Chapitre 9.3

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On m'accompagna dans une cabine privée, bien séparée de celle de mon voisin. Je fus agréablement surprise par cet espace largement suffisant. Un lit doté d'une véritable literie m'attendait ainsi qu'un service de restauration des plus copieux. Je n'osai pas me retourner sur la classe économique, ayant bien trop honte de mon statut de privilégiée, moi qui me considérais comme une fille du peuple, prête à donner cette place, si quelqu'un venait me la demander.

— Madame, souhaitez-vous une coupe de champagne ?

Une hôtesse se présenta devant moi avec un plateau sur lequel étaient posées plusieurs coupes ainsi que d'autres verres d'alcool.

— Non merci, déclinai-je aussitôt.

Elle hocha poliment la tête. Dans beaucoup d'États, la consommation d'alcool s'avérait très stricte, mieux valait ne pas rigoler avec ça. Je relevai que l'avion était beaucoup moins rempli qu'à mon arrivée à Los Angeles. Je me revis à l'aéroport, attendant Lily, impatiente de rencontrer ma nouvelle famille. Cette ancienne vie me parut si loin... Cette Zoé-là avait disparu. Faïz réapparut soudainement à mes côtés, mes angoisses et mes questions s'évanouirent.

— Désolé, c'était Barthey, je devais prendre l'appel, se justifia-t-il à voix basse.

— Rien de grave ?

— Non. Tu es bien installée ? Tu n'as besoin de rien ? s'inquiéta-t-il pour moi.

— Ça pourrait être pire, le taquinai-je.

— Oui, il y a eu un problème de timing avec notre jet, répliqua-t-il avec une mine amusée, en rentrant visiblement dans mon jeu.

Il me fixa d'un regard charmeur que je ne lui connaissais pas. Je tournai ma tête, mal à l'aise vers les hôtesses qui avaient pris leur place dans les allées pour nous indiquer les instructions à suivre ainsi que les recommandations en cas de soucis à bord. Une fois leur numéro terminé, nous décollâmes en direction de New York. Les premières lueurs de l'aube éclairaient Los Angles, le spectacle d'en haut était tout simplement magnifique. L'Airbus ralentit au moment de passer le Dôme, celui-ci était plus foncé que la première fois que je l'avais franchi. Désormais, il n'était plus question de voile quasiment invisible. Mon estomac se noua, constatant qu'on était bien peu de choses sur cette Terre.

Faïz s'était endormi, juste là, à quelques centimètres de moi. Occupée à le regarder, je ne remarquai même pas que mon film venait de se terminer. Mes yeux se mirent à se promener un peu partout autour de nous puis finirent par se poser sur son portable posé à côté de lui, sur l'accoudoir, entre nos deux sièges. Instinctivement, je regardai prudemment autour de moi, n'arrivant pas à croire ce que j'étais en train de faire. Mon cœur battit à tout rompre, je m'aventurai sur un terrain dangereux. Je n'imaginai même pas comment Faïz réagirait s'il se doutait un seul instant de ma mauvaise initiative, il me tuerait certainement sur place, désapprouvant mon comportement.

Une fois, j'appuie juste une fois sur le clavier et j'arrête illico. Mon diable intérieur se battait avec ma bonne conscience.

Mon doigt effleura l'écran de l'iPhone et je vis apparaître à cet instant, le portrait de Rachelle. Un violent coup de poing vint s'écraser sur ma poitrine. Refroidie, je n'eus pas la force de continuer ce que j'avais commencé et préférai en rester là.

Je regardai à travers le hublot, mes larmes me montèrent aux yeux et pour une fois, je les autorisai à couler discrètement sur mes joues.

Je me revis avec David, Lexy et Asarys au Teagan ce mercredi midi, après le coup de fil de mon ami.

— Selon les rumeurs à l'université, personne ne sait si c'est lui ou elle qui aurait souhaité mettre un terme à leur relation, conclut David sur le sujet.

Nous étions toutes trois pendues à ses lèvres.

— C'est sûr que tu dois y être pour quelques choses, s'enquit Lexy en s'adressant à moi.

— Il a peut-être tout simplement enfin ouvert les yeux, répliqua Asarys avec une joie non dissimulée.

— J'ai peur d'espérer ce que je ne devrais pas. Ça fait je ne sais combien de fois que je dis que je vais tourner la page sur cet homme.

— Non, ne tourne pas la page, change juste de chapitre, persista Lexy en essayant de me convaincre de ne pas renoncer à lui.

— Tu as croisé Rachelle sur le campus ? demandai-je à David.

— Oh oui, la pauvre. J'avoue que ce n'est plus que l'ombre d'elle-même. Le constat est plutôt terrifiant.

Cette nouvelle ne me ravit pas. Bizarrement je fus peinée pour elle, malgré ce qu'on pouvait bien ressentir l'une pour l'autre. Nous aimions toutes les deux le même homme et je ne pus m'empêcher de me mettre à sa place.

— Attends, ne me dis pas que tu as du chagrin pour elle ? intervint Lexy en voyant l'expression de mon visage.

— Si, un peu, avouai-je. Il ne faut pas se réjouir ainsi du malheur d'autrui.

— Elle s'est bien réjouie elle, quand sa main t'est arrivée en pleine gueule ! s'insurgea Asarys, haussant les épaules tout en buvant son diabolo fraise, ce qui ne manqua pas de faire exploser de rire David et Lexy.

J'aurais aimé être avec eux en ce moment. Asarys aurait trouvé les bons mots tandis que Lexy aurait minimisé la situation. C'était fini entre eux, mais ses photos remplissaient les albums dans son smartphone. Je détestai le sentiment que je ressentis à cet instant et compris que c'était elle qui l'avait quitté.

Faïz me réveilla à notre arrivée. J'eus beaucoup de mal à émerger, mes paupières semblèrent si lourdes.

— Zoé, on doit y aller. Nous irons directement à l'hôtel si tu veux te reposer, insista-t-il tout en douceur.

— Non, ça va aller. Je préfère que nous nous rendions directement à Trac-Word. Donne-moi juste une minute.

L'avion s'était déjà vidé de ses passagers et nous étions les derniers à descendre. Les hôtesses alignées devant la porte de l'Airbus nous souhaitèrent un bon séjour. Toutes les six, hypnotisées par le charme de Faïz, ne m'accordèrent aucun regard.


Dark Faïz : Tout héros a sa légende [ Terminé ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant