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Daniela


Je ne m'attardai pas chez Niki. J'avais besoin d'être seule, et en plus, je ne voulais pas la déranger. Son petit ami allait passer le reste de la semaine chez elle.

Le lendemain, lundi, c'était le jour où Fábio me questionna sur la démission de Lula. J'allai droit à l'association, sans passer par ma chambre d'hôtel. J'avais loué dans une petite pension pour une semaine.

Il était hors de question de retourner chez ma mère.

Puis Paol me tomba dessus, folle de rage, lorsqu'elle apprit que Lula était parti, ce même-jour à 11 heures.

─ Qu'est-ce que tu as fait ?! cria-t-elle, furieuse, en guise de bonjour. Tu as forcément fait quelque chose pour qu'il parte, comme ça, du jour au lendemain.

Je ne devais plus mentir, plus cacher des choses. Je baissai les yeux. Elle comprit aussitôt et fondit en larmes.

─ J'en étais sûre ! Tu es tellement égoïste ! Je t'avais prévenue ! Je t'avais dit que je tenais à lui. Tu m'as dit que tu étais contente pour moi, et voilà, Dani l'égoïste frappe encore ! Pour toi ce n'est qu'un pansement, hein ?

Je la pris par le bras et l'entraînai dans la cuisine, pour éviter que tout l'open-space ne profite de notre conversation.

─ Non, justement, lui dis-je je le respecte trop pour l'utiliser comme ça. Et je t'ai dit que je tenais à lui moi aussi, Paol. Je suis désolée, je...

─ Ferme-la ! cria-t-elle. Le monde ne tourne pas autour de toi, Dani. Tu n'en fais qu'à ta tête. D'abord tu me piques Anton, putain Dani, ça m'a tuée. Anton, quoi ! Et maintenant à cause de toi, Lula ne veut rien avoir à faire avec moi. Tu ne sais pas t'arrêter.

Elle me tourna le dos. Elle pleurait à chaudes larmes. Je la touchai à l'épaule, mais elle fit volte-face et m'asséna une gifle retentissante. J'en restai bouche bée, la main collée à ma joue.

─ Je te déteste, cracha-t-elle.

Je m'efforçai de refermer la bouche. Paol tremblait de rage.

─ Tu as raison, dis-je calmement, je... Je mérite ta colère. Tu m'avais prévenue. Je n'ai même pas pensé à toi. J'ai pas réfléchi. Tout s'est passé vite, je... C'était l'instant, c'était... le moment.

─ Tu t'es servie, bien sûr ! C'est tellement facile, pour toi ! Tu pouvais pas te mettre en relation longue avec Alessio comme je te l'ai demandé ?!

La chose à ne pas dire. Le nom à ne pas prononcer. J'explosai à ma tour.

─ Ne parle pas d'Alessio ! m'écriai-je. Ne prononce pas son nom, pas lui. Tout ça, c'est de ta faute, Paolina. C'est toi qui l'as ramené ici. C'est à cause de ça que je ne sais plus où j'en suis. Tu ne peux t'en prendre qu'à toi-même, Paol. Et si tu veux savoir, quand tu lui as dit que je tenais à Lula, Alessio m'a conseillé de sortir avec lui. Ce sont juste tes agissements. C'était pas ce que tu voulais, hein ? Ben voilà, on peut pas prévoir comment les gens vont réagir, arrête de manipuler tout le monde !

Paol poussa un rugissement hargneux.

─ C'est pas parce que tu as perdu Rubén que tu dois tout te permettre. On souffre tous de quelque chose. Descends de ton piédestal, merde, Daniela !

─ Mais bon sang je suis sur aucun piédestal !! C'est toi qui m'y as mise, toujours à m'en vouloir pour quelque chose ! Tu veux la vérité ? Si quelque chose chez toi te déplait, change-le, ou accepte-le. Tu veux maigrir ? Fais un putain de régime. (Paol sursauta, l'air ébranlé). Tu veux un mec ? Fais en sorte de le garder. Arrête de rejeter la faute sur moi. Je suis pas ton souffre-douleur, Paol.

─ Tu m'as piqué Anton, dit Paol, les larmes aux yeux. Tu m'as volé mon Anton et tu m'as jamais présenté d'excuses pour ça. Jamais. T'as jamais demandé pardon ! C'était mon premier amour, putain, mon premier tout, et toi tu... T'es tellement égoïste !

Ma colère retomba aussi vite qu'elle était montée, tandis que la culpabilité prenait sa place.

A vrai dire, j'avais totalement oublié cette vieille histoire. Anton ! Je me souvenais de lui, bien sûr.

 Il était mignon. Il n'arrêtait pas de me regarder et de me faire des petites remarques taquines quand je le croisais dans les couloirs du lycée. Il sortait avec Paol, mais à l'époque, je m'en moquais. Le plus d'attention masculine, le mieux. Je l'avais laissé m'embrasser. On avait même fait plus que ça, à vrai dire. Paol avait fini par l'apprendre. Elle l'avait quitté, et ne m'avait pas adressé la parole pendant deux ans. Mais j'avais mis ça sur le compte de mon voyage à Paris, où j'allais rester des années durant. La distance, quoi. Je ne pensais pas qu'elle me tenait vraiment rancœur pour Anton...

Peut-être parce que je ne m'attachais à personne, j'avais pensé que ce n'était pas grave, qu'elle ne l'aimait peut-être pas... ô combien avais-je eu tort, réalisai-je avec un pincement au cœur.

─ Je te demande pardon, soufflai-je du ton le plus sincère que j'étais capable d'employer. Je te demande pardon, Paolina. J'ai mal agi, je le reconnais. J'étais stupide, Paol, j'avais peur, je me sentais seule. Ca n'excuse rien, mais je regrette vraiment de t'avoir fait du mal, aujourd'hui. Est-ce que... est-ce que tu peux trouver la force en toi de me pardonner un jour ?

Paol me regarda, la lèvre tremblante, ses yeux noirs baignés de larmes, et sans répondre, elle sortit de la cuisine et quitta l'association.

Je savais qu'on ne la reverrait pas de la journée.

A vrai dire, j'étais dans un tel état de nerfs que je partirais bien, moi-même, mais je n'allais pas lâcher ma propre équipe.

Fábio m'aurait tuée.

Le Solstice d'été (HB 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant