Chapitre 62

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 Depuis l'arrivée de sa famille Élodie se comportait avec moi comme elle le faisait toujours, plus aucune trace de la tronche qu'elle me tirait depuis ce matin et toujours aussi collée à moi. J'eus un peu de mal à la suivre au début mais lorsque j'apportais le café pour tout le monde, tout semblait avoir été résolu. En descendant de ma voiture sur le parking de l'hypermarché, elle m'agrippa par le bras, elle n'avait visiblement pas retenu la leçon de la semaine dernière mais je ne pouvais me permettre de la juger, moi non plus je n'avais rien retenu car je la laissais faire et c'est ainsi que nous rejoignîmes Adeline, Ludivine et Marie bras dessus, dessous. Nous ne vîmes heureusement personne le temps que nous faisions nos courses, ni à la caisse et encore moins sur le parking où nous nous séparions des trois filles pour regagner ma voiture. Quand nous fûmes de retour chez moi, Marie me demanda timidement si j'avais un animé cool à lui conseiller, d'après elle, elle aimait les comédies romantiques et les tranches de vie, je décidais de lui mettre 'Uchi no Kaisha no Chiisai Senpai no Hanashi', une comédie sympathique et tous publics sur une petite cheffe et un grand employé. Toute la famille regarda le premier épisode et il y eu quelques éclats de rire qui me firent plaisir, toute sauf Élodie qui tenait absolument à m'aider en cuisine. C'était vraiment le jour et la nuit comparé au moment où elle s'était levée ce matin. Étant normalement barmaid, je laissais faire Adeline pour le service des boissons, et surtout, il s'agissait de sa bouteille. Alors qu'elle arrosait copieusement nos verres de liquide brun alcoolisé, j'entendis, dans mon sac à main, mon téléphone sonner, je chargeais Élodie de répondre.

« Elle agit déjà comme ta petite femme, ricana Adeline.

- Allo ? ... Oui, c'est bien moi, Mademoiselle Dumur... Ah, bien, nous allons passer le chercher dans ce cas... Oui à tout de suite, merci. »

Je souriais en l'entendant s'appeler par mon nom et acquiesçais auprès de mon amie.

« C'était la boucherie, me dit Élodie, la commande est prête, on peut aller la chercher.

- Ok, je me lave les mains et j'y vais en vitesse.

- Je viens ?

- Non, fit Adeline, en bonne maitresse de maison, tu t'occupes de tes invités. Je vais y aller avec Claire.

- Pas besoin d'être cent dix pour chercher un rosbeef, et une tarte en passant.

- Allez, fais pas ta timide, je viens. »

Je partis donc faire les deux dernières courses avec Adeline tout en me demandant pourquoi elle avait autant insister pour venir, elle devait sûrement avoir quelque chose à me demander ou à me dire. Elle me taxa une cigarette à peine assise dans la voiture, il allait aussi falloir passer au tabac.

« Tu pourrais avoir tes clopes parfois hein.

- Ludi veut pas que j'en achète sinon je fume comme une folle.

- Donc tu préfères fumer comme une folle sur mon compte.

- Je t'en payerai un si on voit un tabac.

- Il faut que je refasse le plein de toute façon.

- Je pensais voir Élo déprimée ou énervée quand on est arrivées ce matin.

- C'était le cas jusqu'à ce que vous arriviez mais elle s'est reprise en vous voyant. Tant mieux car je ne me voyais pas faire le tour d'Auchan avec elle faisant la gueule.

- Donc elle faisait bien la gueule. Tu lui as dit de quoi on a parlé hier ?

- Oui.

- Je comprends pourquoi elle boudait alors.

- Ah, non, rien à voir.

- Pourquoi elle tirait la tronche alors ?

- Parce qu'on a pas fait de câlin ce matin. »

Adeline explosa de rire au point de s'étouffer.

« T'es méchante Clairinette, t'aurais pu baiser un p'tit coup vite fait !

- De un, appelle pas ça 'baiser' et de deux, on ne fait pas ça vite fait, on fait ça bien ou rien.

- Ouais parce que t'as jamais eu de gamine qui se réveille pendant... Profitez de votre petite vie tranquille toutes les deux tant que vous le pouvez, les enfants c'est cool hein, mais ça change un couple.

- Même si il y avait des enfants à la maison je ne ferais pas ça 'vite fait' !

- On croirait Ludi. Au début, elle disait ça aussi donc on ne faisait rien à cause de Marie, pis un jour elle en a eu marre, maintenant on le fait dès qu'on peut. Bref, assez parler de cul. Comment elle a réagit quand tu lui as dit ?

- Comment à ton avis ? Avec une soudaine envie de t'étrangler. J'ai réussi à la calmer.

- Avec un 'câlin' ?

- Oui. On y est. »

Nous étions dans le centre-ville, ici, malgré le stationnement payant, nous pouvions laisser la voiture et tout faire à pied rapidement, un aspect plutôt pratique vu que nous étions pressées. Nous commençâmes par le moins encombrant, le tabac, je refis le plein de cigarettes, celui-ci n'avait pas de magazines, puis allâmes à la boulangerie où Adeline acheta les desserts, sans que je ne lui demande quoi que ce soit et nous finîmes par la boucherie, où un beau rosbeef de deux livres m'attendait. Une fois le bébé récupéré nous rentrâmes dans le calme cette fois. Chez moi par contre, c'était Bagdad, Marie et Ludivine semblaient se disputer et Élodie peinait à les calmer. Adeline, elle réussit en deux secondes en les menaçant de les envoyer au lit sans manger comme des enfants, ce qui me fait rire mentalement et sourire physiquement. Dans la cuisine Élodie m'apprit qu'elle n'avait pas l'habitude de les voir se comporter ainsi, d'ordinaire elles étaient du genre calme et silencieuse. Je n'en doutais pas pour la Femme de glace mais j'avais un peu de mal à imaginer Marie calme et silencieuse, à moins qu'elle ne soit absente. Tout en préparant la viande, je regardais les mains d' Élodie s'activer sur mon ouvre-boite et vis qu'elles étaient légèrement plus petites que les miennes, les ongles étaient bien taillés, elle semblait en prendre soin, pas étonnant qu'elle soient si douces quand elles se saisissaient des miennes.

« Chérie ?

- Ah, oui , pardon. Tu disais ?

- Je fais quoi du thon égoutté ?

- Faut le mélangé à la mayo que j'ai faite mais prends pas tout on en aura encore besoin.

- Voir Élodie cuisiner c'est un rêve, dit Ludivine. J'ai essayer de l'initier mais en vain. Marie m'aide pas mal mais pour Élo, rien à faire, elle soupire, ronchonne et finit par me laisser en plan.

- Cuisiner avec maman ou sa chérie, ajouta Adeline, le choix est vite fait. Passe ton gobelet Clairinette.

- Oui, doucement avec les verres hein.

- Vous pouvez vous taire, j'écoute l'animé ! »

En entendant Marie parler d'animé je me dis que jamais ma maison n'avait été autant animé qu'aujourd'hui, mon style de vie était en train de changer et c'est entièrement à une fille de douze ans, mon élève de surcroit que je le devais. 

AMOUR INTERDITOù les histoires vivent. Découvrez maintenant