Chapitre 40

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Ludivine revient en portant les couverts pour tout le monde, je lui proposai mon aide qu'elle refusa directement en disant que Marie allait l'aider. Cette dernière se leva en soupirant et dit qu'il ne fallait pas déranger les amoureuses dans leur bulle, ce qui fit rire Élodie.

« T'as vu, me murmura cette dernière, c'est nous les amoureuses.

- Je l'ai surtout entendu, oui.

- Ah, tu chipotes sur tout hein.

- Je suis professeure de Français, je n'ai pas la capacité de ''voir'' les paroles.

- Chut Mademoiselle, tais-toi un peu. »

Elle posa ses lèvres sur les miennes, et resta ainsi jusqu'à ce que les filles reviennent. Apparemment Adeline ne nous avait même pas remarqué, elle se concentrait sur la cuisson des saucisses et des brochettes. Ludivine posa une bouteille de vin fraîche devant moi en me disant de gérer, je fus donc désignée responsable du rosé. Élodie me murmura de ne pas boire trop, je lui répondis que je le savais déjà, qu'elle n'avait pas besoin de s'en faire puisque nous n'avions pas prévu de sortir cet après-midi.

« J'aurais voulu faire un tour avec toi, moi.

- Un tour où ça ? Moi personnellement je n'ai pas trop envie de bouger.

- Ho, Mademoiselle paresse ? Tant qu'on y est tu veux pas faire une sieste après manger non plus ?

- Ha, oui, pourquoi pas. »

Nous rîmes toutes les deux alors que Ludivine affichait toujours son petit sourire bizarre, je vis que Marie avait exactement le même. Je ne savais pas a quoi pouvaient elles bien penser mais j'étais certaine qu'elles se faisaient des idées pas très nettes. Le repas fut servi juste après et nous mangeâmes toutes de bon cœur, il fallait dire que ça faisait un moment que je n'avais pas mangé de barbecue et je me remplis l'estomac au point de ne plus pouvoir bouger de ma chaise. Élodie vola quelques bouchées sur mon premier sandwich à la merguez et sur l'une de mes brochettes, me faisant râler alors qu'elle en riait, je la traitais de sale gamine et ce fut à son tour de fulminer contre moi, me donnant mollement des coups de poings contre mon épaule. Tout le monde en rit, nous passions un agréable moment sous le soleil de septembre, dans ce jardin. L'alcool, comme la nourriture, était abondant et je bus plus que de raison. Les filles avaient prévu de la glace en dessert, j'aidais à débarrasser la table sans demander l'avis de personne, le rosé me tapant légèrement au crâne, je m'affranchissais de ma politesse habituelle et agissais comme à la maison. Ma copine le remarqua elle aussi mais ne me dit rien pour le moment. Une fois la coupe de glace avalée, je déclarai à haute voix que je ne pouvais plus bouger de la chaise, Adeline, qui avait un sévère coup dans le nez m'assura qu'elle non plus ne pouvait plus bouger, elle posa alors sa tête sur la table et fit mine de dormir. Ludivine, qui n'avait pas bu autant que nous, dit qu'elle aussi avait un peu trop mangé. Seules les deux jeunes filles semblaient en forme, elle débarrassèrent les coupes vides et Marie en profita pour poser devant moi une nouvelle bouteille de vin sous le regard réprobateur de ma copine. Pour l'heure, je me fichais de me faire reprendre, je me servis généreusement un verre et le bus d'une traite. J'allais me resservir une nouvelle fois quand Adeline leva subitement la tête.

« Moi aussi j'en veux, hurla-t-elle. Garde pas tout pour toi Clairinette ! Ah, et passe-moi une clope aussi. »

Sa tête se reposa sur la table avec un bruit sourd, je regardai Ludivine qui haussa les épaules comme pour me dire ''fais ce que tu veux'', je remplis à moitié le verre de mon amie et déposai une cigarette à côté, en profitant moi aussi pour en allumer une. Comme je fumais, Élodie ne revint pas sur moi tout de suite, elle se tenait debout, tenant le dossier de la chaise en plastique sur laquelle j'étais assise, en silence. Je pouvais tout de fois sentir le regard noir qu'elle me jetais lorsque mon verre toucha mes lèvres, je sus alors que j'allais passer un sale quart d'heure plus tard. Elle vint se poser sur moi quand j'eus fini ma clope et déposa un baiser sur ma joue, elle ne semblait pas faire la tête plus que ça, j'en fus assez rassurée. Je commençais à m'assoupir sur ma chaise, la chaleur du soleil combinée à celle d' Élodie qui me collait me faisait me sentir bien.

« Finalement on va peut-être se la faire cette sieste, dit-elle contre mon oreille, me donnant un frisson au passage. Tu viens ?

- Oui, je crois que je vais me laisser tenter.

- Faites pas de cochonneries, dit Adeline, toujours couchée sur la table. Je suis pas d'accord sinon.

- On te ressemble pas Pilier. On sait rester sage nous.

- Moi aussi je suis sage !

- On parle de tes traces de morsure de vampire que t'as dans le cou et sur les épaules ?

- Nan, ça va aller. »

Nous rentrâmes dès que mon verre fut vide, ma copine me tenait par la main et je me rendis compte que j'avais du mal à avancer en ligne droite. Monter les escaliers menant à l'étage fut plus simple que prévu, une fois dans sa chambre, Élodie se jeta sur son lit, je fus impressionnée par son bond qui couvrait deux mètres, elle se coucha dans le fond et tapota le bord du matelas du plat de la main.

« Tu viens t'allonger mon ange ?

- Tu es fatiguée aussi princesse ?

- Non. Mais j'ai envie de me blottir contre toi pour le reste de la journée, voir plus.

- Voir plus hein ? Dans quel sens tu dis ça ?

- Je veux rester blottie contre toi jusqu'à ce qu'on soit indécollable. »

Je m'attendais à une réponse un peu plus pimentée, j'en fus presque déçue puis réussis à me reprendre. À quoi pouvais-je bien penser ? J'avais vraiment l'esprit tordu.

« Tu sais que ça va prendre du temps tout ça ?

- Tant mieux ! »

Je m'allongeai à mon tour et elle vint directement se coller à moi en me murmurant que c'était là qu'elle se sentait le mieux. Pour ma part, cette sensation était loin d'être désagréable. Tout en fermant les yeux, je me dis que je n'aurais jamais osé penser avoir une telle relation avec l'une de mes élèves. 

AMOUR INTERDITOù les histoires vivent. Découvrez maintenant