Chapitre 4.8

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Nous entrâmes dans le séjour tous les deux, côte à côte. Lily était en train d'installer un nouveau tableau de maître au mur tandis que madame Arlette s'affairait à préparer le dîner.

— Monsieur Mattew, interpella cette dernière en direction de Faïz, mangerez-vous ici ce soir ?

— Non, ne me comptez pas.

— Très bien monsieur.

Lily s'avança vers son fils pour l'embrasser, apparemment heureuse de le voir.

— Venez donc vous installer sur la terrasse, proposa-t-elle, il fait un peu frais, je vous conseille de vous couvrir.

À l'extérieur, la nuit était tombée. Je pris place en face de Lily, sur cette grande banquette ovale, tout en résine tressée. Depuis le début de mon séjour dans la villa des Mattew, j'aimais venir m'installer ici lorsque j'avais envie de faire le vide dans ma tête. En effet, en journée, les sièges de couleur turquoise allaient parfaitement avec l'horizon d'un ciel souvent bleu clair, se reflétant sur un océan sombre et intense. Le regard profond de Faïz posé sur moi pesait lourd, mais je faisais comme si je ne le voyais pas. Il décida de rester debout, les mains dans les poches, près de la baie vitrée. Lily l'interrogea du regard.

— Le Dôme devient de plus en plus opaque chaque jour, fit remarquer Faïz, impuissant, à sa mère.

— Ça se rapproche et nous ne sommes pas encore prêts, murmura Lily, les mains jointes sur ses genoux.

— Que traduit la couleur du Dôme ? demandai-je angoissée.

— Le Dôme, commença Lily, est là pour protéger la civilisation de Los Angeles contre toute intrusion nuisible pour ses habitants. Malheureusement, le mal est déjà là. La couleur indique juste...

Lily détourna le regard pour regarder le ciel, prenant soin de sélectionner chaque mot comme s'ils avaient une importance cruciale à ce moment précis. Après quelques secondes, elle reprit :

— La couleur du Dôme indique le degré du danger dans lequel se trouve la population de L.A. Heureusement, les habitants n'ont pas connaissance de cette information, pour cause, il y aurait de gros risques d'émeutes si ça venait à se savoir. Nous devons gagner du temps.

— Mais nous n'en avons pas ! s'écria Faïz d'une voix furibonde, Zoé doit partir et retourner à Paris.

Lily s'adressa de nouveau à moi de sa voix douce :

— Nous pouvons te faire quitter L.A dès demain si c'est ce que tu veux.

— Non ! m'exclamai-je sans réfléchir. Non, non, arrêtez de penser à ma place, arrêtez de vouloir absolument me protéger. Oui, une part de moi a peur, je vous ai écoutés, mais jamais je ne vous laisserai. J'ai un rôle à jouer dans cette histoire, la mort ne m'effraie pas, mais en revanche, ce qui pourrait vous arriver à chacun d'entre vous me terrifie. Vous êtes ma famille dorénavant.

Lily, les yeux humides, s'empressa de venir auprès de moi et me serra dans ses bras. Son étreinte me rassura et me donna la sensation d'être invincible. Lorsqu'elle se détacha de moi, elle leva les yeux vers son fils.

— Faïz, promets-moi de prendre soin d'elle, le supplia-t-elle.

Celui-ci, les yeux fermés, secoua sa tête en signe de désapprobation, en sentant les choses lui échapper. Il fit alors demi-tour en se dirigeant à l'intérieur de la villa sans ajouter un mot de plus, quant à Lily, elle me tenait toujours dans ses bras. Cette dernière n'essaya pas de le retenir.


FAÏZ

Arrivé devant le manoir, il poussa la lourde porte de cette vieille demeure, construite presque sous terre il y a plus de deux siècles. Ce manoir, baptisé « la Septième Terre » était l'endroit où Faïz se rendait lorsqu'il cherchait des réponses à ses questions. Connu autrefois dans le monde entier, ce lieu extravagant avec des moulures en or somptueuses au plafond ressemblant à un petit château. Les escaliers en pierre à l'entrée donnaient un caractère ancien, le tout mélangé à une décoration raffinée. Faïz se rendit dans la première pièce qui se trouvait à l'autre bout de l'entrée, appelée la salle blanche. Il se repassa en mémoire sa conversation sur la terrasse avec sa mère et Zoé, tout se dessinait nettement dans son esprit. Le cœur serré, il devait se préparer au pire désormais, même s'il ne voulait pas y penser.

— Ça faisait longtemps l'ami, s'exclama une voix enjouée et grave qui brisa ce silence paisible, ce qui eut le don d'irriter le jeune homme qui venait d'arriver.

Par plaisir de provocation, son interlocuteur continua :

— Tic-tac, tic-tac.

— La ferme Julio, s'agaça Faïz

Un homme d'apparence plus âgé que ce dernier, de grande taille, chauve dont les yeux étaient cachés derrière de petites lunettes rondes aux verres opaques, était assis dans un fauteuil d'époque, un verre de whisky dans la main. Julio avait l'air d'avoir attendu ce moment, où Faïz reviendrait au manoir. Il prit place dans un siège, installé en face de lui.

— Le Maestro et son chien sont aux portes de notre monde. On est à présent sûrs que l'affrontement est inévitable dans les semaines à venir. De combien de temps disposons-nous Julio ?

— Avant que la guerre entre vous et lui éclate ? Deux mois, peut-être trois tout au plus, c'est ce que nous révèle le Callis si on suit la prophétie.

En entendant ces mots, les paupières de Faïz se plissèrent.

— Tu dois trouver ce maudit tombeau au plus vite. Zoé est la clef et tu le sais. Tu dois la faire venir ici pour qu'elle déchiffre les écritures du livre Saint.

Julio but la dernière gorgée qui lui restait dans son verre, il eut désormais l'air soucieux. Faïz se cala au fond de son fauteuil et leva les yeux au plafond. Il revit le visage magnifique de Zoé, ses yeux, mais aussi chacune de ses courbes parfaites. Son caractère arrogant lui paraissait si fragile lorsqu'il était près d'elle...

— Tu vas devoir faire équipe avec ton Alma Gemala, j'espère que tu es prêt ? l'interrogea Julio.

— À vrai dire, je ne sais pas encore, répondit Faïz dans un chuchotement douloureux, je ne veux pas la perdre.

— Ne te tourmente pas à l'avance, chacun de nous a un rôle à jouer. Toi et tes semblables devez sauver l'espèce humaine. Pour cela, vous avez besoin d'un maximum d'informations.

Oui, Julio était le gardien de ce sanctuaire, plus précisément un Sylphe, le successeur de ces lieux, protégeant précieusement le Callis qui se trouvait ici depuis dix-huit ans. Désormais, cet elfe avait comme tâche de faire remonter les archives les plus sombres que l'on croyait oubliées à jamais, à la lumière du jour.


Dark Faïz : Tout héros a sa légende [ Terminé ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant