Chapitre 25

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Une fois seule dans la petite pièce, je fermais le couvercle des WC puis m'assis dessus, me tenant la tête dans les mains. Réfléchissant à la situation je me dis une nouvelle fois que je m'étais trop laissée emporter par les taquineries d'Adeline et je me demandais aussi ce que voulais dire le sourire de Ludivine. C'est vrai qu' Élodie aimait me coller, je ne trouvais pas ça désagréable non plus mais merde on parlait là d'une gamine de onze ans ! Elle ne les faisait pas, c'est clair, elle savait faire preuve d'une maturité d'esprit et de taquinerie dignes de celles d'un adulte et pour parfaire le tout, elle était grande et avait de plus gros seins que moi. Non mais c'était quoi cette fille ? Comment étais-je supposée la regarder en face toute la soirée ? Je me dis que j'aurais du faire des demandes d'emploi dans d'autres collèges, si j'avais fait mes cartons, je ne l'aurais probablement jamais rencontrée. Ce n'étais pas sûr, tôt ou tard, on aurait fait une soirée comme celle-ci ici et je serais retombée dessus donc... Mettons ça de côté. Pour le moment il y avait cette fille, mature, grande, jolie, aguichante, et sa famille qui ne voyait rien de mal à ce qu'elle fréquente sa professeure de dix ans son ainée. Déjà là il y avait un problème dans l'énoncé. Je savais qu'Adeline était délurée, assez pour accepter ça mais à voir ça ne dérangeait pas Ludivine non plus, quant à Marie, elle nous croyait déjà ensemble. Si jamais cela venait à se concrétiser, j'aurais une belle-famille de dingues. Je pense aussi que mon papa ferait un arrêt cardiaque si je venais à lui présenter Élodie... ''Voici ma nouvelle petite amie, elle a douze ans et c'est mon élève de sixième.. On appelle le SAMU maintenant pour réserver ?'' Je ris seule, rire qui résonna dans la petite pièce et qui me parut bien sombre à mes oreilles. J'étais dans la merde je pensais alors. Il fallait trouver un échappatoire mais je ne pouvais plus compter sur Julie, moi et ma grande bouche ! Une nouvelle petite-amie ? Élodie pourrait se sentir trahie, mauvaise idée. Dire que je voulais rester seule un moment ? Même Adeline n'y croyait pas, mauvais plan. Et puis la sortie d'aujourd'hui, j'ai pas voulu me la jouer mais ça avait tout l'air d'un rencard en y réfléchissant, il y eut même le petit cadeau à la fin, qu'est-ce qui m'étais passé par la tête bon sang !

''Quand le vin est tiré, il faut le boire ma fille.''

Alors que ce dicton de mon père résonnait dans ma tête, je n'avais qu'une envie, celle de lui dire de fermer da gueule. Je me dis qu'il allait aussi falloir que je sorte des toilettes, je ne pouvais pas monopoliser l'endroit. Je me levais alors que justement on toquait à la port, je tirais la petite chasse pour faire genre et me lavais les mains au petit lavabo qui se trouvait là. En sortant je tombais nez à nez avec Élodie.

« Claire, on peut se parler deux minutes ?

- Oui, dis-je la voix tremblante. Tu veux qu'on soit seules ?

- Oui, viens. »

Elle me prit par le poignet et me tira vers les escaliers, j'avais enlever mes chaussures en entrant dans la maison, sur le petit tapis qui faisait face à la sortie de derrière donc nous pûmes monter sans soucis. Elle ouvrit la porte de sa chambre, me fit entrer et referma derrière elle. Je restais debout au milieu de la pièce, ne sachant pas quoi faire.

« Viens t'asseoir. Je sais pas si ça va être long mais ne reste pas debout.

- OK. »

Nous nous regardâmes un moment, en silence, je pus confirmer qu'elle était vraiment très jolie. L'alcool et mes réflexions stériles commençaient à me donner mal au crâne, je ne savais réellement pas ce que je foutais là.

« Maman Adé a dit que t'avais l'air un peu pommée quand t'es partie, c'est vrai ?

- Il s'est passé beaucoup trop de chose aujourd'hui pour mon petit cerveau, j'ai du mal à tout assimiler, oui.

- Puis Marie et elle qui te mettent la pression ça n'aide pas.

- C'est clair.

- Tu peux me laisser parler jusqu'au bout ? »

Elle me prit la main tandis que j'acquiesçais.

