Le Solstice d'été (HB 2)

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Alessio

  Jules et Antoine avaient bien voulu descendre la piste rouge avec moi, mais pas recommencer. Ça ne me dérangeait pas. Au contraire, c'était cool d'être seul, sous l'infini du ciel chargé de nuages gris, avec la piste enneigée à perte de vue.

Il n'y avait pas grand monde ce jour-là. J'étais tranquille.

Le chuintement de la poudreuse glacée sous ma planche était génial. J'avisai une butte enneigée et la pris de côté pour faire un 360. Vibrations, soubresauts ; réception nickelle !

Alors que je slalomais paresseusement, enchainant les frontsides, je vis un éclair blanc derrière les sapins ; je tournai la tête. Un autre rider était apparu, tout de blanc vêtu.

Lorsque j'exécutai un method grab pour passer un obstacle, il en fit un aussi. Un butter nose roll ? Lui aussi. Oh... tu veux jouer à ça ?

Je fis un rail sur une vieille planche à moitié couverte de neige, enchaînai avec un trick plus costaud que je maîtrisais depuis la saison dernière : un backflip, qui était exactement la même chose que faire un saut périlleux arrière à la piscine ou sur un bon vieux trampoline. Il m'imita à la perfection. Wahou ! Bien joué. Il me rattrapa alors que je m'arrêtais près d'un énorme sapin chargé de neige et retira son casque et ses lunettes.

C'était Emilie, évidemment. Elle secoua ses longs cheveux châtains et me sourit, une lueur que je connaissais bien au fond de ses yeux noisette. Elle me voulait. On aurait dit une poupée, avec ses joues rosies par le froid et ses cils interminables.

« T'es plutôt pas mauvais, Alessio, commenta-t-elle d'un air aguicheur, une pointe d'insolence sexy dans la voix.

─ Je peux te retourner le compliment, Emilie » répliquai-je avec un sourire en coin.

Je l'attrapai par sa combi et nous tombâmes au sol, nos membres entremêlés. Riant, on roula dans la neige comme des gamins. Emilie se retrouva au-dessus et s'assit sur moi. Je relevai mes lunettes sur mon bonnet pour mieux la voir.

Elle me sourit.

« Tu participes au concours de Snowboard, demain ?

─ Ouais, dis-je. Toi aussi j'imagine ?

─ Je suis censée travailler, mais faut voir. Je peux toujours m'échapper.

─ Echappe-toi, alors ».

Elle se mordit la lèvre inférieure alors que je posais ma main gantée sur sa joue.

« Sinon, t'es seul ? Pas de petite copine ?

─ Totalement seul, confirmai-je avec un pincement au cœur qui me prit au dépourvu.

─ Génial. »

Lorsqu'elle se pencha pour m'embrasser, ses cheveux retombèrent autour de nos visages.

Rideau.

Ouais, c'était exactement ça. J'étais seul. J'avais largué Daniela et elle m'avait elle-même largué en quittant carrément la France.

Je n'avais pas vu ça venir. C'était bien joué, Dani.

Je sentis une pointe désagréable érafler mon âme et reconnus immédiatement la sensation.

Le manque d'elle.

« C'est parti » me dis-je.

C'était maintenant qu'il allait falloir faire très, très attention.

« Viens, on va se trouver un coin tranquille » susurra Emilie en caressant le bout de mon nez avec le sien.

Oh, tout ce que tu veux, baby.