Chapitre 8.3

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Il était déjà l'heure de partir déjeuner. Mes collègues se levèrent en ramassant leurs notes puis chacun rejoignit la sortie. Bonny consulta son portable, je regardai tout autour de moi cette pièce désormais vide et décidai d'en profiter pour m'approcher d'elle afin de lui parler.

— Que me voulez-vous Reyes ? croassa-t-elle le moins aimablement possible.

Cette dernière s'obstinait à m'appeler par mon nom, ce qui m'insupportait au plus haut point sachant que j'étais la seule à bénéficier de cette attention.

— C'est à propos de l'article du prochain numéro, osai-je timidement.

— Hum.

Cette dernière ne prit même pas la peine de me regarder, préférant ranger ses affaires.

— J'aimerais m'occuper de l'article sur Trac-World.

Elle tourna sa tête en ma direction en une fraction de seconde, l'air incrédule puis fronça les sourcils.

— Ce n'est pas une cour de récréation ici. Notre revue de presse est sérieuse, alors merci d'éviter de me déranger pour si peu et retournez à vos copies ! s'écria-t-elle.

Abasourdie par son tel mépris envers moi, une colère que j'essayai de contenir gronda en moi. Je serrai la mâchoire pour trouver la force de ne pas lui répondre. En tournant les talons pour sortir de la pièce, une petite idée me vint en tête. J'attrapai mon téléphone dans ma poche et composai le numéro de la villa des Mattew, en prenant soin de ralentir le pas afin que Bonny puisse entendre ma conversation.

— Maison des Mattew, répondit madame Arlette dès la deuxième tonalité.

— Bonjour, c'est Zoé, Faïz Mattew est-il là s'il vous plaît ?

Je priai pour que la réponse soit négative. Mon but était uniquement de prononcer ce prénom afin d'interpeller la curiosité de ma chef. Je sentis son regard pesant dans mon dos.

— Oui, il est là, me confirma Madame Arlette, je vous le passe.

Merde ! Il fallait qu'il soit aujourd'hui à la villa, à cette heure-ci, alors qu'il était porté disparu la plupart du temps.

— Tout va bien Zoé ?

Le ton grave et anxieux de Faïz au bout du combiné me fit perdre mes moyens.

— Oui... je t'appelle pour savoir... si... Victoria sera là ce soir pour dîner ?

Il marqua une pause, se demandant sûrement ce qui pouvait bien me prendre de lui poser ce genre de question.

— Je ne sais pas Zoé, s'agaça-t-il, j'ai beaucoup à faire, appelle-la directement, c'est mieux.

— Oui, tu as raison, c'est que je n'arrive pas à l'avoir au téléphone depuis ce matin.

— Je l'appellerai, conclut-il avant de raccrocher.

Je fis mine d'être encore au téléphone avec ce mufle.

— Merci Faïz, à ce soir.

Mon pied allait franchir le bas de la porte quand j'entendis Bonny m'appeler de l'autre bout de la pièce. Un petit sourire triomphant apparut sur mon visage puis je me retournai, l'air impassible.

— Zoa, vous pouvez venir par ici s'il vous plaît ?

— Zoé, me permis-je de la reprendre.

Sa main s'agita dans l'air.

— Oui, bon, Zoé, Zoa, c'est la même chose.

Non, pauvre conne !

— Vous avez le projet, me lâcha-t-elle de but en blanc sans que je m'y attende.

Elle s'assit en croisant ses jambes et me fixa droit dans les yeux.

— C'est la première fois de toute ma carrière que je laisse autant de responsabilités entre les mains d'une simple stagiaire. J'espère ne pas avoir à le regretter par la suite.

J'eus envie de sauter sur place comme une gamine, mon stage prenait enfin un sens. Bonny ajouta :

— Par contre, j'aimerais que vous collaboriez avec Agustin.

Mes traits se figèrent à cette annonce. Impossible, Faïz ne supportera pas de devoir parler de sa vie avec un inconnu. Il n'y avait pas plus asocial que lui. J'imaginai déjà la scène surréaliste entre ces deux jeunes hommes.

— Il y a un souci ? me demanda ma chef.

— Faïz Mattew n'acceptera jamais de réponde aux questions d'un inconnu, quel que soit l'interview. Il est... comment vous expliquer ? Facilement irritable.

Bonny plissa ses yeux derrière ses lunettes, elle parut réfléchir.

— Dans ce cas-là, il vous aidera dans la relecture de votre article ainsi qu'à la mise en page. J'irai lui parler de notre accord après le déjeuner, vous pouvez disposer Zoé.

— Merci.

Au moment où j'allais partir, celle-ci m'interpella de nouveau.

— Zoé.

— Oui ?

— Bien joué !

Je me retournai, satisfaite et fière de moi. Désormais, la tâche la plus difficile restait de convaincre l'intéressé, Faïz Mattew, de me laisser rédiger mon premier article sur sa multinationale. Je ne pus m'empêcher d'arracher une grimace rien qu'en y pensant. C'est alors que mon portable se mit à vibrer. Mince ! C'est Faïz.

« Je viens d'avoir Victoria, tu n'as jamais essayé de la joindre, tu joues à quoi ? »

Oops ?

« Je t'expliquerai, je dois te voir ce soir, c'est important. »

Un sentiment de panique s'empara de moi juste à l'idée de me retrouver seule avec lui. Comment allais-je devoir m'y prendre pour le convaincre de coopérer sur mon projet ? Je me dirigeai à mon bureau pour déposer mes affaires, récupérer mon sac à main et enfin sortir rejoindre mes amis. Asarys, Lexy et David m'attendaient à l'extérieur du bâtiment pour déjeuner. Je n'avais que trois quarts d'heure de pause, mais ces petits moments avec eux m'étaient indispensables pour continuer mes journées avec ma patronne tyrannique. Arrivée dehors, les filles m'accueillirent les bras ouverts.

— Le Teagan ? proposa David en parlant du Pub d'en face.

— Je meurs de faim, nous confia Lexy.

Dark Faïz : Tout héros a sa légende [ Terminé ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant