Rébellion - partie 4

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Isélia comprit rapidement que Pixx allait de nouveau perdre pied si elle n'apportait pas quelques précisions :

— Il est isolé dans une maison à l'écart du village, pour éviter les contaminations. Son état est à peu près stable. Je crois. Il faudrait que je retourne le voir. 

Il émit un soupir de soulagement entre ses dents serrées. Dusack était encore en vie. Empoisonné par sa faute, peut-être, mais il allait survivre. 

— Aide-moi, Pixx. Je ferai en sorte de t'apprendre à dompter ton Sceau. Et de continuer à soigner ton ami. Il ne faudrait pas que tout à coup, je l'abandonne à son triste sort... 

Un nouveau rictus satisfait aux lèvres, elle sauta de son banc et se dirigea vers la lisière des Échardes. Pixx laissa retomber ses bras sur ses flancs. Quelque peu soulagé mais toujours désemparé, il tergiversa un moment puis se décida à l'accompagner, sans véritable alternative à sa disposition. 

— Attends un peu ! lança-t-il en la suivant d'un pas hésitant. Je veux le voir ! Dusack ! Où est-il ? Je dois m'excuser, je dois... 

— Aucune visite, répliqua-t-elle alors qu'elle lui tournait encore le dos. Il est alité et a besoin de repos. Peut-être après nous avoir aidés, nous verrons. Une autre question ? 

— Des dizaines, même ! Qu'est-ce que me fait ce foutu Sceau ? Est-ce que je peux stopper ce... poison ? Dis-moi exactement ce que tu attends de moi ! Tu as un plan ou quelque chose ? Ne crois pas que je vais faire quoi que ce soit si tu ne daignes rien m'expliquer. 

D'autres inquiétudes qu'il préférait ne pas évoquer tournoyaient dans son esprit. Pourquoi Caprice, une totale inconnue, lui avait-elle gravé ce Sceau ? Que voulait-elle dire quand elle parlait de faire renaître les pouvoirs d'un père disparu ? Ses paroles contrastaient avec les événements, et plutôt qu'une renaissance, tout semblait indiquer l'imminence d'une mort perverse. Pour lui et pour la nature alentour. 

Bientôt ils arrivèrent à l'orée de la forêt. La jeune femme s'accroupit et posa sa main dans l'herbe fraîche. Devant elle, de gros flocons tombaient doucement et formaient un voile dense au milieu des arbres. La visibilité était réduite à une trentaine de pas. De terribles créatures auraient pu se cacher dans les fourrés les plus proches qu'ils ne l'auraient pas su. Pixx admira un instant le contraste entre les chutes de neige des Échardes et le ciel bleu qui s'étendait au-dessus du village, mais l'impatience écourta sa contemplation : 

— Je suis à peu près sûr d'avoir posé des questions ! s'insurgea-t-il face à l'absence de réaction d'Isélia. 

— Je suis complètement sûre d'avoir imposé mes conditions ! riposta-t-elle avec encore plus d'animosité que lui. Tu m'aides. Et je t'éclaire ensuite. Il n'y a pas de négociations. Tu as plus à perdre que moi si tu refuses. 

Il soupira et tapa du pied dans un caillou pour tenter d'évacuer sa frustration. Il n'avait aucun vrai moyen de pression sur elle. Dans un élan aventureux, il pouvait toujours décider de ne pas la croire, voire de la menacer de ne pas l'aider, et laisser les rebelles se débrouiller face aux soldats ennemis. Mais il s'exposait alors à sa propre mort, ainsi qu'à celle de Dusack. Il ne pouvait pas risquer une telle éventualité, aussi incertaine fût-elle. 

— Je peux tout de même poser une question ? lâcha-t-il après un court silence. Sur un tout autre sujet. 

Elle ronchonna entre ses dents. 

— C'était vraiment mieux quand tu bégayais et étais mal à l'aise. Je n'aurais pas dû te dire qu'il était encore vivant. 

— Il faut que je demande, continua-t-il en faisant fi de ses commentaires. Il faut que je comprenne. Pourquoi es-tu une rebelle ? Qu'est-ce que vous combattez ? Je ne vis pas ici, ça devrait être le dernier de mes soucis. Mais vos revendications méritent-elles... 

Taïka - Les Brèches du DestinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant