Jardin Du Ministère

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Après la réunion, je me précipitai dans le couloir, mon cœur battant encore trop fort, trop vite. Le silence qui régnait désormais autour de moi contrastait brutalement avec le tumulte intérieur qui menaçait de m'étouffer. La rencontre avec Jordan m'avait laissée dans un état de confusion totale, et je savais que je ne pouvais pas continuer ainsi.

Je m'éloignai rapidement de la salle de réunion, cherchant à mettre le plus de distance possible entre moi et cet espace saturé de tension. J'avais besoin de réfléchir, de reprendre mes esprits, mais chaque pas que je faisais me ramenait inexorablement vers les mêmes pensées obsédantes.

Je ne voulais pas rentrer chez moi, ni même retourner à mon bureau. L'idée de m'asseoir seule, de laisser mes pensées dériver librement, me terrifiait. Alors, je décidai de me rendre dans le petit jardin intérieur du ministère, un endroit calme où je pourrais essayer de trouver un semblant de paix.

Le jardin était désert, comme je l'espérais. Je m'assis sur un banc de pierre, les épaules affaissées par la fatigue émotionnelle. Le doux murmure de l'eau d'une petite fontaine, le bruissement des feuilles dans le vent léger, tout cela aurait dû m'apaiser, mais mes pensées tournaient en boucle, refusant de se calmer.

Jordan avait été si distant, si froid. Même lorsqu'il s'était enfin adressé à moi, ce n'était que pour me contredire, pour imposer une barrière supplémentaire entre nous. Pourquoi faisait-il ça ? Pourquoi refusait-il de me laisser entrer, de me permettre de comprendre ce qui se passait dans sa tête ?

Je pensais à lui sans cesse, malgré moi. Chaque détail de notre interaction me revenait en mémoire, chaque mot échangé résonnait en moi comme un écho douloureux. J'avais envie de le secouer, de lui crier dessus, de lui dire qu'il ne pouvait pas simplement m'ignorer, faire comme si tout cela n'avait jamais existé entre nous. Mais en même temps, je savais que ce n'était pas aussi simple.

Une ombre s'étendit sur moi, me tirant de mes pensées. Je levai les yeux pour voir Gabriel s'approcher. Son visage était empreint de cette préoccupation bienveillante qu'il arborait chaque fois qu'il s'agissait de moi. Il s'assit doucement à côté de moi, sans dire un mot au début, respectant mon besoin de silence.

« Orane, tu sais que tu n'es pas obligée de tout affronter seule, n'est-ce pas ? » finit-il par dire, sa voix basse et apaisante.

Je baissai la tête, fixant mes mains jointes sur mes genoux. « Je sais, Gabriel. Mais c'est... compliqué. »

Il hocha lentement la tête. « C'est toujours compliqué, avec ce genre de situation. Mais il y a des gens autour de toi qui tiennent à toi. Moi, par exemple. Et je ne veux pas te voir te perdre dans tout ça. »

« Je ne me perds pas », mentis-je doucement, même si nous savions tous les deux que ce n'était pas entièrement vrai.

Gabriel soupira, puis se pencha un peu vers moi. « Est-ce que tu as déjà pensé à lui parler, franchement ? À essayer de comprendre ce qui s'est passé entre vous ? »

Je secouai la tête, sentant les larmes me monter aux yeux. « Je ne sais même pas par où commencer, Gabriel. Il y a tant de non-dits, tant de malentendus. Et puis, je ne suis pas sûre qu'il veuille vraiment en parler. Il me repousse sans cesse, comme si... comme si je n'étais plus rien pour lui. »

Gabriel resta silencieux un moment, réfléchissant à ce qu'il pourrait dire pour m'aider. « Parfois, les gens repoussent ceux qu'ils aiment le plus parce qu'ils ont peur de ce qu'ils ressentent. Je ne connais pas tous les détails de ce qui se passe entre vous, mais je peux voir à quel point ça te fait souffrir. Tu devrais peut-être lui donner une chance de s'expliquer. »

Je laissai échapper un léger rire amer. « S'expliquer ? C'est Jordan. Il ne fait que se fermer, et chaque fois que j'essaie de m'approcher, il se referme encore plus. »

« Alors, il faut lui donner du temps », suggéra Gabriel, posant une main réconfortante sur mon épaule. « Peut-être qu'il a besoin de comprendre ce qu'il ressent avant de pouvoir te le dire. »

Je hochai la tête sans conviction. Je savais que Gabriel avait raison, mais l'idée de continuer à attendre, de rester dans cette situation incertaine, me paraissait insupportable. « Et s'il ne revient jamais vers moi ? S'il décide que c'est plus facile de m'oublier ? »

Gabriel serra légèrement mon épaule. « Alors, tu sauras que tu as tout fait pour le comprendre, pour sauver ce qui vous unissait. Mais je crois que Jordan n'est pas ce genre d'homme. Il a juste besoin de temps. »

Je soupirai profondément, sentant le poids de ses paroles. Gabriel avait toujours été là pour moi, un grand frère protecteur, et je savais qu'il ne me disait pas cela à la légère. Mais même avec tout son soutien, je ne pouvais m'empêcher de me sentir désespérément seule face à cette situation.

« Merci, Gabriel », dis-je finalement, reconnaissante pour sa présence. « Merci d'être là pour moi. »

« Toujours, Orane. Tu fais partie de ma famille, tu le sais. » Ses mots étaient remplis d'une chaleur sincère qui me réconforta un peu.

Nous restons assis en silence pendant un moment, simplement à profiter de la compagnie l'un de l'autre. Mais même si je me sentais un peu plus apaisée, la douleur de mon cœur brisé restait présente, me rappelant que le chemin vers la guérison serait long et difficile.

Alors que Gabriel se leva pour partir, je restai encore un peu, mes pensées toujours tournées vers Jordan. Que devais-je faire ? Laisser passer le temps, comme Gabriel le suggérait, ou essayer une fois de plus de briser cette barrière entre nous ? Une partie de moi savait que je ne pouvais pas continuer ainsi, mais l'autre craignait que toute tentative d'approche ne fasse qu'aggraver la situation.

Je me levai finalement, décidée à rentrer chez moi pour la journée. Peut-être qu'un peu de distance me permettrait de voir les choses plus clairement. Mais alors que je quittais le jardin, je savais que mes pensées resteraient prisonnières de cette situation, de cet amour perdu qui me consumait à petit feu.

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