Avec vigueur, on me fait visiter les couloirs décorés de marbre et de lustres en cristal. Vous trouvez ça trop ? Eh bien moi aussi, alors mieux vaut ne pas parler des tableaux à l'huile, des sculptures en bronze, des canapés de velours et du ballet d'employés. Enfin... le terme « employés » n'est peut-être pas judicieux, « personnes réquisitionnées sous peine de subir un éternel châtiment » me semble plus adapté. Car voyez-vous, je ne pense pas que servir des Démons ingrats et nettoyer derrière ceux-ci soit la première activité que l'on souhaite faire en arrivant en Enfer. Toutefois, c'est bien le genre de la maison.
Avec hostilité, je fusille le dos de la veste sur-mesure que porte Alastor. Depuis que nous traversons les couloirs infinis de ma mort, ni mon geôlier ni mon exécuteur n'ont pipé mot. C'est donc sans espoir que je prends de nouveau la parole :
- On est encore loin ?
Aucune réponse, l'ambiance est à son beau fixe.
- Arrêtez de vous rendre plus bêtes que vous ne l'êtes déjà.
- Et toi, cesse tes jérémiades ou le temps te paraitra infini.
- Who enfin des mots, j'en suis aussi ébahie qu'avec les premiers mots d'un bébé. Mais dis-moi Biquette—
- Ne m'appelle pas ainsi, m'interrompit le principal concerné avec tant de crispation que j'entends presque ses dents grincer.
- Pourquoi tu n'es pas resté avec tes fidèles, continuai-je en faisant fi de son intervention. Ce gala est tout de même en ton honneur, bien qu'organisé par ta propre personne, mais ne nous arrêtons pas sur les détails. T'enfuir comme ça d'un gala de charité ce n'est pas très... charitable.
- Apaise ta conscience, miss, je fais de la charité. Ne le vois-tu pas ? Pourtant, je suis en train d'accompagner une jeune femme qui ne cesse de se plaindre, et ce, sans jamais me plaindre en retour. As-tu déjà vu plus charitable ?
Le type qui m'escorte depuis le début et qui n'a pas ouvert la bouche laisse un petit rire lui échapper. Je ne relève pas, me contentant de plisser les yeux. Notre guide jette un furtif coup d'oeil par-dessus son épaule et je parviens à capter son sourire amusé. Je vais le faire bouillir dans un chaudron, ce type commence vraiment à me sortir par les trous de nez.
Finalement, après encore quelques mètres interminables, nous nous arrêtons devant une porte des plus banales. Alastor passe une carte magnétique sur le boîtier, un « bip » résonne, puis il pousse le battant et entre. Les lumières s'allument, augmentant progressivement en intensité avant de baigner la pièce dans une couleur orangée. Dans cette pièce, rien de très spécial, seulement deux canapés en cuir foncé et une table basse en verre. D'ailleurs, depuis que je suis ici je ne crois pas avoir vu quelque chose d'aussi épuré.
- Je t'en prie assieds-toi, me proposa galamment le Diable en m'indiquant un des canapés.
- Oh mais après vous, mon cher.
Sur ce et à ma plus grande surprise, il s'assoit sur l'un des canapés. Aussitôt, un serveur entre pour prendre la commande puis repart comme si je n'étais pas retenue en otage.
- Pas d'entourloupes ou alors tout espoir sera perdu pour toi, déclara mon geôlier qui me lâche enfin les poignets.
Je masse mes articulations avant d'examiner la situation. Deux canapés, une table, une porte, deux types dont un qui m'a à l'oeil, et aucun objet pouvant faire office d'arme.
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De l'Autre Côté
Paranormal« Vous connaissez l'expression « être une grenouille de bénitier » ? Eh bien je peux vous assurer que tous les membres de ma famille sont des batraciens. Par là j'entends : croix en folie et messes à gogo. Ma famille est si religieuse que Satan lui...