Chapitre 74

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La première des choses que je pus constater au réveil fut l'extrême mauvaise humeur de ma petite amie qui me tira du lit en me secouant puis se leva immédiatement. Élodie se prépara son petit-déjeuner et, habitude qu'elle n'avait cependant pas, me mit une tasse de café à couler. Je la remerciai en la prenant et m'installant près de la fenêtre de cuisine pour fumer, je n'eus qu'un « hum » pour réponse de sa part. Elle resta silencieuse jusqu'au moment de quitter l'appartement où elle me demanda si on passait chez ses mères ce matin.

« Évidemment qu'on y passe, pourquoi ?

- Je vais les voir toute l'après-midi, je me disais qu'on pouvait faire l'impasse ce matin.

- Hors de question ! Et mon café alors ? »

Elle rit pour la première fois depuis que nous étions sorties du lit, ce qui me donna, à moi aussi, indirectement le sourire. Lorsque nous fûmes arrivées, Adeline nous rappela tout de suite de ne pas oublier qu'elles avaient le rendez-vous aujourd'hui, Élodie fit une drôle de mine mais n'en acquiesça pas moins.

« Quelle gosse difficile, fit mon ancienne camarade de classe en posant devant une tasse de liquide chaud que je pris immédiatement, enfin, tu dois le savoir aussi bien que moi.

- C'est un vrai petit ange à la maison, répondis-je sans mentir.

- Ah, la garce ! Bref, tu nous la dépose après les cours ?

- Comme prévu.

- Tu vas te sentir seule cet aprèm. Ça ira ?

- Me prendrais-tu pour une gamine Adeline Gauvit ?

- Jamais je n'oserais Claire Dumur. Trêve de plaisanteries, je te la ramène après ça te va ?

- Oui, pour une fois c'est toi qui viendra boire un café à la maison.

- Un café ? T'es sérieuse là ? »

Nous rîmes alors qu'Élodie revenait parmi nous et s'assit directement sur mes genoux. Habituée maintenant je ne dis rien mais voyais bien la tête que tirait sa mère, elle dût le voir aussi car elle m'en parla en allant au collège. Je lui dis que sa mère devait s'inquiéter de leur visite de tout à l'heure et de ce que cette bonne femme pouvait bien leur dire. Elle me répondit qu'elle comprenait et qu'elle aussi craignait cette madame Lepuire puisse dire ou voir pire, faire. Personnellement je me dois d'avouer que je me sentais plutôt inquiète moi aussi. Je me garais comme à mon habitude puis nous nous séparâmes pour les deux premières heures de la matinée. J'avais, pour ma part cours avec ma première classe de cinquièmes, des élèves assez calmes et assidus et le cours se passa sans histoire, ce qui est normal pour un cours de Français, me dis-je en riant mentalement alors que les filles arrivaient. Chose étrange, Élodie avait les mains vides.

« Bah, Élo, mon café ?

- Ah, merde ! J'ai oublié.

- Elle a passé la matinée comme ça, fit Sarah, la tête dans la lune. On se disait que vous saviez pourquoi...

- J'ai bien ma petite idée mais malheureusement je ne peux rien y faire.

- Oh, reprit la jeune fille aux cheveux hirsutes, une dispute d'amoureuses ?

- Absolument pas.

- Et quand bien même, fit Noa, ça te regarde pas Sarah. T'es vraiment sans gêne.

- Ouais, répondit sa camarade. Au fait, Madame, j'aimerais vous parler mais pas au collège.

- Que veux tu dire, demandais-je méfiante.

- Que cet aprèm j'irais bien manger une glace et que si vous en avez envie je serais heureuse de partager ma table et de vous faire part de ce qui me turlupine en échange.

- En bref, repris Noa, tu rencardes la prof alors que tu sais qu'elle est en couple avec ton amie... Génial.

- Mais dis pas n'imps toi ! J'ai juste besoin de conseils sur quelque chose mais je veux pas en parler ici.

- Je vois, tu manges chez toi ce midi ?

- Nan, me répondit-elle, cantoche.

- Donc tu ne rentres pas chez toi. Attends moi avec Élo à la fin des cours.

- Merci M'dame. »

Puisque l'on parlait d'elle, Élodie, accompagnée de Marine, passa la porte avec mon gobelet. Vu l'heure, il allait falloir que je me dépêche de le boire. Je vis Sarah murmurer quelque chose à l'oreille de ma petite amie mais je ne voulais pas jouer ma curieuse alors je laissais couler. Pour finir cette matinée, j'avais mon autre classe de sixièmes, avec eux aussi, tout ce passa bien et lorsque je fus de retour près de ma voiture, Sarah m'y attendait en plus d'Élodie. Cette dernière ne semblait pas surprise plus que ça lorsque je fis monter son amie à l'arrière, en prenant place à son tour, elle me dit qu'elle était déjà au courant d'une voix monotone, son amie lui en avait parlé. Nous fûmes vite arrivées chez Élodie, un peu trop vite à mon goût et en passant la porte d'entrée de chez elle, Sarah sur nos talons, une sensation de vide s'empara de moi, sensation que je n'avais pas ressentie depuis des années, au point où j'en fus étonnée moi-même. À cet instant je me dis qu'il était clair comme mon prénom que j'étais totalement amoureuse de cette fille.

« T'en tires une tronche ma fille, fit Adeline une fois qu'Élodie eut passé la porte de la salle.

- Oh, ça va. Je mange un bout et je vais dans ma chambre.

- T'éloignes pas trop, on doit parler.

- De quoi ?

- De ta vie ! Mine de rien ça fait deux semaines qu'on t'a pas vue, on dit quoi si la vieille nous pose des questions sur ta vie au collèges, tes amies, tes notes et tout le reste ?

- OK, ça attendra que j'ai fini de manger.

- Ha, fit soudainement Adeline, c'est qui Bouffeuse ? Ta nouvelle meuf ? T'es gonflée de raccompagner ton ex avec ta nouvelle.

- Pfff ! T'es con mam ! C'est ma pote Sarah. »

L'intéressée d'habitude si agitée était restée dans un coin près de la porte et son visage était rouge écarlate, j'en eus du mal à la reconnaître. Elle fut rapidement emmenée par Adeline qui la fit asseoir à la table et lui proposa un verre de soda, elle partit ensuite en cuisine avec Élodie mais revint avant elle avec un plateau où était posé trois verres, je reconnus bien là ses compétences de serveuse. Elle posa le grand verre de soda devant Sarah qui la remercia en chuchotant, devant moi et à sa place habituelle un verre remplit de liquide brun, inutile de sentir pour savoir ce qu'il contenait.

« J'en bois qu'un, dis-je, je suis avec une élève.

- Oui, je comprends. Je te la ramène quand la vieille sera passée ?

- S'il te plait, oui.

- Ça me dérange pas, j'irai au boulot juste après comme ça. »

Élodie se plaint depuis la pièce voisine de devoir repartir si tard mais sa mère ne releva pas, elle se contenta de soupirer en faisant tinter son verre contre le mien et but un grosse gorgée. Je bus mon verre moi aussi et allait l'amener à la cuisine quand ma petite amie en sortit. Elle me demanda si j'allais partir, j'affirmais alors elle me sauta au cou et m'embrassa longuement. Je ne ressentis aucune gêne à le lui rendre malgré la présence de sa mère ou de sa camarade. Nous partîmes après ça, direction mon appartement en compagnie de la survoltée Sarah qui, depuis que nous étions arrivées ici, était bien trop calme. 

AMOUR INTERDITOù les histoires vivent. Découvrez maintenant