Dans la pénombre

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Je me tenais prête, mon cœur battant à un rythme qui trahissait l’apparence de calme que j’essayais de projeter. La conférence de presse à venir était une manière de montrer au public que rien ne m’abattait, que j’étais toujours dévouée à ma mission, malgré les récents événements. Pourtant, sous cette façade de contrôle, une tempête faisait rage. Les menaces qui pesaient sur moi, l’accident qui avait failli me coûter la vie, tout cela pesait lourdement sur mes épaules.

Les journalistes se massaient dans la salle, leurs regards acérés braqués sur moi, prêts à décortiquer chaque mot, chaque geste. Le début de la conférence se déroula sans accroc, les questions sur mon état de santé affluant en premier, me permettant de naviguer en terrain connu. Mais je sentais la tension monter en moi à chaque nouvelle question, anticipant le moment où ils aborderaient des sujets plus personnels, notamment sur ma relation supposée avec Jordan.

Et ce moment arriva, inévitablement. Un journaliste leva la main, son regard perçant rencontrant le mien. Il posa la question que j’attendais, celle qui me fit l’effet d’une lame s’enfonçant lentement dans ma chair : « Madame Hoarau, pouvez-vous confirmer les rumeurs concernant votre relation avec Jordan ? »

Je pris une inspiration profonde, tentant de chasser le tremblement dans ma voix avant de répondre : « Ma vie privée ne concerne que moi et n’a pas lieu d’être débattue en public. » Mon ton était ferme, mais je sentais les fissures dans mon armure.

C’est alors qu’un autre journaliste, au sourire étrangement provocateur, prit la parole. Il aborda la réforme fiscale de Gabriel Attal avec une insistance inhabituelle, un sourire qui me donna la chair de poule. « Madame Hoarau, quels sont vos commentaires sur la réforme fiscale récemment proposée par Gabriel Attal ? » demanda-t-il, une lueur presque malveillante dans les yeux.

Mon estomac se noua instantanément. Et si c’était lui, l’expéditeur ? Le doute m’envahit, me paralysant l’espace d’un instant. Pourtant, la voix était différente de celle que j’avais entendue lors de cet appel glaçant après mon accident. Ou bien, étais-je simplement trop perturbée pour faire la distinction ?

Un silence s’abattit sur la salle, tous les regards fixés sur moi, attendant ma réponse. Les mots de l’expéditeur résonnaient dans mon esprit, m’ordonnant de saboter la réforme de Gabriel. La peur et l’incertitude se mêlaient, formant un nœud douloureux dans ma poitrine. Si je ne faisais pas ce qu’il demandait, qu’allait-il m’arriver ? Mais si je cédais, je trahirais mes convictions et mon équipe.

Le journaliste insista, d’un ton plus pressant : « Madame Hoarau ? Votre avis sur cette réforme ? »

Je fermai brièvement les yeux, tentant de calmer la panique qui montait en moi. Puis, dans un élan de défi, je pris la parole : « Je tiens à souligner les efforts remarquables de Gabriel Attal pour avoir proposé cette réforme fiscale. Elle représente un pas important vers l’équité et la justice sociale. »

Le journaliste resta un moment immobile, me fixant intensément. Puis, sans un mot de plus, il se leva et quitta la salle, laissant derrière lui une vague de murmures. Les autres journalistes continuèrent à poser leurs questions, mais mon esprit était ailleurs. Un léger trouble s’était installé en moi, une voix me chuchotant que je venais de franchir une ligne dangereuse.

Après la conférence, Gabriel Attal vint me féliciter pour ma prise de position. Je répondis par un sourire crispé, sachant que je venais de prendre un risque énorme. Jordan, de son côté, m’envoya un message de soutien, mais je savais qu’il comprendrait que quelque chose n’allait pas. La journée se déroula ensuite sans nouvelles de l’expéditeur, ce qui, loin de m’apaiser, ne fit qu’intensifier mon angoisse.

Le soir venu, je me dirigeai vers la maison de Jordan, espérant y trouver un peu de répit. La maison était calme, plongée dans une douce pénombre. Jordan n’était pas encore rentré, et j’entrai en silence, refermant la porte derrière moi. Le silence de la maison me semblait étrangement pesant, comme si quelque chose d’invisible se tapissait dans l’ombre, attendant son heure.

Alors que je me dirigeais vers le salon, une main puissante m’agrippa soudainement par derrière, me tirant en arrière avec une force brutale. Un cri s’étrangla dans ma gorge, étouffé par une autre main qui se plaqua fermement sur ma bouche. Mon cœur battait à tout rompre, une peur glaciale m’envahissant.

« Tu vas faire ce que je te dis maintenant, » susurra une voix contre mon oreille, froide et menaçante. Je sentis le souffle chaud de l’homme contre ma peau, et une vague de terreur pure m’envahit. « Tu vas prendre tes affaires, tes papiers, et rédiger une petite lettre. Et si tu cries… »

Je sentis quelque chose de dur et métallique contre mes côtes, et l’horreur de la situation me frappa de plein fouet. « Je n’hésiterai pas à tirer, » termina-t-il dans un murmure glacial.

Je luttais pour ne pas céder à la panique totale. Je reconnaissais cette voix maintenant. C’était la même que celle que j’avais entendue lors de mon accident, la voix de celui qui me traquait, qui voulait me détruire. Une arme était braquée sur moi, je pouvais la sentir, froide et implacable contre ma peau. Mes pensées se bousculaient, chaque fibre de mon être hurlant de terreur, mais je savais que je devais obéir pour avoir une chance de m’en sortir.

Tremblante, je me dirigeai vers le bureau, l’homme toujours collé à moi, son souffle rauque dans mon oreille. Mes mains tremblaient tellement que je peinais à attraper un stylo. « Dépêche-toi, » grogna-t-il, resserrant son étreinte sur moi.

Je commençai à rédiger la lettre sous ses ordres. Chaque mot me déchirait un peu plus, alors que j’écrivais ce qu’il me dictait, des mots de désespoir, de peur, une fausse confession qui laissait entendre que je comptais fuir, que je ne pouvais plus supporter la pression. Une lettre d’adieu pour Jordan, lui demandant de ne pas me chercher, de me laisser partir.

Mais au fond de moi, je savais que Jordan ne croirait pas à cette lettre. Il savait ce que je traversais, il connaissait les menaces, ce que cet homme ne savait probablement pas. Pourtant, alors que je signais la lettre, un doute s’installa. Et s’il pensait que c’était réellement ma décision ? Que je l’abandonnais ?

« Allez, maintenant on sort, » ordonna l’homme en me tirant violemment de ma chaise. Mon corps entier tremblait de peur et de colère impuissante. Il me força à sortir par l’arrière de la maison, où une voiture attendait, moteur allumé. Je jetai un regard désespéré autour de moi, cherchant une échappatoire, mais il n’y avait rien. Le quartier était silencieux, désert.

Je tentai de me débattre, de résister, de mordre, mais il était bien plus fort que moi. « Lâche-moi, espèce de salaud ! » criai-je, la panique prenant le dessus.

« Tais-toi, » grogna-t-il en me serrant plus fort. Je sentis quelque chose de froid contre ma peau, une aiguille de glace de pure terreur.

Avant que je ne puisse réagir, il sortit un chiffon imbibé d’un produit chimique et le pressa contre mon visage. J’essayai de me débattre, de crier, mais mes forces m’abandonnaient rapidement. L’odeur chimique m’envahit, m’étourdissant, et l’obscurité se referma sur moi, me plongeant dans l’inconscience totale, laissant derrière moi un monde où ma seule lueur d’espoir résidait en Jordan.

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