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Daniela

 Yann, le chanteur, excitait la foule en l'incitant à répéter certains vers de la chanson, micro tendu vers elle. Avec émotion, je repensai brièvement à Rubén. Il aurait enflammé le public, lui aussi. Il était doué. Une voix en or.

Je n'étais pas triste, en me faisant cette réflexion. Juste nostalgique.

Ca faisait trois mois maintenant que je n'avais pas ressenti le besoin d'écouter son album.

***

Niki tenait la buvette, qui ne manquait pas de clients.

Après elle, c'était mon tour.

Je pris mon service, comme à l'ancienne, à Starbucks.

Vers 22 heures, Alejandro vint me glisser à l'oreille qu'on était sold-out. Je cognai affectueusement mon poing contre le sien, ravie. On avait vendu tous les tickets. Incroyable !

Il y avait un monde fou, plus que prévu. J'étais trop contente. Au début, le père de Lula avait fait un petit discours, puis Lula m'avait appelée sur scène pour que je présente le groupe.

Je m'étais précipitée, le cœur battant non pas de parler à une foule, mais à l'idée de devoir parler à une foule où Alessio se trouvait. Sans parler de revenir non loin de lui juste après mon speech.

Pour le moment, nous n'étions pas ensemble. Il me laissait travailler. En fait, il ne m'adressait plus la parole depuis tout à l'heure... Ca me rendait un peu amère. Son sourire malicieux me manquait déjà.

Je savais qu'il s'en voulait pour son éclat avec Lula. On ne peut pas dire que je ne lui en voulais pas, moi, je n'avais jamais aimé qu'il fasse usage de ses poings si vite, mais... je savais qu'il n'avait jamais voulu gâcher mon évènement. D'ailleurs tout se déroulait à merveille.

Au fond, j'étais rassurée. Ses sentiments étaient toujours les mêmes.

Je m'en voulais un peu de ressentir ce soulagement. J'étais censée avancer. C'est pour cela que dès qu'il était arrivé à Rio, je lui avais dit que je voulais qu'il me laisse de l'espace.

Je tournai la tête pour voir qu'Alessio parlait toujours avec Alejandro.

Depuis qu'Alessio avait rencontré Lula, l'ambiance relativement joyeuse et taquine entre nous avait disparu. Je sentais clairement qu'il m'en voulait lorsqu'il me regardait. Oh, il m'en voulait tellement !

En tout cas, le groupe était bon et la foule massée devant l'estrade vraiment excitée.

Je servis moult boissons et sandwiches avant de m'autoriser un petit répit.

Je pris une canette de Coca dans le frigo - gratuite, hein - et la décapsulai.

Esteban avait rejoint Alessio et Alejandro. J'étais surélevée, dans le cabanon qui tenait lieu de buvette, et les voyais très bien.

Alejandro travaillait à la fois pour Guiomar et pour Escolinha, c'était un élément « volant ». Il avait vingt-sept ans, comme moi. Esteban était un de mes bénévoles, âgé de vingt ans seulement, ce qui était proche de l'âge d'Alessio. Lequel Alessio s'était montré souriant et agréable avec tout le monde, et j'étais agréablement surprise de la façon dont se déroulait cet aspect des choses.

Je pensais qu'il serait peut-être intimidé par tous ces Brésiliens plus âgés que lui – un Brésilien, ça rigole fort, et ça parle encore plus fort - ou par le fait de devoir parler anglais non-stop, mais pas du tout. A vrai dire, Alessio avait toujours été assez à l'aise en société. Il n'était pas timide, plutôt sûr de lui. J'aimais bien ça chez lui. Je trouvais ça séduisant, chez un homme, l'assurance, comme beaucoup.

Le Solstice d'été (HB 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant