27. Cher journal... (réécriture)

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Hier, les billetteries pour la tournée internationale ont été ouvertes

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Hier, les billetteries pour la tournée internationale ont été ouvertes. Les plates-formes ont été prises d'assaut par mes fans. Deux heures après le lancement, toutes les places pour Atlanta, Paris et Londres ont été vendues. Je ne parle même pas des dates japonaises, elles se sont arrachées en moins d'une demi-heure.

La logique voudrait que la nouvelle m'emplisse de joie. C'est bien le cas, mais les mots de Gong forment un désagréable mantra dans ma cervelle : « Tu vas enfin savoir si tu es vraiment fait pour ce métier », « Tu vas enfin savoir si tu es vraiment fait pour ce métier », « Tu vas enfin savoir si tu es vraiment fait pour ce métier ».

N'aurait-il pas pu me dire : « Tout le monde va enfin savoir que tu es fait pour ce métier. » ? N'était-ce pas son rôle de manager de me rassurer, son rôle d'ami ?

Depuis l'annonce de cette tournée, peut-être même depuis le succès de Crazy love, j'ai l'impression de perdre un à un tous mes alliés. Les personnes qui croyaient en moi, qui me répétaient que j'avais du talent et que j'allais percer ; aujourd'hui, ces mêmes personnes me mettent en garde contre la versatilité des foules et la fatigue. Elles me disent de faire attention à ne pas me laisser emporter par les sirènes du succès. Il faudrait que je garde les pieds sur terre. Elles prétendent que j'ai changé.

La prudence de mon entourage me décourage de plus en plus. Je voudrais que l'on croie davantage en moi, surtout en ce moment. Comment pourrais-je réussir à conserver toute ma confiance en moi, si mêmes les personnes qui me sont le plus proche doutent de moi et de ma réussite ?

J'avais besoin de parler de cette tournée qui se concrétise, besoin d'entendre quelqu'un me féliciter et me rassurer. J'ai commencé par appeler ma mère. Je ne sais pas à quoi je m'attendais ! Sérieusement. J'aurais pu prévoir sa réaction. Ma mère n'a jamais totalement approuvé mon choix de carrière. Pour elle, si je ne porte ni cravate ni treillis militaire, je n'exerce pas un vrai métier. Elle ne m'a jamais pardonné le jour où j'ai quitté l'Université de Séoul, cette grande université prestigieuse, pour devenir le premier trainee d'une agence encore inconnue. Le succès de Crazy love a mis fin à ses reproches, mais j'attends encore le jour où je pourrai l'entendre me dire qu'elle est fière de moi et des choix que j'ai pu faire.

— Maman, c'est Minsuk, ai-je dit en l'appelant. Comment vas-tu ?

Elle s'est alors mise à parler d'elle. Je suis peut-être égoïste, son discours ne m'a pas intéressé. Sa vie est toujours la même. J'avais envie de lui couper la parole, pour lui parler de moi. Bien sûr, je ne l'ai pas fait. Elle m'a parlé de fuite d'eau et de plombier injoignable, de chat perdu, de literie qu'il faudrait changer, du dernier épisode du drama à l'eau de rose qu'elle regarde tous les mercredis soir. Au terme de son palabre, elle m'a demandé comme j'allais, moi. Sur un ton enthousiaste, je lui ai parlé des billets pour les concerts qui se vendaient très bien.

— C'est une bonne nouvelle, m'a-t-elle dit. Et je me suis renseignée, savais-tu qu'une tournée hors de la Corée du Sud, au Japon par exemple, rapporte davantage d'argent ? Un artiste coréen gagne plus en un mois de tournée à l'international, qu'en un an sur notre territoire... À propos, je me suis renseignée. Savais-tu que Crazy love s'était vendu à 800 000 exemplaires ?

Elle s'était donc intéressée à moi. Je me suis senti si fier à ce moment-là.

— Oui, je suis au courant.

— Quel est ton pourcentage sur les ventes de disques ?

Ma fierté est soudainement retombée. Était-elle fière de moi ou seulement intéressée ?

— S'il te plait, je n'ai pas envie de parler de ça avec toi ce soir. Cela devient tellement sérieux. Je voulais t'annoncer une bonne nouvelle.

— Oui, c'est une bonne nouvelle. Mais j'ai une fuite d'eau et la dernière facture a été très importante. Les temps sont durs, j'aurais besoin que tu me rembourses ce que tu me dois.

— Ce sera bientôt. J'imagine que ce sera bientôt.

— Bientôt quand ?

— Je l'ignore.

— Demande à ton manager ! Demande à ton patron ! Demande quand ils ont l'intention de te verser l'argent pour les 800 000 albums !

— Je le ferai, ai-je menti pour avoir la paix.

Lorsque j'ai raccroché, quelques minutes plus tard, j'avais toujours en moi cette sensation de stress et de doute. J'ai pris la décision d'appeler Minhok. Je lui répète la nouvelle et il me dit :

— Je sais, je suis au courant. Je regarde tes V-lives.

J'avais, en effet, fait un V-live dans la matinée, pour remercier les fans de m'avoir suivi avec tant de passion. Il y avait un peu de sécheresse dans la voix de Minhok, une amertume qui m'a surpris.

— Tu sais pourquoi je regarde tes V-lives ?

— Non.

— Ils me donnent l'impression d'être avec toi.

Il a laissé courir un silence entre nous. Il attendait peut-être une réaction de ma part. Je n'ai rien osé dire, je m'étais vidé de tous mes mots.

— Cette tournée, elle sera longue ?

— Peut-être quatre mois.

— Quatre mois, a-t-il répété dans une sorte de chuchotement.

— Tu sais que j'ai toujours rêvé de ça.

— Je sais... je suis heureux pour toi... vraiment.

N'importe qui aurait compris qu'il se forçait.

— Tu penses qu'on pourra se voir avant ?

— Oui... sûrement.

Après ces appels, un sentiment de déception me colle à l'âme. Je n'ai pas l'impression d'avoir obtenu beaucoup de soutiens, au lieu de ça, je vais devoir honorer des obligations supplémentaires : éclaircir ma situation financière pour rassurer ma mère et faire en sorte de voir Minhok. Et dire que j'étais allé quérir un amour inconditionnel, un amour sans contrepartie. Au moins j'aurais appris que ma mère s'intéresse enfin à ma carrière et que je manque à mon frangin autant qu'il me manque.

Je me sens accablé.

Le remède que j'emploie dans ces cas-là est d'ouvrir quelques-unes des lettres de fans fraichement parvenues à l'agence et triées par mon manager. Ce soir, je vais lire ces mots de dévotions, d'admiration et de tendresse et je vais les laisser me rappeler ce que je suis capable d'inspirer, ce pour quoi je me donne tant de peine.

Pour MinsukOù les histoires vivent. Découvrez maintenant