Thé

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Quelques jours après l'appel téléphonique tendu avec Marine, je ressentais une étrange tranquillité mêlée à une inquiétude sous-jacente. Jordan et moi avions trouvé une harmonie fragile, malgré la pression extérieure. Nous avions réussi à maintenir notre complicité, mais je savais que cette paix était temporaire, une parenthèse dans un monde qui ne nous laisserait pas tranquilles.

Ce matin-là, je décidai de travailler dans un café discret, profitant de l'atmosphère tranquille pour organiser mes pensées et préparer quelques documents. La journée s'annonçait calme, mais cette illusion fut vite brisée. Alors que je savourais ma deuxième tasse de thé, une présence familière entra dans le café. Je levai les yeux pour voir Marine traverser la salle avec une assurance glaciale. Elle portait une tenue impeccablement élégante, sa démarche était calculée, et son regard acéré balaya la pièce avant de se poser sur moi. Son sourire était poli, mais dépourvu de chaleur.

"Orane," commença-t-elle en s'approchant, "quel plaisir inattendu." Elle s'installa en face de moi sans y être invitée, déposant son sac à main sur la table comme pour marquer son territoire.

"Marine," répondis-je en la regardant droit dans les yeux, masquant ma surprise par une apparente nonchalance. "Que me vaut cet honneur ?"

Elle croisa les jambes avec une élégance délibérée, posant ses mains manucurées sur ses genoux. "Je me disais qu'il était temps que nous ayons une petite discussion, toi et moi, sans interférences. Il y a des choses à clarifier."

Je savais exactement où elle voulait en venir, mais je refusais de lui montrer la moindre vulnérabilité. "Vraiment ? Et que souhaites-tu clarifier ?"

Son sourire s'élargit, mais ses yeux restaient froids. "Jordan, bien sûr. Et ta place dans sa vie." Elle s'interrompit, m'observant attentivement. "Je suis curieuse, Orane. Que cherches-tu vraiment à obtenir de lui ? Une romance éphémère ? Un tremplin pour quelque chose de plus grand ?"

Je gardai mon calme, mesurant mes mots. "Je ne vois pas pourquoi cela te préoccupe autant, Marine. Jordan et moi partageons quelque chose de réel et de sincère. Peut-être que c'est difficile à comprendre pour quelqu'un qui voit tout à travers le prisme du pouvoir et des calculs."

Elle émit un léger rire, dépourvu de joie. "Tu es si naïve," murmura-t-elle, un air de condescendance sur le visage. "Tu crois vraiment que tes sentiments suffiront ? Jordan est un homme d'ambition. Il a des responsabilités, une carrière à protéger. Toi, tu es une distraction, une étincelle fugace dans sa vie."

La pique était claire et visait à me déstabiliser, mais je ne cédai pas. "C'est amusant," répondis-je avec un sourire en coin. "J'ai l'impression que c'est toi qui es perturbée par notre relation, pas Jordan."

Le visage de Marine se durcit, perdant son sourire de façade. Elle se pencha légèrement en avant, ses yeux perçants se plissant d'une manière presque menaçante. "Tu n'as aucune idée de ce qui se joue ici, n'est-ce pas ? Jordan est un homme qui a besoin de stabilité, d'une partenaire capable de comprendre le jeu complexe qu'il joue. Et toi, tu n'es qu'un obstacle."

Je sentis la colère monter en moi, mais je la canalisai en une détermination froide. "Et tu te vois comme cette partenaire idéale, n'est-ce pas ? Celle qui sait jouer au jeu, qui contrôle tout ? Mais tu oublies une chose, Marine : Jordan est avec moi par choix. Il n'a pas besoin de quelqu'un pour le contrôler ou le manipuler."

Elle se redressa, son regard se faisant encore plus glacial. "Ne te méprends pas, Orane. Ce petit jeu ne durera pas. Jordan finira par se lasser. Les hommes comme lui cherchent la solidité, pas les complications. Tu es une distraction, et quand il se rendra compte que tu ne fais que l'empêcher de réaliser ses ambitions, il te laissera."

Je la fixai sans ciller. "Marine, tes tentatives de manipulation ne marchent pas sur moi. Je sais ce que je vaux, et je sais ce que Jordan voit en moi. Peut-être que tu as du mal à le comprendre, mais ça ne changera rien à ce que nous partageons."

Un silence pesant s'installa entre nous, un champ de bataille invisible où chaque mot, chaque geste, était une arme. Marine, sentant qu'elle n'avait pas l'avantage, décida d'attaquer sur un autre front. "Tu sais, Orane," dit-elle avec une fausse douceur, "Jordan a besoin de quelqu'un qui peut l'aider à atteindre ses objectifs, pas quelqu'un qui le freine. Et toi, avec ton manque d'expérience, tu n'es tout simplement pas à la hauteur."

Je sentis ma mâchoire se crisper, mais je refusai de lui donner cette satisfaction. "Jordan et moi formons une équipe. Nous nous soutenons mutuellement, et je ne suis pas là pour jouer à des jeux de pouvoir. Nous avons quelque chose de vrai, et c'est ce qui compte."

Elle ricana, un son dénué de toute joie. "Vraiment ? Et que feras-tu quand il se lassera de cette... passion ? Les flammes s'éteignent, Orane. Et il cherchera quelque chose de plus solide, de plus... professionnel."

Je pris une profonde inspiration, fixant Marine avec détermination. "Marine, tu as peut-être l'habitude de manipuler les gens autour de toi, de les faire entrer dans tes petits plans, mais Jordan n'est pas ton pion. Ni moi d'ailleurs. Nous savons ce que nous voulons, et ce n'est certainement pas de jouer à tes jeux tordus."

Marine se leva, ajustant sa veste avec une précision méticuleuse. "Très bien," dit-elle d'une voix douce mais tranchante. "Si tu crois vraiment pouvoir le retenir, alors bonne chance. Mais ne sois pas surprise quand tout cela s'écroulera. Tu n'es pas préparée pour le monde dans lequel il vit. Mais tu apprendras, à tes dépens."

Elle fit demi-tour, se dirigeant vers la sortie, mais je ne pouvais pas la laisser partir sans un dernier mot. "Marine," l'appelai-je, ma voix ferme et pleine de résolution. Elle s'arrêta, sans se retourner. "Jordan mérite quelqu'un qui le soutient pour qui il est, pas pour ce qu'il peut apporter. Et je suis prête à affronter toutes les tempêtes pour ça. Alors, continue tes jeux si ça t'amuse. Mais sache que je suis ici pour rester."

Marine ne répondit pas, mais je vis la tension dans ses épaules lorsqu'elle quitta le café. Elle était habituée à obtenir ce qu'elle voulait, à manipuler les autres pour arriver à ses fins. Mais cette fois, elle avait rencontré quelqu'un qui n'était pas prêt à se plier à ses caprices.

Je restai assise un moment, reprenant mon souffle. Cette confrontation m'avait laissé un goût amer, mais aussi une détermination renouvelée. Marine n'allait pas abandonner facilement, mais j'étais prête à me battre pour ce que Jordan et moi avions construit. Peu importe les jeux de pouvoir, les manigances ou les manipulations, je savais que l'amour et le respect que nous partagions étaient réels et solides.

Marine avait tenté de m'intimider, de me faire douter de moi-même et de ma place dans la vie de Jordan. Mais tout ce qu'elle avait réussi à faire, c'était renforcer ma détermination à rester à ses côtés. Le chemin serait sans doute semé d'embûches, mais j'étais prête à affronter n'importe quelle tempête. Pour Jordan, pour nous, et pour ce que nous avions de plus précieux : notre amour authentique, sans calculs ni faux-semblants.

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