Renaissance - partie 8

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— Qu'est-ce que c'est que ce foin ! hurla Isélia en arrivant. Lâche-le !

Il jeta un regard de côté. Lorsqu'il vit ses compagnons de voyage, il relâcha son étreinte. L'homme tomba à genoux, tout tremblant et tout transpirant.

— Tu peux m'expliquer ce qu'il se passe ? Tu as perdu la raison ?

Il pivota sur ses appuis pour se mettre face à elle et la toisa de son regard glacé.

— Tes hommes sont trop incompétents pour accéder à ma requête. J'essayais de les motiver un peu. Je veux un putain de cheval. Maintenant. Et qu'on me rende mes Éléments. Je pars. On part. Maintenant !

Il avait jeté un regard à Zalma et haussé la voix avec autorité sur ses derniers mots. Le concerné fit deux pas en avant et se plaça entre eux, comme pour la protéger.

— Attends ! Attends, attends ! Qu'est-ce que c'est que cette histoire ? Tu ne nous as pas adressé le moindre mot depuis ton réveil. Tu vas commencer par nous dire comment tu t'es retrouvé enchaîné par un Paladin. Et après, on verra ce qu'il en est.

— On parlera de tout ce que tu veux en chemin, rétorqua Dusack. Mais pour le moment, on part. Nouvelles informations. Ma mère est bien vivante. Aux mains de Solafein. Il est hors de question que je reste une seconde de plus ici en sachant ça. Que quelqu'un me prépare un foutu cheval bien sanglé ou j'étripe le premier venu ! Le blondinet revenant, au hasard. 

Il se pencha pour mieux voir Pixx. Un salut de la main fait avec réserve lui répondit. 

— Je ne t'ai pas vu ces deux derniers jours, je croyais que tu étais mort comme les autres. 

— Dusack, Dusack, Dusack, répéta Zalma dans l'espoir que son ami se concentre à nouveau. S'il te plait.

Il le saisit par les épaules et le regarda droit dans les yeux.

— Ecoute-moi. Je voulais te laisser du temps. Parce que je sais que c'est difficile pour toi. Mais il va vraiment falloir qu'on parle et que tu m'expliques ce qu'il se passe. Ton père, que son âme repose dans la paix éternelle d'Aédelfa, m'a dit que tu savais. Que tu savais pour l'attaque de l'Épine. Il t'a fait parvenir un message pour te demander de l'aide, n'est-ce pas ? Pourquoi n'as-tu rien dit, Dusack ? Pourquoi as-tu fui le jour même de l'assaut ? J'ai besoin de comprendre. 

Il secoua la tête, perdu, sans jamais quitter Dusack des yeux. Le vent soufflait autour d'eux en rafales glacées. Plus loin, les arbres gémissaient à grand bruit. 

— On part, rabâcha son ami, fermé à toute émotion. Dis-moi où sont vos maudits chevaux. Ce n'est pas la fille ni ses sous-fifres qui vont m'aider, alors j'espère au moins que je peux compter sur toi. 

La fille ? grogna Isélia en croisant les bras. C'est nouveau, ça ?

L'aédelfien baissa la tête un instant. Soupira. Releva la tête. Une lueur mauvaise passa dans ses yeux. Et soudain, il prit une inspiration et hurla si fort que les corbeaux proches s'envolèrent avec des croassements de détresse :

— Je ne t'ai même pas vu aller une seule fois te recueillir sur le tombeau qu'on lui a fait, merde ! On l'a laissé ouvert pour que tu puisses le voir une dernière fois ! Mais tu t'en torches le cul ! C'est quoi ton problème, à la fin ?

Un frisson courut sur les échines, même les plus rudes. Il y eut un silence pesant où seul le vent poursuivait sa plainte. Les regards se croisèrent, emplis d'inquiétude et d'interrogations. Dusack tourna légèrement la tête. Ses yeux se posèrent sur une rangée de tombes, installées non loin du charnier. Les rebelles de haut rang n'avaient pas été jetés à la fosse avec les autres, mais avaient reçu une sépulture décente, accompagnée des honneurs qui leur étaient dus. Et si le monument restait rudimentaire, fait de pierre et de bois, le nom d'Aräck était tout de même gravé sur le plus imposant des tombeaux. 

Taïka - Les Brèches du DestinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant