Bepanda, Douala.
Ce matin, Cabrelle s'est levée de bonne heure car elle est pressée de retourner à l'université. Après avoir fait son sac , elle a dû attendre que son frère soit prêt afin qu'ils quittent le domicile familial ensemble.
Avant leur départ, leur mère leur a donné quelques conseils qu'elle s'est chargée d'écouter d'une oreille. Elle n'était pas du genre à suivre ce qu'on lui disait et aimait faire plutôt les choses comme elle voulait. Lorsqu'ils sont arrivés à l'agence, ils ont payé leurs tickets et ont dû attendre que le bus soit plein.
Assise sur un banc, elle regardait les clients se faufiler de gauche à droite avec la tête dans les nuages.
"Si seulement je pouvais me passer de ce genre de transport !"
Certains de ses camarades avaient des chauffeurs personnels mais elle était résignée à cette vie qui commençait à lui déplaire de jour en jour. Perdue dans ses pensées, elle est revenue à l'instant présent par le contact de son frère sur son bras.
_ On y va !
Il s'est levé et elle l'a suivi d'un air vide.
_ C'est reparti pour cinq heures de route avec des emmerdes et un inconfort pas possible.
Dit-elle à voix basse.
Elle a pris place près de son frère et quelques minutes après, leur bus s'est engagé sur la route.
_ À quoi tu penses ?
Richard avait constaté que sa soeur n'était pas dans son assiette.
_ À rien , peux-tu faire comme si je n'existe pas ?!
Dit-elle sur un ton désagréable qui ne lui a pas plu.
_ Hum.
Il a préféré se retenir car ils n'étaient pas seuls. Pendant le trajet, elle ne lui a pas adressé la parole et c'était mieux ainsi se dit-il.
Lorsqu'il sont arrivés au niveau de Bafang, leur voiture a eu une panne. Elle s'est offusquée et s'est retenue d'étaler son mécontentement. Il était pratiquement deux heures de l'après-midi et le chauffeur ne leur avait rien dit de rassurant. Ils sont sortis du bus et ont patienté juste à côté. Le temps ne cessait de progresser et lorsque la nuit a commencé à tomber, un car de secours s'est pointé mais cela n'a pas été suffisant. Certains passagers sont montés et d'autres ont dû attendre le suivant. Cabrelle et son frère étaient parmis la seconde vague.
_ Qu'est-ce qu'on fait ?
Dit-elle à celui-ci quand elle a réalisé que la nuit pouvait les trouver sur place comme un jeu.
_ On va faire l'auto stop, je ne sais même pas pourquoi on n'a pas pensé à ça directement.
_ Tu as encore des sous ? Moi je n'ai rien ein.
_ T'inquiète.
Dit-il en affichant un sourire en coin.
_ Cool.
Son humeur s'est améliorée et la seconde qui suit, ils ont récupéré leurs sacs et se sont mis à stopper les véhicules personnels. Son frère a essayé plusieurs fois mais n'a pas eu de chance. Elle par contre a pu trouver un véhicule après quelques tentatives. Une Prado noire s'est arrêtée et la vitre arrière s'est abaissée.
Elle s'est rapprochée et quand elle a voulu prendre la parole, elle a reconnu le visage.
_ Tu te rends à Bangangté c'est ça ?
_ Oui !
Dit-elle avec le coeur palpitant.
_ Dans ce cas, monte !
Elle a souri et quand elle s'est retournée pour faire part de la bonne nouvelle à son frère, elle a vu son visage s'assombrir.
_ Non merci !
Dit-il simplement d'un air farouche.
_ Mais...
Il l'a interrompu.
_ C'est l'ami de ce con ! Je préfère attendre une autre voiture.
Constantin a souri quand il a entendu l'insulte proférée à l'encontre de son ami.
_ Dans ce cas, à la prochaine.
Il s'apprêtait à s'en aller quand elle a réagi.
_ Un instant, je viens avec toi.
Richard a ouvert grand les yeux .
_ Quoi ?!
_ Oui, si tu veux jouer au petit jaloux ça te regarde. J'ai assez galéré comme ça pour aujourd'hui.
Sans attendre la réponse de son frère, elle a ouvert la portière du véhicule et a pris place à l'intérieur.
_ Attend !
Richard n'a pas voulu la laisser s'en aller avec lui sachant la réputation de son ami. Il s'est dit qu'ils devaient sûrement être pareils. C'est ainsi, qu'il est monté à son tour dans le véhicule.
_ Heureusement que tu as encore un cerveau !
Constantin n'a pu s'en empêcher. Il n'appréciait pas Richard surtout après ce qu'il avait fait à l'ex voisine de Kylian. La rumeur ne s'était pas ebruitée dans le campus car ils avaient voulu préserver la réputation de la fille. Mais cette situation avait été si traumatisante qu'elle avait dû quitter l'université et renoncer à son cursus académique.
Seulement pour cette raison, il aurait pu traverser son chemin comme un aveugle mais il s'était arrêté quand il avait apperçu sa soeur. Elle ne méritait pas écoper des bavures de son frère.
Après s'être installés, le chauffeur de Constantin les a conduit au village. Le trajet s'est déroulé dans le calme absolu , chacun était focalisé sur son téléphone.
Plus tard, quand ils sont finalement arrivés. Cabrelle l'a remercié et s'est dirigé vers leur cité suivi de près par son frère. À peine entrés, il n'a pu se contenir et toute la colère qu'il ressentait a éclaté de manière incontrôlée.
_ Pourquoi tu cries sur moi ?
Dit-elle d'un air farouche.
_ Que ça soit la toute dernière fois, je ne veux plus que tu contestes mon autorité devant qui que ce soit.
_ Je n'ai rien fait de tel !
_ Ah bon ? C'est vrai ça ?
_ Oui ! Tu es jaloux de ce gars et son ami mais ce n'est pas de leurs fautes si nos parents sont pauvres et les leurs plein aux as ! Tu devrais arrêter d'être aussi con des fois.
Il n'a pas supporté et l'a giflé.
Son coup est parti sans qu'elle ne s'en rende compte. Quand il a posé l'acte, elle l'a fixé d'un air ahuri mais n'a pas réagi.
_ Je ne vais pas te laisser me parler n'importe comment et si j'apprends que tu t'es frottée encore à ces gens, je vais informer les parents..
_ Fais ce que tu veux ! Je t'emmerde.
Elle a pris sa bandoulière et a quitté leur studio juste après. Il est sorti pour la retenir et essayer d'arranger les choses mais il ne l'a apperçu nulle part.