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Mirko ouvrit les yeux avec Adriana encore sur lui. Elle dormait profondément et il en fut ravie, d'autant que le soleil se levait sur la ville et qu'il n'avait eu d'autres réveils nocturnes. Il la serra contre lui, trop fortement, si bien qu'elle geignît d'être réveillée. Il ne put se retenir de ricaner alors qu'elle se débattait pour se libérer. Il inversa les rôles, se dressant au-dessus d'elle. Afin d'accentuer son avantage en force, il attrapa d'une main les deux poignets de la brune et les monta.

« T'es bien trop matinale. » Elle gesticulait sous lui, les paupières encore closes, sa lèvre inférieure coincée entre ses lèvres alors qu'il papillonnait les siennes contre sa mâchoire. « Qu'est-ce que tu fais ? »

« Je prends mon petit déjeuner. » Il mordilla son cou pour appuyer ses mots et elle siffla, appréciant ses tendresses. « Encore désolé pour cette nuit. » Elle secoua la tête, refusant de rouvrir le sujet. Aucune excuse était nécessaire de son point de vue et la culpabilité de Mirko ne semblait avoir sa place en l'instant alors qu'il semblait avide d'elle. Néanmoins, le grommellement du ventre de la jeune femme fut une distraction. « T'as faim ? »

« Un peu. » Il se redressa alors, son besoin de nourriture passant devant. Toutefois, Adriana n'en fut pas du même avis et grogna face à l'absence de son corps contre le sien. Lorsqu'elle ouvrit les yeux pour le localiser, elle ne put retenir un regard confus. Il s'habillait rapidement tout en cherchant ses clés d'un œil. « Qu'est-ce que tu fais ? »

« A moins que tu veuilles manger des restes de nouilles chinoises froides, je vais chercher ton petit déjeuner. » Elle tendit ses bras vers lui, une moue sur les lèvres pour le convaincre. Il ne cacha pas son sourire, ni son regard qui ne savait où s'accrocher. « Très tentant mais je ne céderai pas. Reste au lit, je suis là dans cinq minutes. »

« Emmène-moi. »

Il refusa d'un simple geste de la tête. Il avait soudainement perdu son rictus et ses prunelles brillantes. Toutefois, Adriana resta impassible. Cela faisait déjà des semaines qu'elle était ici, enfermée, et jusqu'ici elle n'avait rien demandé de plus que quelques signes de vie et des visites régulières. Et le temps commençait à se faire long ainsi que la pièce devenait anxiogène. La vie continuait d'avancer tandis qu'elle restait dans une sorte de faille temporelle où tout semblait figé. Elle avait besoin de sentir l'air frais, de voir des visages inconnus et d'entendre les bruits de la vie. Elle quitta le matelas pour attraper un survêtement et des baskets.

« J'ai dit non. C'est trop dangereux. »

« J'ai besoin de sortir. Tu peux pas me garder... enfermer. » Elle grimaça face à son propre terme utilisé et la mâchoire serrée de Mirko lui prouvait seulement un peu plus qu'elle avait parlé trop rapidement. « C'est pas ce que je voulais dire. »

« Peu importe. »

« Je resterai dans la voiture. J'ai juste besoin de voir autre chose que ses murs. »

« Je sais. » Il souffla tout en se recoiffant, hésitant. « Promets-moi de ne rien faire de stupide, de rester dans la voiture et de... »

« ...J'te promets. » Elle embrassa sa joue avant d'ouvrir la porte, trépignant d'impatience. « Allez, viens. »

Il regarda derrière lui à la recherche d'un argument lui permettant de la faire changer d'avis. Mais rien ne lui permettrait de garder indéfiniment Adriana sous haute protection. Il céda alors, verrouillant la porte derrière lui tout en priant intérieurement pour que la chance, soit pour une fois, de leur côté. Le sommeil qui la tenait il y a encore quelques minutes s'était échapper pour laisser place à l'excitation. Elle descendit les escaliers à tout vitesse tandis qu'il se contenait de lui faire un commentaire sur sa fougue. Dans la voiture, ils restèrent silencieux pendant qu'il prenait un des trajets les plus longs seulement pour avoir accès à une boulangerie faisant drive in. La jeune femme ne pipa pas un mot sur son besoin de contrôle, seulement ravie de pouvoir voir la ville défiler sous ses yeux,

« Pulcino... » Elle quitta la vitre pour lui. « T'as des nouvelles de ta mère ? »

« Pourquoi tu me demandes ça ? » Il haussa les épaules, innocemment. Pourtant, cette question lui brûlait les lèvres depuis plusieurs jours. Il souhaitait s'assurer que si les choses ne tournaient pas à leur avantage, elle pourrait s'y réfugier, loin des Castellano, loin de lui. « Elle m'a envoyée des textos pour s'excuser et pour me demander des nouvelles. J'ai répondu à quelques uns juste pour la rassurer un peu. »

Il n'eut le temps de répondre que son téléphone sonnait, s'installant directement en haut parleur via le véhicule. C'était Sacha et il ne pouvait louper un appel de son second alors il décrocha tout en continuant sa route. Adriana en profita pour se replonger vers l'horizon, absorbant chaque détails, du ciel et de ses nuages grisonnants aux immeubles essayant de les toucher sans y parvenir.

« Sacha, je suis en haut parleur dans la voiture. Adriana est là. » Il jeta un coup d'œil vers elle mais elle ne fit de même, trop concentrée sur les passants regardant les vitrines des magasins. Elle n'avait pu le faire depuis son enlèvement. Elle n'avait d'ailleurs toujours pas offert les cadeaux à sa famille. Pourtant, elle ne regrettait rien. « Tout va bien ? »

« La nuit a été mouvementée. »

« Vous avez eu le colis ? » Suite au discours de ralliement, Mirko avait tout fait pour piéger celui réticent. Après quelques aveux face à la pression de Sacha et ses acolytes, il avait avoué soutenir le patriarche, coûte que coûte. Ses paroles étaient un tel affront qu'ils ne pouvaient le garder libre, au risque qu'il détruise leur plan de libération d'Adriana.

« On l'a eu, ouais, mais ça a été compliqué. On a dû... »

Il le coupa. « ...on en parle toute à l'heure. J't'ai dit que j'étais pas seul. J'serai au hangar dans une heure. »

« Ok, à toute à l'heure alors. »

Il raccrocha rapidement avant que Sacha ne parle encore d'un sujet sensible. Il fixa la route, ignorant le regard pesant de la brune qui se rendait compte du malaise soudain.

« De quoi est-ce qu'il parle ? »

« Rien, c'est rien. »

« Qui est le colis ? » Il fronça les sourcils, prétendant ne pas comprendre, mais elle insista. « Au hangar, vous ne ramenez pas de simples marchandises, pas vrai ? »

« C'est seulement un traitre. Rien de plus, t'as pas besoin d'être au courant. C'est pas important. »

« Le ton de Sacha me dit tout l'inverse. Dis-moi que ce n'est pas à mon sujet...dis-moi que tu ne vas pas tuer quelqu'un par ma faute. »

« Il va parler si je ne l'arrête pas. Personne ne doit mette en danger le plan. »

« Mais... »

Elle ne put sortir ses pensées tant les émotions se débattaient dans sa tête. À la place, elle se retourna complètement vers sa portière pour y cacher ses larmes.

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