Chapitre 4.7

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La fatigue se faisait sentir dans mes jambes en cette fin de journée éprouvante à la cafétéria. Debout depuis presque deux heures, il était impossible de trouver un temps de pause devant les nombreuses commandes qui affluaient, quant à David, il été aussi speed que moi, attendant impatiemment que le rythme se calme pour enfin connaître toute l'histoire de notre altercation avec Rachelle. Toute l'université était déjà au courant de cet accrochage. Les filles étaient assises dans un coin de la cafétéria et révisaient tranquillement. Asarys m'avait proposé de sortir ce soir, mais j'avais dû refuser pour cause de retard dans mes révisions. De plus, je comptai en profiter aussi pour me reposer. Au fond de moi, je redoutai le moment où je rentrerais à Elora, en effet, revoir Charles, Lily et Victoria, c'était me replonger dans la réalité et l'horreur qui sommeillaient dans l'obscurité.

— Un café s'il vous plaît.

Cette voix qui ne m'était pas inconnue me tira de mes songes, je n'osai pas lever les yeux afin d'éviter l'affrontement de son regard, préférant m'activer à préparer sa commande.

— Regarde-moi Zoé, me demanda Faïz à mi-voix.

Je levai les yeux, hésitante, mon cœur s'emballa immédiatement. Ses mains dans les poches, l'air abrupt, il me gratifia d'un regard sombre presque menaçant. J'en conclus que la nouvelle lui était aussi parvenue.

— Je te l'apporte, réussis-je à articuler calmement en me retournant aussitôt vers la machine à expresso.

— Je t'attends à ma table... nous avons à parler tous les deux, trancha-t-il de mauvaise humeur.

Je me doutai à l'intonation de sa voix que la conversation ne serait pas facile. Il tourna les talons et s'éloigna à une table, tous les regards dans la cafétéria s'étaient tournés vers nous. Mal à l'aise, je m'adressai à mon ami :

— David, je...

— Vas-y ma belle, ne t'inquiète pas, je prends le relais, m'encouragea celui-ci avec un clin d'œil.

Je m'assis à la table de Faïz sans avoir l'audace de le regarder en face. Mes yeux préféraient chercher un peu de réconfort auprès des filles qui se trouvaient plus loin, de l'autre côté où nous étions installés. Lexy tout en me regardant mimait une corde autour de son cou m'indiquant ainsi son peu de soutien. Je finis par attacher mes cheveux en chignon pour occuper mes mains, attendant nerveusement que Faïz commence la discussion. Il me fixait intensément comme pour évaluer la situation ce qui me fit légèrement rosir.

— J'aime quand tes cheveux sont relevés ainsi, se radoucit-il.

Je clignai des paupières, incrédule, et restai bouche bée devant ce premier compliment qu'il m'adressa si naturellement.

— Merci, murmurai-je sur mes gardes.

Après ces quelques mots, je me détendis peu à peu, ce qui me permit d'ajouter :

— Apparemment, je suis ta cavalière pour la soirée d'Halloween.

J'essayai de déchiffrer sa réaction suite à cette révélation. Gêné, il se racla la gorge avant d'incliner sa tête et de rétorquer froidement :

— J'ai vu ça, mais je pense que ça tombe plutôt mal au vu des événements de tout à l'heure Zoé. Non ? Tu as visiblement mis une droite dans le visage de ma petite amie !

— Je n'y crois pas, me renfrognai-je, ta dingue de copine m'a littéralement sauté dessus, c'est elle qui m'a giflée en premier ! Elle a cru que...

Je m'arrêtai net, ne voulant pas rentrer dans les détails, à quoi bon tout expliquer de toute façon ? Faïz avait déjà sa propre version des faits. Je luttai contre la rage qui me montait à la gorge devant une telle injustice. La fatigue, les révélations sur la légende du voyageur, tout se mélangeait à la fois. De plus, la froideur de Faïz à mon égard rajouta un peu plus d'eau dans ce verre déjà bien plein. Je me levai d'un coup sec, ce qui le surprit au vu de l'expression de son visage et décidai de sortir avec le besoin de prendre l'air.

Arrivée à l'extérieur, je gonflai mes poumons en soupirant profondément. La nuit commençait déjà à tomber. Les bras croisés, je ne l'entendis pas approcher, seule l'odeur de son parfum m'indiquait qu'il se trouvait juste derrière moi.

— Écoute Zoé, atténua Faïz pour se rattraper, vendredi, je partagerai une danse avec toi, mais il n'y aura pas plus. En général je ne participe jamais à ce genre d'événement. Beaucoup d'autres garçons seront heureux de passer cette soirée avec toi.

J'étais abasourdie, comment pouvait-il me dire ça, alors qu'il savait ce que j'éprouvais pour lui ? Toujours derrière moi, je ne pris pas la peine de me retourner.

— Moi aussi, ce n'est pas le genre d'événement que j'apprécie, mais pour une fois, j'étais heureuse de pouvoir me changer les idées, après tout ce que j'ai appris hier soir, la prophétie dont parle le Callis et tout le reste. Ça fait beaucoup pour moi, lui avouai-je.

Je me décidai enfin à l'affronter dans les yeux, il sembla soudain si fragile et vulnérable.

— Tu es au courant ?

Sa voix se brisa.

— Oui, depuis hier soir, j'ai tout découvert.

Sa mâchoire se serra brusquement. Je sus qu'il ne dirait plus un mot. Son regard balaya le parking au loin, à la recherche de sa voiture.

— Où vas-tu ? insistai-je en le voyant partir.

— Je rentre à Elora, je dois voir mes parents.

— Faïz, attends, je viens avec toi.

— Je t'attends dans la voiture, grommela-t-il sans enthousiasme.

Il me restait trente minutes avant la fin de mon service, j'espérai que ça ne dérangerait pas David de me laisser partir un peu plus tôt.

Sur le chemin de la villa, Faïz était silencieux, comme à son habitude, sûrement plongé dans ses pensées les plus sombres. J'aurais voulu le faire sourire ne serait-ce qu'une fois, une seule fois aujourd'hui. J'avais l'impression de tout faire pour saboter cette relation, mes cartouches chance étaient vides. À l'écoute d'une chanson d'Ed Sheraan qui passait à ce moment sur les ondes radio, un sentiment de tristesse m'enveloppa. C'est alors que je me dis qu'il y avait pire dans la vie, afin de me rassurer.

Pire comment ? Si ça se trouve, dans quelques mois, je devrais me jeter d'en haut d'une falaise pour sauver le monde.

À cette pensée, la morosité me submergea de nouveau. Mon long soupir obligea Faïz à m'interroger sur mon état.

— Comment te sens-tu ?

— J'ai l'impression de manquer de temps tout à coup. Je découvre en moi, une rage de vivre dont je ne soupçonnais pas l'existence. Je veux continuer à avoir des rêves... un futur. C'est dingue, me confiai-je à lui à cœur ouvert.

— Je comprends, mais tu sais, tu peux encore partir de L.A. Je pense que ça serait la meilleure décision à prendre. Tu dois tourner la page. Ne te braque pas Zoé, je veux juste te savoir à l'abri quand les choses se gâteront.

Aucune réponse ne me vint, je hochai juste la tête pour clore ce sujet, sentant une grande colère grandir en moi. J'étais désormais bien trop impliquée dans le secret et dans mes sentiments pour rentrer chez moi. Je regardai par ma vitre le paysage défiler. Le ciel avait une merveilleuse teinte rouge et or avec ce soleil couchant. Ce joli spectacle m'aida à m'apaiser.


Dark Faïz : Tout héros a sa légende [ Terminé ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant