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Alessio

─ Lula, Alessio, Alessio, Lula, dit Dani platement, un peu mal à l'aise.

Lula me tendit la main. Je la serrai trop fermement peut-être, sans lui sourire. Une menace à peine voilée, qui ne lui échappa pas. Je vis dans ses yeux verts qu'il avait compris immédiatement de quoi il retournait, qui j'étais, ce que je pensais de son existence, etc, etc.

Je crois que Dani avait bien remarqué qu'on se jaugeait mutuellement du regard. Du haut de mon mètre quatre-vingt-cinq, j'étais un petit plus grand que Lula, mais ce dernier était un chouïa plus costaud que moi.

Eh bien, ça ne m'empêcherait pas de l'emporter en cas de baston.

─ Bienvenue à Rio, me dit Lula, plutôt amicalement.

─ Merci, dis-je, glacial. Content d'être ici.

─ Ta bannière est bluffante, ajouta-t-il avec sincérité.

─ Merci, répétai-je, un peu déstabilisé par sa gentillesse.

─ Oh, c'est toi qui as dessiné l'affiche ? m'apostropha un des membres du groupe, tout sourires, et il fixa l'épingle nominative sur mon t-shirt. Elle est cool, mec. Je m'appelle Arros. Je dessine un peu, aussi, à côté de la musique.

─ Ah, c'est cool ! Salut ! Tu fais quoi, exactement ?

Nous échangeâmes trois mots sur nos techniques de travail. Je surveillais Dani et Lula du coin de l'œil. Je vis Lula dire quelque chose à Dani, lui montrer un truc sur son iPhone, puis se mettre à caresser machinalement le bas de son dos, par dessus le tissu de sa robe.

Voir cette proximité entre eux me coupa la respiration. Une espèce de panique monta en moi, venue d'on ne sait où. Mais bordel mais qu'est-ce qu'elle attendait pour lui dire d'aller se faire foutre ?!

Dani vit que j'avais remarqué son geste. Discrètement, elle immobilisa la main de Lula et se décala d'un pas vers moi pour être hors de sa portée.

Je me remis à respirer.

Mais je n'aimais pas ça.

Je n'aimais pas ça du tout.

Je m'aperçus que je respirais trop vite.

« Calme-toi, Alessio, calme-toi, me dis-je à moi-même. Mets de l'eau dans ton vin, putain ».

─ Je dois y aller, mec, mais c'était cool de te rencontrer, dit Arros avant de retourner à ses essais son.

─ Pour moi aussi. Bon courage pour le concert, lui dis-je distraitement.

Je n'aimais pas du tout la façon dont Lula parlait doucement à Dani. Encore moins celle dont elle lui répondait, écoutant attentivement, la tête penchée vers lui. Ils avaient l'air de très bien s'entendre. Ca se voyait qu'il était gentil et respectueux avec elle.

Le petit ami idéal, j'imagine.

Il lui dit quelque chose, et elle rit. C'est là que quelque chose se brisa en moi. La moutarde me monta au nez.

Dani n'avait pas fait d'efforts pour me garder dans sa vie, et maintenant, je la retrouvais prête à en faire pour le premier con qui attirait son attention. Que ce soit Lula, ou quelqu'un d'autre. J'avais le net sentiment d'avoir été floué.

Bien comme il faut.

Voilà que je me rappelais, avec une netteté cristalline, comme j'en voulais à Dani d'avoir saboté notre relation. Notre nous-deux.

Comme je lui en voulais d'être partie loin en me laissant seul.

Comme je lui en voulais d'avoir monté tout une entreprise sans jamais m'en parler une seule fois.

Le Solstice d'été (HB 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant