Salle De Bain

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J'ouvris doucement les yeux, tentant de m'acclimater à mon environnement. La lumière tamisée de la chambre d'hôpital filtrait à travers mes paupières mi-closes. La porte des toilettes, en face de moi, me rappela vaguement les événements précédents. En tournant la tête, je vis Jordan assoupi sur une chaise, juste à côté de mon lit. La simple vue de son visage endormi me bouleversa. Il était là, veillant sur moi. La dernière fois que nous nous étions parlés, c'était une dispute, brève mais lourde de conséquences. Je ne voulais pas le réveiller, alors je restai immobile, absorbant le réconfort inattendu de sa présence. Son visage, habituellement si serein, semblait marqué par l'inquiétude et la fatigue.

C’est le vrombissement de son téléphone qui le tira de son sommeil. Il se redressa brusquement, ses yeux se posant sur moi avec un mélange de soulagement et d'appréhension. Il s'approcha rapidement du lit, son regard scrutant chaque détail de mon visage.

"Orane, comment tu te sens ?" demanda-t-il, la voix teintée d'une inquiétude palpable.

"J’ai mal partout," répondis-je avec un petit sourire, essayant de minimiser la situation pour ne pas l'alarmer davantage. La douleur était omniprésente, sourde et lancinante, mais je voulais cacher l'ampleur de mon malaise. 

"Je me suis inquiété," avoua-t-il. "J'ai vu ta voiture aux infos... elle était dans un mauvais état." Son ton était grave, et je pouvais sentir le poids de ses mots. Un silence lourd s'installa entre nous. Je savais qu'il attendait une explication, mais comment lui dire la vérité ? La peur des représailles me paralysait. Je ne pouvais pas lui confier ce qui s'était vraiment passé, pas maintenant.

Heureusement, une infirmière entra à ce moment-là, brisant la tension palpable. Elle afficha un sourire de soulagement en me voyant réveillée, avant d'entraîner Jordan à l'écart pour discuter en privé. Leur conversation était un murmure indistinct, mais je savais qu'ils parlaient de mon état, des soins à venir. Mon esprit, malgré la confusion, commença à imaginer des scénarios, à anticiper les questions inévitables.

Lorsqu'il revint, je tentai de me redresser, une impulsion irréfléchie m'incitant à me lever. La pièce semblait se refermer sur moi, et j'avais besoin d'air, d'échapper à cette sensation de suffocation.

"Qu'est-ce que tu fais, Orane ? Reste allongée," ordonna-t-il doucement, mais avec fermeté.

"J’ai besoin de prendre une douche, j’ai trop chaud," murmurai-je, déterminée à retrouver un semblant de contrôle sur mon corps. La chaleur était insupportable, comme une couverture étouffante.

Il m'aida à me lever et me conduisit jusqu'à la salle de bain attenante. Là, il me laissa seule, fermant la porte derrière lui. J'entrepris de retirer mes vêtements, chaque mouvement une épreuve de volonté. La douleur, à chaque geste, me rappelait l'accident et ce que j'avais vécu. Devant la douche, je me battis pour ouvrir le robinet, mes mains tremblantes de faiblesse. Le savon, posé à côté, semblait un obstacle insurmontable. En essayant de l'ouvrir, mes nerfs lâchèrent. La frustration, l'épuisement, tout monta en moi comme une vague écrasante. 

"Jordan," appelai-je faiblement. Pas de réponse. J'essayai encore, ma voix se brisant un peu plus fort, "Jordan !" Cette fois, la porte s'ouvrit presque instantanément. Il me trouva là, nue et vulnérable, avec le flacon de savon dans les mains. Malgré notre intimité passée, une vague de gêne m'envahit. Me montrer ainsi, dans cet état de fragilité totale, était un rappel cruel de ma condition actuelle.

"Ça ne va pas ?" demanda-t-il, son regard perçant le voile de mes émotions. Je ne pouvais que hocher la tête, incapable de formuler une réponse.

Il comprit sans un mot. D'un geste, il prit son téléphone et appela quelqu'un, demandant des vêtements de rechange. Je l'observai avec une curiosité teintée de confusion. Des vêtements de rechange ? Pour qui ? Pour quoi ? Mon esprit tournait en rond, essayant de comprendre, alors qu'il commençait à se déshabiller. Il resta en caleçon, s'approchant de moi avec une délicatesse qui me fit presque mal.

"Qu'est-ce que tu fais, Jordan ?" Ma voix était un murmure d'incrédulité et de honte. J'étais tellement fragile, si exposée.

"Ne t’en fais pas, laisse-moi m'occuper de toi," répondit-il calmement, ses mots un baume sur ma douleur intérieure. Il prit le savon de mes mains, en versa un peu dans les siennes, et le fit mousser. Puis, il commença à laver mon corps avec une douceur infinie. Ses gestes étaient précis, respectueux, comme s'il craignait de me briser. Chaque contact était à la fois réconfortant et perturbant, un rappel de notre proximité passée et une reconnaissance de ma vulnérabilité présente.

Lorsqu'il atteignit des zones plus sensibles, il s'arrêta, hésitant. Je savais qu'il avait peur de me blesser, de franchir une limite invisible.

"Tu peux y aller, Jordan," murmurai-je, lui donnant la permission de continuer. Il reprit son geste, lavant délicatement chaque partie de mon corps. La chaleur de ses mains contrastait avec la froideur de la pièce, et je m'appuyai légèrement contre lui, épuisée.

Il alluma la douche et m'aida à me rincer, ses gestes toujours empreints de cette tendresse inattendue. Une fois terminé, il sortit pour prendre une serviette, me l'enroulant autour du corps. Il s'essuya rapidement avec une autre serviette, et nous retournons dans la chambre. 

Là, il réalisa que je n'avais pas de sous-vêtements propres. Heureusement, l'hôpital disposait de sous-vêtements à usage unique. Un petit rire nerveux m'échappa.

"Ce n'est pas très sexy, mais ça fera l'affaire," plaisantai-je, tentant de briser la tension avec un sourire faible.

Il sourit en retour, un éclat de complicité traversant ses yeux. "J'irai te chercher des vêtements chez toi, ne t'inquiète pas."

"Merci, Jordan." Le mot "merci" semblait insuffisant pour exprimer toute ma gratitude, toute la complexité de mes sentiments en cet instant.

Il y avait tant de choses non dites entre nous. Je sentais qu'il voulait poser des questions, qu'il voulait comprendre ce qui s'était passé. Mais la peur serrait ma gorge. Peur de ce qu'il pourrait demander, peur de ce que je pourrais révéler. 

"Qu'est-ce qu'il s'est passé, Orane ?" demanda-t-il enfin, brisant le silence. 

Les mots restèrent coincés dans ma gorge. Que pouvais-je dire ? La vérité était trop douloureuse, trop effrayante. Mon esprit cherchait désespérément une réponse, une excuse, quelque chose qui pourrait le rassurer sans tout dévoiler. Mais chaque option semblait insuffisante, chaque mot potentiellement destructeur. Le silence devint notre allié, rempli de promesses non tenues et de vérités inavouées.

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