Chapitre 17: La détermination pour seul obstacle

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J'ouvre si fort la porte d'entrée que je manque de la faire sortir de ses gonds et de briser la tête de mes parents au plafond tant ils sursautent. Je la referme tout aussi brusquement et m'appuie contre le battant, tandis que deux paires d'yeux me dévisagent.

- Que se passe-t-il, ma chérie ? m'interrogea ma mère avec inquiétude.

- Je... Je vais me doucher, tout va bien.

Sur ce, je tente un sourire et me diriger vers les escaliers pour les grimper sous le regard perplexe de mes parents.

- Oui, tout va bien, je vais bien. Et je vais me doucher parce que tout va bien. Oui, ça va.

J'ouvre la porte de la salle de bain et m'y engouffre, mon coeur cognant contre ma poitrine. Je m'assois sur le rebord de la baignoire et sors la croix de ma poche d'une main un peu tremblante. Je la place devant moi afin de la contempler. C'est elle, il n'y a pas de doute, la branche verticale est légèrement pliée; séquelle de mon inattention passée (pardon maman, pardon papa). Donc là, je n'ai plus que deux solutions: panique ou me reprendre. Ce mec a tué madame zombie devant mes yeux ! Avec une arme blanche !! Et madame zombie a essayé de me tuer ! Est-ce que ça vous arrive souvent ? Parce que personnellement ça ne m'était jamais arrivé, et j'aurais bien aimé que ça ne m'arrive jamais ! Non mais sérieux, je viens d'assister à un meurtre ! Qu'est-ce que je suis censée faire ?! Le dire à la police ? Ne rien faire ? Ils trouveront bien le corps. Et s'ils trouvaient mon ADN sur la scène de crime !! Je serais le coupable parfait !! La petite jeune dans une famille trop religieuse qui en aurait eu marre et qui aurait succombé à ses pulsions. Je ferais les gros titres ! C'est une catastrophe !! Moi je voulais juste sauver ma soeur, pas avoir un procès aux fesses pour meurtre à l'arme blanche ! Ohlala, qu'est-ce qu'il faut que je fasse ? Surement pas me doucher ce soir, je ne veux pas me sentir vulnérable une seconde de plus. Car on le sait tous, si un psychopathe entre chez nous alors que nous nous douchons nous ne pouvons absolument rien faire si ce n'est prier tous les Dieux pour ne plus nous retrouver complètement nus. Et comme on a pu le constater, j'ai plutôt une tendance à attirer les psychopathes ce soir, alors autant limiter les risques.

Je décide donc de simplement me mouiller le visage avant de me mettre en pyjama.

~~~~~†~~~~~

Le lendemain, je descends les marches d'un pas lourd. Ma nuit n'était pas des plus reposantes... En même temps on ne rêve pas de l'Eden lorsqu'on a assisté à un meurtre quelques heures plus tôt. Malgré tout, je suis déterminée, et ce ne sont pas quelques cauchemars qui vont m'arrêter.

Dans la cuisine, mes parents prennent leur petit déjeuner. Parfait, il est temps que je leur fasse part de mes révélations. Je m'assois en bout de table et commence à étaler de la confiture de fraises sur un bout de pain. Je vous ai déjà dit que j'adore la confiture de fraises ? Non mais parce que c'est vraiment la meilleure des confitures. Après je ne suis pas difficile niveau confitures, je les aime toutes. Toutes sauf celle à la rhubarbe.

- Bon, j'ai pris une décision.

Mes parents m'interrogent du regard, le chagrin rougissant encore leurs yeux.

- Je vais ramener Victoire. Je sais qu'elle n'est pas morte comme on l'entend. Être passeuse d'âme m'a affirmé de nombreuses choses, et la vie après la mort en fait partie.

Au fur et à mesure que je parle, mes parents blanchissent, faisant encore plus ressortir leurs cernes et leurs yeux injectés de sang.

- Je sais que je peux la retrouver, il faut juste que je trouve un moyen d'aller où elle se trouve. Nous connaissons le concept de Paradis et d'Enfer, eh bien moi je dis qu'il n'est pas là en vain. Et en mettant tout ensemble, Victoire doit se trouver au Paradis. Il possible d'y entrer, alors il est aussi possible d'en sortir. Une porte ça s'emprunte dans les deux sens, qu'on le veuille ou non, il suffit juste de la trouver.

- Angèle... commença mon père. Dieu n'acceptera jamais une telle chose, et ce, malgré ta volonté.

- Victoire ne mérite pas ce qu'il lui arrive, elle avait une vie et des rêves à accomplir. Je refuse qu'elle meure sans les accomplir ! Le Paradis ne peut pas tout combler.

- Nous pleurons et regrettons la mort de Victoire, ajouta-t-il, mais Dieu avait besoin d'elle.

Je me lève d'un bond, manquant de renverser ma chaise, et tape le plat de mes mains sur la table en bois.

- Nous aussi nous avons besoin d'elle !

- Angèle... répéta mon père.

Ma mère jusque-là silencieuse prend timidement la parole, serrant son pendentif en croix dans sa main.

- S'il te plait, Angèle, ne va pas chercher ta jumelle. J'admire ta détermination, mais tu commettrais une terrible erreur. Dieu... ne pourra pas te protéger dans ce lieu. Ta soeur... n'est plus que protégée par elle-même, déclara-t-elle avant de s'interrompre pour baisser la tête. C'est à cause de moi, j'ai commis une erreur.

De l'Autre CôtéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant