POV Jordan :
La soirée du débat s'était conclue, et le tumulte médiatique s'estompait peu à peu, mais pas le tourbillon d'émotions en moi. Assis seul dans mon bureau, je revivais chaque instant, chaque parole échangée, et surtout, chaque regard blessé d'Orane. Cette pique que j'avais lancée, la rabaissant sur un sujet sensible, n'avait pas seulement été une manœuvre politique, mais aussi une trahison de notre lien. Elle n’avait rien vu venir, et je n'étais même pas sûr de comprendre pourquoi j'avais été si sévère. Peut-être par peur de ne pas être à la hauteur des attentes de Marine, ou peut-être parce que j'étais en train de perdre le contrôle de mes propres émotions.
Le silence de la pièce était troublé par le bourdonnement lointain des activités nocturnes de la ville. Une vibration de mon téléphone me ramena à la réalité. Un autre message de Marine, cette fois plus direct : "Continue sur cette voie, elle est déstabilisée. Ne relâche pas la pression."
Je laissai échapper un soupir, appuyai ma tête contre le dossier de ma chaise, fixant le plafond. Qu'est-ce que je faisais vraiment ici ? Chaque mouvement que je faisais semblait calculé, non pour ce que je ressentais, mais pour ce que je devais faire. Marine était une stratège hors pair, elle savait comment pousser les gens à bout pour obtenir ce qu'elle voulait. Et moi, j'étais une pièce sur son échiquier, jouant un rôle qu'elle avait défini pour moi. Mais chaque jour, ce rôle devenait plus difficile à endosser.
Marine fit irruption dans la pièce, sa présence imposante remplissant l'espace. Elle s'approcha de moi avec ce sourire contrôlé, celui qui disait qu'elle savait toujours mieux. "Jordan, tu t'en es bien sorti ce soir. C'était exactement ce qu'il fallait."
Je me redressai, tentant de masquer mon malaise. "Je ne suis pas sûr, Marine. On pourrait se concentrer sur nos propositions, sur ce que nous voulons faire, plutôt que sur ces attaques personnelles."
Son regard devint perçant, ses traits se durcirent. "Ne sois pas naïf. La politique est une guerre, et dans la guerre, tous les coups sont permis. Orane est forte, mais nous devons la montrer faible, vulnérable. C'est notre seule chance de la battre."
Je sentis une froideur s'installer entre nous. Marine était impitoyable, c'était son meilleur atout, mais aussi ce qui me faisait douter d'elle. Elle avait toujours eu une vision claire de ce qu'elle voulait pour moi, pour nous, et elle avait été une alliée précieuse. Pourtant, à cet instant, je me demandai si je n'avais pas vendu mon âme pour atteindre ces objectifs.
"Orane n'est pas seulement une adversaire," répliquai-je doucement, presque pour moi-même.
Marine haussa les sourcils, un sourire ironique se dessinant sur ses lèvres. "Tu crois vraiment qu'elle voit les choses différemment ? Elle est prête à tout pour gagner, tout comme toi. Ne te fais pas d'illusions. Ce que vous avez en dehors de cette campagne, ce n'est rien d'autre qu'une distraction."
Ces mots me frappèrent de plein fouet. Marine, en dépit de son pragmatisme, avait raison sur un point : en politique, les relations personnelles sont souvent des pions à manipuler. Pourtant, je savais au fond de moi que ce que je ressentais pour Orane n'était pas une simple distraction. C'était quelque chose de réel, de tangible, même si c'était dangereusement enchevêtré dans notre compétition.
Après le départ de Marine, je restai assis là, regardant les lumières de la ville. Mon esprit était un maelström de doutes et de certitudes fragiles. Je savais que je devais parler à Orane, essayer de lui expliquer, de lui dire que mes attaques n'étaient pas personnelles, même si elles l'avaient profondément touchée. Mais chaque fois que je pensais à le faire, quelque chose me retenait. Était-ce la peur de la vérité ? La peur de voir son regard se détourner de moi, définitivement ?
L'interphone de mon bureau bourdonna. Mon assistant m'informait que Marine souhaitait me voir de nouveau. Je me levai, réajustai ma cravate, et pris une profonde inspiration. C'était le moment de décider si j'étais prêt à continuer sur cette voie, à jouer le rôle que Marine avait écrit pour moi, ou si j'étais prêt à tout risquer pour être honnête avec Orane.
Lorsque j'entrai dans la salle de réunion, Marine m'attendait, son sourire calculé toujours présent. "Jordan, nous devons finaliser notre stratégie pour la semaine prochaine. Il y a encore beaucoup de travail à faire."
Je hochai la tête, mais mon esprit était ailleurs. Je devais parler à Orane, et vite, avant que cette situation ne dégénère encore plus. Avant que je ne devienne ce politicien sans scrupules que Marine voulait que je sois, et que je m’éloigne irrémédiablement de la personne que je voulais être.
Après la réunion, je pris une décision. J'allais lui parler, lui dire la vérité, tout en sachant que cela pourrait tout changer, pour le meilleur ou pour le pire. Car au-delà des stratégies et des campagnes, il y avait des personnes, des émotions, et une réalité bien plus complexe que ce que Marine voulait croire. Ce soir-là, je sortis du QG avec une seule pensée en tête : retrouver Orane, la regarder dans les yeux, et être honnête, pour la première fois depuis longtemps.
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Passions et Politique
General FictionOrane Hoarau, une jeune femme pleine de passion et de détermination, se lance dans le monde complexe et tumultueux de la politique française. Aux côtés de Gabriel Attal, talentueux stratège du gouvernement, elle commence à apprendre les ficelles du...