Chapitre 76

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Pour la première fois en presque trois semaines, je me retrouvais seule chez moi. Je savais pertinemment bien que j'avais du travail à faire, du ménage et des cours à préparer mais je n'avais envie de rien. Sans m'en rendre vraiment compte, Élodie me manquait alors que cela ne faisait que quelques heures que nous étions séparées. Je fumais une cigarette à la grande fenêtre de la salle, un verre de vin posé sur le coin de la table le plus proche de moi. Je buvais trop aujourd'hui, je me mis soudainement à comprendre Adeline et sa façon d'avoir en quasi-permanence un verre près d'elle, en résumé, je me faisais gravement chier. On dit qu'il faut savoir se manquer pour mieux se retrouver, je me demandais si cela valait aussi pour les relations aussi jeunes que la nôtre ou s'il fallait attendre quelques années pour que ça soit vrai. Je sautais littéralement sur mon téléphone lorsque je l'entendis sonner, abandonnant dans le cendrier une moitié de cigarette sans même y réfléchir, alors que je suis du genre à fumer jusqu'à la limite du filtre. Je décrochais sans même avoir regarder qui m'appelait, en y repensant cela aurait pu être bien pire.

« Oui bébé ?

- Oh, ma chérie, je suis loin d'être un bébé tu sais ?

- Ah, maman ? »

Elle me questionna immédiatement pour savoir si tout allait bien avec Élodie, je la rassurais en lui disant qu'il ne s'était rien passé, elle était juste chez ses parents et avait promis de m'appeler avant de venir, d'où mon appellation bizarre. Elle fut tellement rassurée que cela me parut étrange, elle qui n'était cependant pas très pour notre relation au début. Elle voulait savoir si j'avais quelque chose de prévu pour ce week-end, officiellement, je n'avais rien mais je me souvins des paroles d'Élodie qui me disaient de le garder dispo car ses mères allaient sûrement m'inviter donc je dus lui répondre que j'étais malheureusement prise. Elle prit sa voix pleine de tristesse que j'appelais mentalement ''maman est déçue'' pour me dire que c'était dommage, Éloïse venait pour le repas et qu'elle aurait aimé avoir toute la famille réunie pour une fois. Je remerciais intérieurement Adeline et Ludivine pour avoir prévu de m'inviter et surtout Élodie de m'avoir prévenue. Après quelques banalités nous raccrochâmes et j'allais à nouveau me caler près de la fenêtre pour fumer. Je pris mon paquet de cigarettes posé à côté de la télé et constata qu'il était vide, j'allais donc en chercher un autre dans le meuble de salle mais vis qu'il n'y en avait plus. Il fallait donc que je retourne en ville pour passer au tabac. Je m'installai au volant et regarda machinalement vers ma droite, m'attendant à y voir le visage souriant de la jeune blonde mais bien évidemment, il n'y avait personne. Je mis le cap sur la ville tout en réfléchissant où aller pour ne pas être partie trop longtemps, si j'avais su j'y serais allée en même temps que je raccompagnais Sarah. Je m'étonnais encore de son histoire avec la petite Noa, je me demandais si notre histoire à nous n'influençait pas notre entourage. N'empêche que cette petite, que je croyais timide, avait du cran, avouer comme ça ses sentiments à sa camarade tout en ne sachant pas comment ça allait être perçu, ça demande un sacré courage et je parle d'expérience. Combien de filles, au lycée ou à la fac, m'ont regardée comme si j'étais un déchet en me disant qu'elles n'étaient pas lesbiennes, ajoutant un ''dégueulasse'' ou autre insulte dans un chuchotement pourtant bien audible de mes oreilles. Perdue dans mes pensées, je garais ma voiture le long du trottoir en face d'un petit tabac de quartier d'où je savais que je serais vite sortie et alla me chercher des cigarettes. J'avais beau trouver la mentalité des parents de Sarah rétrograde et bien que les mœurs évoluaient, la vie n'était toujours pas si simple pour ceux et celles qui choisissaient d'aimer leur homonyme. Si on ajoute à cela les mêmes problèmes de couple, de compatibilités que chez les hétéros, il n'était pas étonnant que la petite Sarah, d'ordinaire si fonceuse, hésitait autant. Malgré tout, j'avais presque envie de la soutenir. Elle ne m'avait pas dit de garder le silence, je me demandais donc si je pouvais en parler à Élodie, histoire de voir ce qu'on pouvait faire pour les soutenir discrètement dans l'ombre. Pensant à elle, j'eus envie de faire quelque chose qui lui ferait plaisir mais je n'en avais aucune idée. En montant dans ma voiture me revint en souvenir notre première sortie et son amour pour les dauphins, je me dis aussi qu'il y avait un énorme magasin de jouets dans la zone commerciale, je décidais donc de filer jusque-là, afin de voir ce que je pourrais trouver sur les dauphins, bien qu'ayant une idée bien précise en tête. J'envoyais un message à Élodie pour la prévenir de mon absence, lui dire où j'allais pour qu'elle puisse temporiser de son côté et je n'avais pas encore atteint le bout de la rue qu'elle me répondit.

« T'es encore avec Sarah ?

- Non, elle est rentrée, lui dis-je après m'être rangée sur le côté. J'ai pris des clopes et là je dois aller là-bas.

- OK ce soir faut trop qu'on parle.

- Un souci ?

- Ce soir. Je t'aime. »

Je crois bien que c'était la première fois qu'elle me le disait aussi franchement. Je me remis en route après lui avoir répondu et l'envie de la retrouver me poussa à, pardon aux agents de police, dépasser les limites de vitesses. Je fus donc rapidement arrivée au magasin que je cherchais, qui était étonnamment bondé pour un mercredi après-midi, au lieu de galérer à chercher dans tous les rayons, je vis une vendeuse, une petite brune à lunettes qui plaçait des boites d'un jeu plateau sur son rayonnage et lui demandai directement de m'indiquer ce que je cherchais. Elle m'y accompagna, je la remerciais, choisis un article, je ne pensais pas qu'il y avait autant de choses sur les dauphins, puis allais à la caisse où là, c'était relativement calme. Une fois de plus, je fus assez vite sortie du magasin et mis le cap sur mon appartement. N'ayant pas de réseau à l'intérieur du magasin, la structure de celui devant être comparable à une cage de Faraday, mon téléphone sonna dès que j'en franchis les portes, ma petite amie venait de me répondre. Je me hâtais de monter dans ma voiture afin de rentrer chez moi. Une fois sur le parking de ma résidence, je lui répondis que je me mettais en route pour rentrer, un petit mensonge afin de conserver la surprise que je voulais lui faire.   

AMOUR INTERDITOù les histoires vivent. Découvrez maintenant