Discussion du jour et de la nuit

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Severus reposa le livre qu'il avait emprunté la veille dans le rayonnage, et chercha des yeux l'authentique ouvrage de Salazar Serpendard: une étude approfondie sur les effets des venins des serpents de marais qui se faisait désirer car il ne la trouvait nulle part sur l'étagère.
Son visage se crispa imperceptiblement lorsque, en se tournant vers la fenêtre donnant sur le parc et sous laquelle étaient rangés des ouvrages plus précieux, il aperçut le reflet de Gilda Marty qui travaillait non loin de lui, assise à une table.
À côté d'elle, ses enfants s'étaient lancés dans un concours de dessin et bien qu'ils soient parfaitement silencieux, ils s'étaient attiré le regard mortel de madame Pince.
Sans savoir pourquoi et même si la scène était floue depuis son poste d'observation, Severus n'osait pas se retourner. En effet depuis l'épisode de la sortie au village moldu, il éprouvait une gêne étrange à côtoyer la jeune femme, et ce bien qu'ils soient parfaitement en bons termes à présent.

Il s'arracha, non sans peine, à ce spectacle pourtant sans grand intérêt, et continua de chercher l'ouvrage qui lui faisait défaut. Mais force fut bientôt d'avouer qu'il ne se trouvait nulle part sur le rayonnage, quelqu'un devait déjà l'avoir emprunté pour un travail.
En maugréant contre les étudiants, le maître des potions sortit du rayon, et s'arrêta un bref instant lorsqu'il croisa le regard de Gilda qu'il salua d'un signe de tête. Salut auquel elle répondit avant de détourner les yeux, offrant ainsi involontairement à la vue du professeur son profil d'une délicatesse et d'une finesse des plus rares.
Le regard de Severus s'attarda un infime instant sur la rangée de cils noirs et fournis de sa collègue.

Comme il sortait de la bibliothèque à pas lents et sans pouvoir oublier cette étrange vision, il aperçut soudain un groupe de trois élèves bien connus, agglutinés dans le couloir...
Weasley fille, Londubat et Lovegood qui semblaient attendre quelque chose avec une certaine appréhension et jetaient de fréquents coups d'œil à l'intérieur.
Intrigué par ce manège, Severus hasarda discrètement un regard par dessus son épaule.

Potter et Weasley, surgis d'on ne sait trop où, s'étaient assis à la table du professeur Marty qui discourait avec eux à voix basse, comme si elle ne voulait surtout pas être entendue et Severus aperçut Hermionne Granger qui semblait faire le guet un peu plus loin.
Ce manège dura moins d'une minute puis les deux élèves prirent congé et s'éclipsèrent discrètement. Le maître des potions lui, s'éloigna en hâte pour rejoindre ses quartiers mais resta soucieux toute la soirée. Il n'était en effet pas difficile de comprendre qu'il se tramait quelque chose de louche avec cette bande là.

Un professeur ne parle pas ainsi à la dérobée avec deux élèves marqués en opposition, et Severus avait acquit une certitude:

Cette idiote de Gilda (et au diable ses jolies pommettes et ses longs cils!) était en train de se fourrer dans un sacré guêpier!

Lorsque deux heure du matin sonna, le maître des potions se décida à sortir dans les couloirs, il remonta vivement jusqu'à l'appartement de la jeune femme et toqua quelques coups secs.

À sa grande surprise, la réponse fut immédiate:
-Qui est là? Demanda Gilda Marty derrière le battant.
-Le professeur Rogue, répliqua Severus.

La porte s'ouvrit et Gilda apparut, vêtue d'une chemise de nuit vert pâle qui lui arrivait au dessus des genoux, pieds nus mais pas le moins du monde endormie.
-Drôle d'heure pour une visite, commenta t-elle à l'adresse de son collègue.
-Et drôle d'heure pour veiller, répondit Rogue sur un ton égal, quelque chose me dit que Morphée ne vous a pas visitée cette nuit. Puis-je entrer quelques minutes? J'ai à vous parler.
-Bien sûr.

Gilda s'effaça devant lui et lui indiqua un fauteuil où s'assoir, puis elle disparut quelques instants dans sa chambre et en revint après avoir enfilé une robe de chambre bleu roi à la fois longue et discrète, mais qui lui seyait à merveille.
-Voulez-vous quelque chose à boire? Demanda t-elle.
-Non merci, je souhaite simplement parler avec vous de quelque chose.

Gilda lui lança un regard à la fois interrogateur et vaguement inquiet, auquel il répondit immédiatement:
-Je vous ai vu parler à Potter et Weasley à la bibliothèque, avec Granger qui surveillaient les environs d'un air assez suspect, et trois autres Gryffondors aux aguets dans le couloir. Je ne connais pas le contenu de cet entretien Gilda, mais je tiens tout de même à vous prévenir: si vous vous impliquez dans la moindre action illégale ce sera le renvoi immédiat par l'inquisitrice, peut-être même pire avec un procès, voire une incarcération...

La jeune femme resta muette et interdite, aussi Severus mit à profit ce silence pour continuer:
-Le professeur Dumbledore vous a fait confiance, ce serait bien mal le remercier que de le mettre dans un tel embarras, sans parler du danger que vous pourriez courir sans la protection de Poudlard. Vous n'êtes pas sans savoir que le seigneur des Ténèbres ainsi que beaucoup d'autres sorciers, le ministère notamment, vous ont dans le collimateur.
-Je sais cela Severus... Mais...... J... Je ne vois absolument pas de quoi vous voulez parler...
-Voyez-vous cela?

Cette femme ne savait vraiment pas mentir.
-Votre faux bégaiement est ridicule à en pleurer Gilda, ajouta Severus, je vous déconseille de l'utiliser si vous espérez être un tant soit peu crédible.

La jeune femme se rembrunit et il continua:
-J'espère que vous réfléchirez à ce que je viens de vous dire, ne prenez pas de risque inutile, surtout pas pour Potter et sa bande car ils n'en valent vraiment pas la peine. Sur ce, bonne nuit Gilda.

Et il se leva du fauteuil pour prendre congé.

Severus et la rose blancheOù les histoires vivent. Découvrez maintenant