L'heure bleue

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                                                              [ La première fois depuis la dernière fois ]

« Un Chai Tea Latte et un Frappucino Vanille, Dani, me lança Paul en posant les gobelets vides à côté de moi.

─ OK, mais je t'ai déjà dit de m'appeler Daniela, rétorquai-je sèchement. On est pas pote, que je sache ».

Paul me foudroya du regard, las de ma sempiternelle réserve et de mon insolence. Depuis cinq mois qu'on travaillait ensemble, à part mon prénom et mon âge, il n'avait aucune info croustillante me concernant. Je n'avais pas l'intention d'y remédier. Tant mieux pour lui s'il arrivait à intimider la plupart des autres, c'était loin d'être le cas avec moi.

Cela faisait une heure que je préparais les boissons avec Mehdi, tandis que Sabrina et Paul prenaient les commandes des clients. Mehdi allait bientôt partir en pause, mais ça allait. Il n'y avait jamais foule ici entre 10h et 11h.

J'étais plutôt de bonne humeur. Je préférais la préparation à la caisse. Préparer les boissons en tandem, c'était comme danser la valse, pour moi : trois temps. Se saisir du gobelet, faire gaffe aux inscriptions des collègues dans les cases, lancer la préparation. Tout ça le plus vite possible, sans rentrer dans lesdits collègues, et sans oublier de sourire au client en lui passant sa commande. Un-deux-trois. Un-deux-trois.

J'étais en train d'essuyer ma surface du bar lorsque tout à coup, des voix masculines résonnèrent dans le café très calme. Je levai les yeux et me figeai sur place, comme foudroyée. Deux mecs et une fille très brune venaient d'entrer dans la salle. Ils se dirigeaient à grands pas, riant et se bousculant, vers la caisse. Vers le bar.

Vers moi, en somme.

Oh la vache !

Je plongeai littéralement derrière le comptoir, le cœur battant la chamade, le torchon serré contre ma poitrine. Debout à ma droite, les mains posées sur la caisse, Paul me jeta un coup d'œil soupçonneux.

« Heu, Dani, on peut savoir à quoi tu joues, là ? »

Je n'eus pas le cœur de reprendre ce gros naze une fois de plus.

« Rien, heu, j'ai juste fait tomber un truc.

─ Quoi ?

─ Je veux dire que mon lacet est défait.

─ Bah dépêche-toi de le refaire, alors » siffla Paul entre ses dents, exaspéré.

Prudemment, je me redressai. Hasardai un coup d'œil en direction des nouveaux venus.

Tout occupés à payer et à discuter entre eux, ils ne m'avaient pas encore vue, mais ça n'était qu'une question de secondes. Avec des gestes vifs, je finis de préparer les boissons en attente : un Caramel Macchiato, un Frapuccino Chocolat et un Mocha glacé. En tournant légèrement le gobelet du Macchiato, je lus le prénom que je m'attendais effectivement à y voir : Alessio.

Putain de merde !