Le Solstice d'été (HB 2)

30

Alessio

En s'enfuyant loin de moi, Chloé avait laissé son iPhone sur le canapé. Je le ramassai et gagnai la cuisine à mon tour.

« Tiens » dis-je à Chloé en lui tendant.

Elle le prit sans un mot, en évitant de me regarder dans les yeux. Je me perchai sur le plan de travail le plus proche, à côté d'un plateau de crudités.

« Merci de faire le taboulé, ma puce, dit Maman en souriant à Chloé.

─ Pas de souci, Sophie. Ça me fait plaisir. »

Maman lui fit un grand sourire complice. Chloé et elle s'étaient toujours bien entendues. En fait, Maman l'adorait. Quand Chloé n'était pas là, elle disait qu'elle était « vraiment jolie et très bien élevée ». Ce qui n'était pas faux. Un moment, je les écoutai se parler et rire et me dis que c'était sympa, que ça me faisait plaisir.

J'aurais tellement aimé que Maman soit aussi complice avec...

Bref.

« Maman, je vais vous aider à mettre la table », dis-je en prenant une tomate cerise sur le plateau près de moi.

Elle haussa un sourcil dubitatif, et Chloé pouffa de rire.

« Nous aider, toi ? Avec quoi ? Entre ton bras dans le plâtre et tes côtes cassées, je préfère encore que tu ne touches à rien, avant de faire une gaffe. Laisse-nous faire, hein ?

─ Puisque tu insistes, je vais pas vous déranger, hein... » commentai-je, avec malice.

Je jetai la tomate cerise en l'air, renversai la tête en arrière et la gobai goulûment. Lorsque je tendis la main pour prendre un bout de céleri, je vis que Chloé s'était arrêtée de cuisiner et me regardait en se mordillant la lèvre inférieure. Ben quoi... ?

Puis je compris. Oh ! Elle me trouvait mignon, c'est ça ? A croire que le moindre de mes gestes la troublait. J'avais la faiblesse d'aimer bien ça, en plus.

« Tes cheveux deviennent beaucoup trop longs, me dit Maman en passant devant moi pour ouvrir le tiroir à couverts. J'aurais préféré que tu les fasses couper avant que les Lurier ne viennent. Dis-lui, Chloé, ma chérie. Tu ne les trouves pas trop longs, les cheveux d'Alessio ?

─ Oui, Chloé, ma chérie, tu les trouves pas trop longs, mes cheveux ? » répétai-je avec malice.

Je dévisageai Chloé, amusé, la mettant silencieusement au défi de répondre que je n'étais pas présentable. Elle rosit joliment, baissa les yeux sur le saladier dont elle avait recommencé à mélanger le contenu.

« Heu... je les préfère plus courts que ça, moi aussi. »

Hein ? C'était quoi cette trahison ? Je me mis à rire.

« N'importe quoi, vous deux. Ils sont très bien, mes cheveux, dis-je en y passant une main paresseuse.

─ Ils bouclent dans tous les sens quand tu les laisses trop pousser, ta frange dépasse tes sourcils, ça fait négligé, dit Maman d'un ton sans appel. Demain, tu vas chez le coiffeur.

─ Roooh ! Oui, chef. »

Maman me jeta un regard moralisateur. Je déposai un baiser sur sa joue. Elle sourit et sortit de la cuisine. Lorsque Chloé passa près de moi à son tour, armée de son saladier, je tendis la jambe pour l'arrêter. Elle fixa mon pied pourvu d'une chaussette blanche, l'air un peu énervé.

« Qu'est-ce qu'il y a ? demanda-t-elle.

─ Rien. Je veux juste t'aider. Donne-moi ça. »

Je sautai de mon perchoir et lui pris le saladier de ma main libre. Sans un mot, elle me le céda.