Chapitre 1.4

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La journée de ce dimanche commença par un bon rangement de mes valises. Lily m'avait demandé au cours du dîner d'hier, si je souhaitais l'accompagner, elle et sa fille, à l'église ce matin. C'était poliment que j'avais décliné l'invitation sans expliquer que ma foi était ébranlée depuis un long moment déjà. Ensuite, je me mis à ranger mes fournitures, cours, paperasses, plannings... afin que tout soit prêt pour le lendemain.

Je jetai un rapide coup d'œil à mon réveil posé sur la commode et constatai qu'il était déjà tard. Sous ma douche, je me revis devant Faïz, minable, incapable d'entamer la moindre conversation. En sortant, j'enfilai un short et un large débardeur noir avec le portrait de Notorious B.I.G dessiné dessus, puis je chaussai mes espadrilles montantes. Devant le miroir, je tirai mes longs cheveux frisés en arrière avec ma pince, ce qui fit ressortir mes yeux verts. J'eus l'impression de me retrouver un peu. À cet instant, j'entendis la porte d'entrée se refermer, j'en conclus que Lily et Victoria venaient de rentrer de l'église.

En bas, je trouvai Victoria sur la terrasse, près de la piscine avec sa mère. Je ne vis ni Charles ni Faïz. Une part de moi était déçue, ce qui m'agaça. Je ne vais tout de même pas m'attacher au premier gars que je croise à Los Angeles ! Madame Arlette nous avait préparé un brunch copieux, qu'elle avait installé sur la grande table extérieure.

— Bonjour Zoé. As-tu passé une bonne nuit ? Tu es toute mignonne.

Lily, sous ses grosses lunettes de soleil, arborait un sourire que je qualifiai de magique tellement il transmettait une bonne humeur tout autour d'elle.

— Oui, j'étais épuisée à vrai dire, lui répondis-je tout en m'asseyant.

— J'adore ton short ! enchaîna aussitôt Victoria.

— Merci, j'espère en trouver d'autres ici.

Nous conversâmes sur le temps et le soleil de la Californie autour de ce brunch. Tout avait l'air simple auprès d'eux. Lily proposa ensuite de partir faire une balade dès que son mari rentrerait à la villa.

— Où sont-ils partis ? demandai-je sur un ton réservé, en parlant de Charles et de Faïz.

Victoria m'indiqua que son père était encore au boulot et ne connaissait pas vraiment les week-ends.

— Oui, d'ailleurs c'est dommage ! soupira Lily.

— Et Faïz ?

— Mon frère doit sûrement être avec Rachelle en ce moment.

Je lui adressai un regard interrogateur.

— Sa petite amie, lâcha Victoria d'une voix maussade.

— Ah.

Je fis mine de ne pas me sentir affectée par cet aveu, mais au fond de moi, mon sang ne fit qu'un tour. Après tout, je m'attendais à quoi ?

Après ce déjeuner copieux, je retournai dans ma chambre et en profitai pour appeler mon père, il devait être mort d'inquiétude. Ce dernier répondit dès la première sonnerie.

— Zoé ! Je n'ai pas dormi de la nuit, râla-t-il aussitôt, comment vas-tu ? Comment est ta famille d'accueil avec toi ?

— Papa je vais bien, le rassurai-je, tu sais, avec le décalage horaire, j'ai préféré attendre pour t'appeler. Si tu savais, je suis dans une villa magnifique. Elora à l'air d'être un quartier calme et hors du temps. La famille Mattew est juste formidable.

Pendant que je parlais à mon père près de la baie vitrée, Victoria s'invita dans ma chambre. Je lui fis un signe de tête pour qu'elle s'installe. Elle prit le cadre que j'avais posé ce matin à côté de mon lit. Une photo ancienne de ma mère et de moi, ensemble.

— Papa, il est préférable de communiquer par mails. Je te rappelle dans la semaine. Embrasses mamie Dunia pour moi. Je pense fort à vous.

Je finis par raccrocher. Victoria n'avait rien dû comprendre à notre conversation en espagnol.

