Chapitre 10

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Mon après-midi commença avec la classe la plus disciplinée que j'eus jusque-là. Calme et silencieuse, prenant leurs affaires sans faire de remue-ménage, j'eus un peu de mal à rester concentrée. J'eus une idée pour cette classe : Garder la demi-feuille vierge de celle de la présentation pour un peu plus tard et sur cette dernière, ils écrivirent leur nom, prénom évidemment mais aussi leur genre de lecture préférée et de me citer quelques œuvres qu'ils avaient lu, ou qui leur avaient plu. Aussi bien que pendant la présentation que durant ce petit exercice, le silence total régnait. Une fois tout cela fait, je ne savais pas trop quoi faire avec eux alors qu'il restait encore une demi-heure avant la fin, je décidais d'essayer de savoir pourquoi ils étaient aussi silencieux, y-avait-il un problème dans leur classe ? Une fille aux cheveux auburn leva la main, je fus étonnée mais la laissa parler.

« Il n'y a pas de soucis entre nous, Mademoiselle, mais nous savons tous que la classe est un lieu d'étude donc nous évitons de la perturber. On a pris l'habitude l'an dernier d'écrire sur un papier si on a quelque chose à demander au voisin, c'est moins dérangeant que de chuchoter. »

J'applaudis de manière sincère en leur disant que j'avais eu une classe de quatrième survoltée ce matin et un garçon au cheveux noir devina tout de suite de quelle classe je parlais. Un autre garçon à la coupe un peu plus longue leva la main et me demanda s'ils pouvaient venir me voir s'ils avaient des soucis avec les cours.

« Bien sûr, répondis-je. Tant que ça ne concerne pas vos vies affectives ou les maths vous pouvez venir me voir, je ne quitte que rarement ma salle. »

Il eurent l'air satisfaits de ma réponse et rirent lorsque j'avais évoqué leurs histoires de cœur, c'étaient des adolescents après tout, la mienne ne datait pas d'il y a si longtemps. Je les sentais un peu plus détendus, nous fîmes un rapide tour de table pour voir un peu qui avait quel problème dans quelle matière, je fus étonnée de voir que pour les filles ça concernait plutôt le sport, et je les comprenais, alors que chez les garçons se fut les arts plastiques qui dominèrent. Ainsi l'heure passa et, comme ils étaient entrés, les élèves sortir dans le calme, je fus vraiment impressionnée par cette classe. Je savais que j'avais une classe de sixième ensuite mais ne savais plus laquelle et mon emploi du temps se trouvait dans le sac de mon ordi dans la voiture. Je buvais un peu de yaourt quand la porte s'ouvrit, pas besoin de me retourner pour savoir qui était là. Mon téléphone affichait trois messages non-lus, il allait falloir que je lui fasse la leçon sur l'usage du téléphone en cours me dis-je. Je pris les cinq sachets de confiseries et en entendant le bruit de plastique, Élodie vient voir ce que c'était par-dessus mon épaule.

« Oh, j'en veux !

- Au conditionnel s'il te plaît ?

- Heu... Moi vouloir ça ? »

Elle rit en s'éloignant, je donnais donc les barres au chocolat à toutes sauf elle, elle me regarda étonnée.

« Réponds-moi.

- De quoi ?

- Vouloir au conditionnel présent ?

- T'es, vous êtes sérieuse ?

- Très ! »

Je me dis que cette conjugaison était peut-être un peu trop difficile pour elle alors lui donnais la réponse, son regard s'éclaira et répéta.

« J'en voudrais s'il vous plaît Mademoiselle.

- Oui ! C'est beaucoup mieux.

- Pff ! On bosse même pendant les pause avec vous Mademoiselle.

- Non il n'y a qu'Élodie qui a ce traitement de faveur.

- Vous parlez d'une faveur, se plaint cette dernière la bouche pleine, vous êtes toujours en mode prof de Français. »

Elle m'avait aussi brièvement tutoyée, ça, les messages et sa façon de manger, j'en connaissais une pour qui le voyage de retour n'allait pas être une partie de plaisir. Bizarrement je ne vis pas leurs sacs, d'ordinaire, elles les posaient sur la première table, près de la porte pour s'en saisir dès qu'il serait l'heure mais ne relevais pas plus que ça. Je rangeais les demi-feuilles des troisième dans une pochette et me préparait mentalement pour ma prochaine session de deux heures avec une classe de sixième encore inconnue. Alors que la pause se terminait, pas une d'elles ne bougeaient.

« Aller, leur dis-je, il faut aller en cours.

- On a cours ici, dit Élodie. C'est pour ça qu'on a mis nos sacs là-bas. »

Je les vus effectivement, posés sur les chaises de deux tables, l'une derrière l'autre, je lâchais un soupir en me disant que j'allais encore avoir un cours animé.

« Bon, allez dans le couloir alors.

- Hein, c'est obligé ?

- Bien sûr que oui ! »

Je n'étais pas habituée à entendre Marine râler, j'en fus étonnée même, mais après que j'eus machinalement rouspété. De ce que je pouvais en voir pour le moment, cette classe n'étais pas tant surexcitée. Je les fis entrer et ils se placèrent, certains furent surpris de voir qu'il y avait déjà des sacs mais pas un n'en souffla mot. Comme toujours, nous commençâmes par la demi-feuille de présentation et je repris l'idée de la classe de ce matin, à savoir l'un coupe une feuille en deux et donne l'autre moitié à son voisin. Alors que je parlais sur le côté de mon bureau, je sentais peser sur moi un regard persistant, pas besoin d'être savant pour savoir de qui ce regard émanait. Après la présentation, nous commençâmes directement le cours et tout se passa pour le mieux, les élèves étaient concentrés, pour l'une même très concentrée. Ils répondaient aussi assez correctement dans l'ensemble et ne bavardait pas trop. J'en profitais moi aussi pour voir l'attitude d'Élodie et de ses amies, elles semblaient être de bonne élèves assez consciencieuses si on omettait la façon qu'avait Élodie de me fixer sauf lorsqu'elle écrivait. Une sonnerie se fit entendre, pensant qu'il s'agissait de la première, je continuais mon cours quand la grande blonde leva la main.

« Mademoiselle, la journée est finie.

- Ah, oui, remarquais-je en consultant ma montre. Désolée, vous pouvez y aller. Bonne soirée et faites attention à vous en rentrant. »

Un foule de bonne soirée Mademoiselle me répondis, je me dis qu'il était agréable d'avoir ce genre de classe jusqu'au point d'en oublier le temps. En effaçant le tableau je vis les filles discuter entre elles puis les trois partir en me souhaitant bonne soirée, il ne restait dans la salle que la blonde et moi.

AMOUR INTERDITOù les histoires vivent. Découvrez maintenant