Aussitôt arrivée à quelques mètres du café où Anaïs m'attend déjà, mon amie se lève de la table et se précipite vers moi. Ses cheveux acajou s'échappent de son chignon, ses lunettes de vue glissent de son nez, et elle manque de se tordre la cheville entre les pavés du centre-ville, mais malgré cela, elle court vers moi comme une dératée. Puis elle me saute au cou afin de me serrer fort contre elle, quitte à m'étouffer. Bonjour la délicatesse... Un jour elle me plaquera au sol tel un rugbyman et je vais avoir une commotion cérébrale, moi je vous le dis.
- Angèle !
Sans rien ajouter, elle se recule et m'attrape par le poignet pour m'entraîner, ou plutôt me tirer, à grandes enjambées vers le café. Une commotion cérébrale, à ne pas en douter...
Elle m'intime de m'asseoir, avant de faire de même sans me lâcher du regard. Je lui souris de travers, pas très sûre de savoir comment réagir face à son comportement. Néanmoins, je ne dis rien, elle non plus d'ailleurs. Anaïs garde le silence, tête baissée, attendant de voir passer un Ange. Que lui arrive-t-il ? Est-ce à cause de notre soirée de la dernière fois ? Il s'est passé quelque chose avec ses parents ? Elle a des problèmes ? Et si elle était devenue dépendante ?
Et alors que j'allais l'assaillir de mes inquiétudes, le serveur nous amène deux chocolats chauds couverts de chantilly; mon point faible.
- Ana— commençai-je avant de m'interrompre.
Anaïs relève brusquement la tête, plongeant ses yeux injectés de sang dans les miens. Et si elle est vraiment devenue accro ?! Qu'est-ce que je dois faire ? J'ai déjà rencontré un psychopathe, manqué de me faire tuer par celui-ci, et maintenant je dois gérer mon amie dépendante à la drogue ? Il serait temps que ma vie se calme un peu et arrête de faire des folies.
- Gabriel m'a dit pour Victoire, déclara-t-elle de but en blanc.
Ah, je ne m'attendais pas à ça.
- Je sais que c'est nul comme phrase et que tout le monde a dû te le dire mais... je suis désolée. Si tu as besoin de quelqu'un tu peux compter sur moi, je ne te lâcherai pas.
- Merci, Anaïs. Par contre, comment Gabriel a-t-il pu te le dire ? demandai-je, les sourcils froncés.
- Je l'ai croisé hier soir en rentrant chez moi, il en a alors profité pour faire le trajet jusqu'à mon appart, et il m'a parlé de... Victoire.
Eh bien, Gabriel est un parfait gentleman, un gentleman qui tombe toujours pile au bon moment...
- En parlant de Victoire, j'ai un plan.
Mon amie me regarde bizarrement. En même temps je la comprends, je suis en train de lui annoncer que j'ai un plan pour une personne supposée morte, il y a de quoi m'envoyer voir un psy. Toutefois, j'arrive à attiser sa curiosité en me penchant par-dessus mon chocolat chaud dont je commence à entamer la chantilly.
- Je sais qu'elle n'est pas morte morte, affirmai-je avec conviction.
- C'est-à-dire... ?
- Être passeuse d'âmes m'a apporté des réponses que beaucoup se posent, notamment celle de la vie après la mort. Car oui, il y en a une. Toute cette effervescence autour du Paradis et de l'Enfer n'est pas là en vain, ces lieux existent véritablement, j'en suis sûre et certaine.
Mon amie boit une grande gorgée de son chocolat chaud, comme pour assimiler mes propos. Bien qu'Anaïs soit aussi croyante, les notions de Paradis et d'Enfer peuvent sembler abstraites. Car après tout, il y a toujours une part de doute puisque personne n'a jamais vraiment vu ces lieux ou en est revenu, mais... la croyance est quelque chose de très fort, plus fort que le doute.
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De l'Autre Côté
Paranormal« Vous connaissez l'expression « être une grenouille de bénitier » ? Eh bien je peux vous assurer que tous les membres de ma famille sont des batraciens. Par là j'entends : croix en folie et messes à gogo. Ma famille est si religieuse que Satan lui...