— C'est ta mère ? me demanda-t-elle en brandissant le cadre.

Je hochai la tête. Victoria scruta la photo et me demanda, hésitante :

— Il t'arrive de lui parler parfois ?

Je fus surprise par la question de Victoria. J'hésitai un instant avant de lui répondre.

— Seulement dans mon sommeil. Je la retrouve dans mes rêves et c'est comme si elle n'était jamais partie. Je peux presque la toucher tellement elle me paraît réelle, c'est si étrange quand j'y pense.

Mon cœur se serra et Victoria n'insista pas. J'appréciai sa discrétion sur le sujet, son regard compréhensif suffit.

Nous décidâmes de partir nous promener sur les hauteurs de Los Angeles dès l'arrivée de Charles à la villa en début d'après-midi. Nous délaissâmes la Mustang de Lily pour l'Escalade noire de la famille. À travers la vitre teintée, j'admirai le paysage avec sa côte pacifique faite d'une longue étendue de plages et de falaises. L'Escalade monta sur les collines au nord de la ville, ne laissant apparaître que les toitures basses des habitations en dessous de nous.

Arrivés au Griffith Park, à presque trois cents mètres d'altitude, à l'ouest du boulevard Loz Feliz, nous nous garâmes sur le parking de l'observatoire. Celui-ci dominait la ville avec une vue spectaculaire à trois cent soixante degrés qui me coupa le souffle. Je respirai un grand coup réalisant que tout était bien réel. Au loin, j'aperçus sur le versant sud, l'écriteau « Hollywood » en lettres capitales. J'attrapai mon smartphone pour immortaliser cet instant en photo.

— Ça te plaît ? me demanda Lily en se rapprochant de moi.

— Oui, ce style architectural n'est pas commun, il me fait penser à un mélange entre plusieurs cultures, répondis-je, songeuse.

— Tu as le sens de l'observation, s'étonna Lily, en effet, c'est un mélange de deux styles, Art déco et égyptien. Le rendu est unique.

Tandis que Charles et Victoria se promenaient un peu plus loin, Lily en profita pour m'adresser quelques mots :

— Zoé, je veux que tu saches que si tu as besoin de te confier sur quoi que ce soit, nous sommes là pour toi. Tu fais partie de notre famille. Il y aura forcément beaucoup de hauts et j'espère... très peu de bas, hésita-t-elle sur la fin de sa phrase.

— Merci Lily. Vous m'avez tellement bien accueillie. Je sais la chance que j'ai.

Elle posa une main derrière mon dos et me sourit tendrement.

— Partir à des milliers de kilomètres loin de chez moi a été le seul moyen d'espérer avancer dans ma vie depuis la mort de ma mère, ajoutai-je.

— Je m'en doute. Elle doit beaucoup te manquer.

— Oui et c'est seulement trois années plus tard et sur les hauteurs de L.A que je m'en rends vraiment compte, avouai-je, peinée.

Lily me serra dans ses bras, ce qui me réconforta, bien plus que n'importe quelles paroles. Nous continuâmes ensuite la visite durant quelques heures auprès de Charles et de Victoria. Le musée astrologique dans le ventre de l'observatoire me surprit par son approche pédagogique sur la terre. Le crépuscule tombait petit à petit sur la ville en cette fin d'après-midi, le ciel se mit alors à changer de couleur, donnant un nouveau spectacle éblouissant. En descendant vers le parking, une statue en bronze représentant un homme regardant l'horizon attira mon attention. En dessous, y était mentionnée « L'ombre noire ».

— De qui s'agit-il ? demandai-je aux trois membres de la famille.

Ils continuèrent de marcher en direction du 4X4 sans s'arrêter, je perçus alors un certain malaise les envahir.

— Black Shadow, me confia Charles après quelques secondes de silence, c'est le gardien de cette ville, d'après ses habitants.

— Comme un super héros ? persistai-je.

— On peut dire ça. Qui a faim ? Je propose que l'on récupère des pizzas ce soir ! s'écria Lily, visiblement pressée de changer de sujet.


Dark Faïz : Tout héros a sa légende [ Terminé ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant