Petite fille perdue

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J'attendais Jordan patiemment, coincée dans ma chambre d'hôpital, ressentant une sensation d'enfermement. L'accident, le stress constant de la campagne, tout se mélangeait dans ma tête, créant une confusion oppressante. Pourtant, une chose restait étonnamment claire : mes sentiments pour Jordan. Cette épreuve avait renforcé mes émotions, révélant à quel point il comptait pour moi. Malgré la pause que nous avions décidée, je ne pouvais ignorer combien il m'avait manqué.

Jordan arriva enfin, portant des vêtements légers et confortables, choisis avec soin. Sa sollicitude se reflétait dans chaque geste, une douceur qui me réchauffait le cœur. Il m'aida à enfiler un t-shirt, mes bras trop douloureux pour que je puisse le faire seule. Chaque mouvement tirait sur mes muscles endoloris, mais sa présence apaisante m'encourageait à supporter la douleur.

« Tu étais mignonne quand tu étais petite », dit-il avec un sourire en coin, alors qu'il ajustait le tissu sur mes épaules. Ses paroles me surprirent un instant, mais je compris rapidement qu'il parlait de la photo de moi enfant. Puis, comme un coup de tonnerre, le souvenir de cette photo sur mon lit et du mot qui l'accompagnait m'envahit. Mon cœur se serra à l'idée qu'il ait pu voir ce message menaçant. Qu'avait-il pu penser en le découvrant ?

Je luttais pour dissimuler ma panique, tentant de maintenir une façade de calme. Cependant, mon corps trahissait mon angoisse : mes doigts se crispaient sur les draps, mon esprit tourbillonnait de questions et de craintes. Comment pourrais-je expliquer cela sans éveiller plus de soupçons ? Lentement, je relâchai ma prise, priant pour que Jordan n'ait rien remarqué.

Il me tendit mon téléphone, et en voyant l'écran fissuré, les souvenirs de l'accident revinrent en force. Chaque détail semblait se graver dans mon esprit, rappelant la confusion et la peur de ce jour-là. Mon cœur battait plus fort, mais je restai stoïque, essayant de ne rien laisser paraître. Jordan semblait absorbé par ses propres pensées, ne remarquant pas ma nervosité.

Soudain, son téléphone sonna, et il sortit pour prendre l'appel. Je me retrouvai seule, tentant de reprendre mon souffle. Mais à peine avait-il quitté la pièce que mon téléphone vibra dans ma main. Un frisson glacé me parcourut alors que je découvrais un nouveau message de l'expéditeur, le harceleur qui me tourmentait depuis des semaines. Je déverrouillai l'écran, les mains tremblantes :

"Tu ne peux pas te cacher éternellement derrière tes souvenirs d'enfance. Ta vulnérabilité est une faiblesse que je connais bien. Tu es encore cette petite fille perdue, incapable de se protéger. Et tout le monde verra la vérité, même Jordan."

Ces mots me frappèrent comme une gifle. Ils n'étaient pas seulement une menace, mais aussi une intrusion brutale dans une partie de ma vie que j'avais toujours gardée secrète. Les souvenirs de mon enfance refirent surface avec une force accablante : les cris, les larmes, les disputes violentes entre mes parents. Oui, il y avait eu de l'amour, des moments de bonheur, mais aussi tant de souffrance. Les rires se changeaient souvent en cris, et les soirées paisibles se transformaient en chaos. Je me revoyais, petite fille, cachée sous les couvertures, terrorisée par les éclats de voix venant du salon. Cette période avait laissé des marques indélébiles, une vulnérabilité que je m'étais efforcée de dissimuler tout au long de ma vie d'adulte.

Que quelqu'un d'autre connaisse ces détails intimes, ces blessures profondes, était insupportable. Ce message n'était pas seulement une menace, c'était une mise à nu. Il m'exposait de la manière la plus cruelle possible, exploitant mes faiblesses pour me contrôler, pour me faire peur. Je ressentis une vague de panique, mon souffle se fit court. Je me ressaisis et effaçai rapidement le message. Jordan ne devait pas voir ça. Il ne devait pas savoir à quel point j'étais brisée, à quel point ces souvenirs me hantaient encore.

Jordan revint dans la chambre, et je fis de mon mieux pour paraître calme. Sa présence, bien que réconfortante, ne pouvait dissiper la terreur qui me rongeait de l'intérieur. Mais malgré le message de l'expéditeur, quelque chose en moi se détendit légèrement en le voyant. Jordan était là, avec moi, et cela suffisait à apaiser, même brièvement, le chaos intérieur. Je me levai doucement, chaque mouvement une épreuve douloureuse. Je me dirigeai vers lui, mes pas hésitants trahissant ma faiblesse physique.

Jordan me regarda, visiblement perplexe, alors que je m'approchai. Il semblait ne pas comprendre ce que je voulais faire. Avec une douceur infinie, je pris son visage entre mes mains et l'embrassai. Ce contact, cette proximité, c'était tout ce dont j'avais besoin à cet instant. Ses lèvres contre les miennes étaient un ancrage dans la réalité, une bouffée d'air frais dans cette atmosphère oppressante de peur et de stress. Jordan répondit à mon baiser avec une tendresse palpable. Ce n'était pas simplement un acte de désir, mais une affirmation de notre lien, de notre besoin l'un de l'autre.

Ce baiser était un refuge, un moment de pure connexion dans un océan de confusion et de terreur. À travers lui, je sentais la chaleur de son amour, le réconfort de sa présence. C'était comme un bouclier contre les ténèbres qui menaçaient de m'engloutir. Mais au fond de moi, je savais que cette paix était éphémère. Les menaces de l'expéditeur et les ombres de mon passé continuaient de planer au-dessus de moi, prêtes à resurgir à tout moment. Pourtant, pour cet instant précieux, je me permis de me perdre dans la tendresse de ce moment partagé, espérant que ce lien pourrait être notre force face aux défis à venir.

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