sa carotide. « Mais si tu veux qu'on respecte ses règles, lâche-moi. »

Il le poussa une dernière fois avant de s'éloigner. « Va te faire foutre. »

Il tenta de quitter la pièce mais le patriarche arriva, énervé par les cris. Il n'eut la chance de s'enfuir que son épaule était attrapée fermement. Pour sûr, il allait passer un mauvais quart d'heures. « C'est quoi encore votre problème ? » Le cadet se pinça ses lèvres pour se retenir de balancer des atrocités envers Beto. Toutefois, celui-ci n'hésita pas.

« Il se mêle de ce qui le regarde pas... tellement il n'a aucune vie. »

« Rappelle-moi comment s'appelle cette fille qui vit maintenant chez nous ? » Cette fois, il n'allait pas le laisser gagner. S'il pouvait le faire taire, c'était en le mettant en difficulté et non pas en l'insultant. Le père mit les deux pieds dedans et se retourna vers son premier fils, interrogateur. « Alors Beto ? Est-ce que tu sais si ses papiers étaient dans la voiture ? Tu les as récupérés ou on va se taper un avis de recherche à gérer dans quelques jours ? »

CosmosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant