Lettre XI, d'Athénaïs à Monsieur.

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Je me désole que tu sois resté en ce château, et je suis plus désolé encore que vous ne soyez parvenu à vous entendre. Louis était furieux et quand il t'as vu partir, il a répliqué comme il le fait toujours, avec plus de fermeté encore en envoyant le Chevalier dans cette sordide prison. Je l'ai supplié de n'en rien faire, d'attendre ta lettre, je savais que tu finirais par lui écrire mais tu as tant tarder et tu connais ton frère, comme il s'agace et a les plus grandes difficultés ensuite pour laisser son cœur s'apaiser.

Mais il a eu les larmes aux yeux en lisant ta lettre. Je suis persuadée qu'il finira par cesser de te punir de la sorte, et je ferais tout pour qu'il te pardonne et cesse de t'infliger ses punitions à travers le Chevalier. Je suis si triste en songeant à toi, au Chevalier, et à mon Roi, vous avez tous le cœur brisé, vous êtes tous trois si malheureux et tout cela pour quoi ? Pour un stupide voyage en Angleterre !

Je fais tous les efforts du monde pour convaincre ton frère de commuer la peine qu'il inflige au Chevalier, pour adoucir ses conditions de détention, pour qu'il soit placé en une autre demeure plus confortable, car il n'a rien d'un ennemi de la France, d'un traitre, qu'il a simplement commis une erreur qu'il doit regretter amèrement à cet instant.

Cependant, cela l'aiderait grandement à se radoucir si tu acceptais de revenir à la Cour. Je t'en supplie, fais ce pas vers ton frère, reviens sans même lui demander quoi que ce soit, reviens à lui et embrasse le, prend-le dans tes bras, montre lui que tu pardonnes cela l'incitera à en faire autant.

Je suis convaincue qu'il te rendrait le Chevalier si tu revenais à la Cour et paraissait en sa présence. Il est si triste de ton absence, si malheureux et surtout inquiet. Il a peur que tu ne reviennes jamais, que tu t'exile pour le punir. Je te supplie de n'en rien faire et de le surprendre en revenant au plus vite, en montrant que tu ne te laisses pas abattre si aisément.

Je te connais, mon ami, mon frère de cœur, tu as l'âme mélancolique, tu laisses tes peines t'affliger, tu souffres mille et un supplice, et laisse ton cœur saigner sans même chercher à cacher ta douleur. Mais tu ne dois agir ainsi en la Cour, cela te met bien trop en danger et profite bien trop à tes ennemis. Montre toi plus fort qu'ils ne le penses. Bats-toi pour le Chevalier, pour qu'il te revienne, pour que vous puissiez encore vous enlacer, vous embrasser.

Je sais que la chaleur de ses bras te manque et que tu ne peux plus souffrir de la présence d'Henriette, alors, pourquoi ne pas revenir et ne pas la laisser partir seule si c'est ce qu'elle souhaite ? Reste ici, avec nous, attendant que le Chevalier te revienne. Je suis convaincue que Louis te le rendra si tu laisses ton épouse partir.

Ton amie.

25 février 1670, Saint Germain

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