– Lâchez-moi !!
– Du calme, je veux seulement vérifier quelque chose.
Il pose la lame sur ma paume qu'il maintient ouverte avec dextérité, tandis que j'essaie d'éloigner sa main de la mienne.
– Arrête un peu de gesticuler, tu pourrais te blesser.
Sentant la pression sur ma peau s'accroître, je le griffe au visage et lui donne un bon coup de pied dans le tibia. Il se stoppe net dans son mouvement, et relève soudainement la tête pour plonger son regard, devenu sévère, dans le mien.
– Par contre, je t'interdis de t'en prendre ainsi à moi.
Je cesse mon agitation, maintenant horrifiée par la peur qui s'insinue dans mon corps. Par réflexe, je recule, essayant de m'enfuir.
– On ne s'enfuit pas non plus, je croyais que tu voulais retrouver ta jumelle ?
A l'évocation de Victoire, je me fige et le toise.
– Ne jouez pas à ça avec moi, dis-je sur le même ton froid qu'il a précédemment employé.
– Oh mais je ne joue pas. Tu veux revoir ta jumelle ? Eh bien moi, je souhaite remporter une petite querelle fraternelle. Alors encore une fois, nos chemins se croisent.
– Vous mentez, vous ne voulez pas m'aider.
Sans m'y attendre, il m'entaille la paume de la main et la presse pour y faire couler mon sang dans un verre maintenant rempli de glaçons fondus. Je fronce les sourcils et tente de me dégager de son emprise, mais il maintient fermement mon poing au-dessus du verre. Lorsque le liquide rouge clapote à la surface de l'eau avant de s'y fondre, le Diable affiche un sourire en coin.
– Bien que je sois le seul à pouvoir faire saigner les Démons, je suis aussi le seul à pouvoir décrypter ce sang. Tu es bien passeuse d'âme, n'est-ce pas ?
– Vous le saviez déjà.
– Bien entendu, répondit-il de son air amusé. Je t'ai vu à l'oeuvre au bar et à l'église. Mais c'était pour le confirmer.
Puis la seconde d'après il éclate de rire et se laisse tomber sur le canapé, lâchant mon poignet au passage. J'avoue ne pas comprendre tout ce qu'il se passe... Ses yeux se perdent dans la contemplation du vide, tandis qu'un sourire grandit sur ses lèvres avant qu'il ne plonge son regard malicieux dans le mien.
– Tu es parfaite.
– Pardon ? dis-je, les sourcils froncés.
– Tu es parfaite. Tu es le plan qu'il me fallait, c'est toi qui vas le rendre fou.
– De qui parlez-vous ?
– De mon frère. Ta mort puis ton retour chez les vivants n'est que le début, je compte bien le pousser à bout.
– De quoi—
– Bon voyage, m'interrompit-il soudainement tout en se relevant brusquement pour poser ses mains sur mes biceps.
Dans la même seconde, ma tête se compresse douloureusement, si bien que je gémis en pressant mes deux paumes sur mes tempes. Je me sens défaillir, mes jambes se dérobant sous mon poids, mais on me repousse dans le canapé au même moment. Je m'effondre sur la surface moelleuse, avant que mes yeux ne se mettent à me brûler. Puis soudain, c'est l'implosion, et plus rien. Mais quand je vous dit rien, c'est rien. Le vide, le noir absolu, le néant. Pas une sensation, pas un bruit, pas une odeur, pas une vibration, rien. Plongée dans ma propre angoisse, je tente d'émerger de ce trou noir. Mais rien ne se passe puisque je me situe dans le vide, ou peut-être suis-je le vide ? Je me retrouve entièrement seule, à entendre mes propres pensées, prise d'angoisses indomptées et d'une mélancolie morose. Je contemple le vide autour de moi, ce noir pur et pourtant si peu vibrant, je me contemple. C'est alors qu'une voix très lointaine perce ce triste lieu. Elle n'est pas audible, mais elle semble faire trembler les murs. Puis je suis brusquement attirée à mon corps, littéralement.
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De l'Autre Côté
Paranormal« Vous connaissez l'expression « être une grenouille de bénitier » ? Eh bien je peux vous assurer que tous les membres de ma famille sont des batraciens. Par là j'entends : croix en folie et messes à gogo. Ma famille est si religieuse que Satan lui...