« D'accord. Je vais être franche Claire, je t'aime. Pas comme j'aime mes mamans ou ma sœur, quand je suis avec toi mon cœur bat si fort que j'en ai mal. Je t'ai trouvée jolie quand je t'ai vu sur les photos de mam Adé, je t'ai trouvée intéressante hier quand on a passé du temps ensemble, je t'ai trouvée charmante aujourd'hui alors que tu étais aux petits soins pour moi, je t'ai trouvée douce quand on était allongées chez toi. J'aime pas te voir boire ou fumer mais je veux pas dicter ta vie, je suis pas Julie ou l'une de tes ex, peu importe laquelle. Je suis encore une petite fille, je sais bien, peut-être que tu me vois qu'uniquement comme ton élève, peut-être que non et j'en serais heureuse mais je voulais que tu saches ce que moi je ressens pour toi. Je t'oblige pas à me dire pareil, je n'attends rien pour le moment, je veux juste continuer d'être proche de toi et qui sais, un jour je serais peut-être la fille la plus proche de toi, assez proche pour que tu m'ouvres ton cœur. Pour le moment je suis juste une gamine à tes yeux mais si jamais tu me voyais comme une fille avec qui tu aimerais être, passer du temps, et voir même embrasser comme maman l'a fait tout à l'heure, j'en serais vraiment heureuse. Maintenant je vais redescendre, tu peux rester ici le temps de réfléchir à tout ça, ou tu peux descendre et te souler, je ne te dirais rien pour ce soir. »

Elle me lâcha la main, les yeux humides puis se leva en direction de la porte, ce fut à mon tour de la saisir par la main et tirant légèrement dessus, je la fis se rasseoir sur le bord du lit.

« C'est vrai, dis-je, je ne sais pas où j'en suis, c'est vrai que les blagues lourdes d'Adeline m'ont pris la tête, c'est vrai que tu n'as que onze ans et que l'on ne devrait avoir qu'une relation professeur-élève. Tout ça est vrai. Malgré tout, ce que j'ai fait avec toi aujourd'hui, je l'ai fait par plaisir, j'ai apprécié chaque instant passé avec toi au point où même moi je ne sais plus ce que je dois faire. Tu dis m'aimer, je suis certaine que tes sentiments sont réels et que toi aussi tu as dû réfléchir pas mal à tout ça avant de me dire quoi que ce soit. Je ne dirais pas que je t'aime, mais j'apprécie passer du temps avec toi moi aussi, tu es une jolie fille mature et franche, mais ton âge pose un sérieux problème, le fait que je sois ta professeure aussi, on a dix ans d'écart !

- Hier, tu disais que dix ans c'était pas grave. Et tu serais plus sûre de toi si j'étais dans une autre classe et que je ne t'avais pas comme prof ?

- Je sais pas. Et oui dix ans c'est pas la mer à boire mais dans notre situation, c'est grand. Personnellement je ne me vois pas dire à mes parents que je suis avec une fille de douze ans, ils vont appeler les flics direct. Au yeux du monde, notre relation serait taboue.

- Tu es du mois de juin, moi de janvier donc on a pas dix ans d'écart mais neuf ans et cinq mois.

- Cela ne change pas grand-chose. Il n'y a bien que cette débile d'Adeline qui ne bronche pas quand sa fille de onze ans lui dit être amoureuse d'une femme de vingt-et-un. Ce qui m'étonne c'est que Ludi ne dise rien, je la croyais plus censée.

- Mam Ludi connait mon histoire au foyer et en famille d'accueil donc elle ne dira rien ''tant que je garde le sourire'' c'est ce qu'elle m'a dit hier soir.

- Elle est si sombre que ça cette histoire ?

- J'ai pas envie d'en parler, pas envie que tu me prenne en pitié. Si on viendrait à être vraiment ensemble, je te dirai tout. Mais pas avant.

- Voilà encore une fois que tu fais preuve d'une maturité qui rivalise avec une femme adulte et c'est ce que j'adore le plus chez toi Élo.

- Je sais que t'aime pas mon côté gamine.

- Non, il est mignon aussi, dans une certaine mesure, ça me rassure que tu sois parfois une gamine.

- Mais là, j'ai envie d'être adulte. »

Elle se leva, se pencha sur moi et posa ses lèvres sur les miennes. Cela ne dura qu'un instant puis elle quitta la chambre sans dire un mot, je la suivis et la rattrapais en bas des escalier.

« On ne parlera de ça à personne, ne t'en fais pas.

- Je ne suis pas inquiète. »

Elle me prit la main et nos doigts s'entrelacèrent tandis que nous rejoignîmes le jardin. 

AMOUR INTERDITOù les histoires vivent. Découvrez maintenant