[ Cette scène se déroule quelques jours après la sortie en boîte ]
Pendant l'interclasse du cours de français, Julie avait voulu en fumer une rapidement. Je l'avais suivie dans la cour avec Marine. Julie ne se rendait pas compte, mais ça ne l'aidait pas vraiment à attirer les garçons. De fumer, je veux dire. Ses cheveux, déjà flingués par l'usage quasi quotidien de son fer à lisser, sentaient toujours le tabac froid. Moi, je n'avais jamais touché à une clope de ma vie. Hors de question de me retrouver un jour avec des dents jaunies, une haleine lourde et un teint brouillé.
Il faisait si froid ce matin que lorsque je respirais, l'air me brûlait les poumons. Je resserrai les pans de ma veste Sandro autour de moi et bus une gorgée du latte insipide acheté au distributeur de la cafet' du lycée.
« Elle est chiante, la mère Duval, pesta Marine qui sautillait sur place pour se tenir chaud. Un contrôle pour jeudi ! J'ai déjà rien capté la dernière fois, ça promet.
─ Tu révises pratiquement jamais, aussi, ça aide pas, rétorqua Julie, un poil cassante.
─ Pour quoi faire ? Ça sert à rien, le français ! On est en Scientifique, non ? On s'en fout ! »
J'allais intervenir pour dire qu'elle exagérait un peu, quand un mouvement près de la porte attira mon attention. Mon cœur bondit d'excitation dans ma poitrine. Je ne pus l'en empêcher. Réaction automatique chaque fois que j'étais à moins de cent mètres de...
« Mathilde, y'a Alessio ! Me chuchota très inutilement Marine.
─ J'ai vu, oui.
─ Bah arrête un peu de le fixer, le pauvre garçon va se sentir obligé de venir. »
Non, Alessio n'était pas comme ça. Tant que je restais amicale avec lui, et je l'étais malgré tout, il ne manquerait pas de me saluer si nos routes se croisaient. Il venait déjà vers nous – vers moi – escorté de ses potes, Antoine et Pierre. Je m'efforçai de sourire platement. Je ne voulais pas être trop sympa avec lui non plus, il m'avait fait mal. Mais raaah qu'il était beau dans la lumière de ce matin glacial, aussi... Je fis semblant de regarder l'heure à mon poignet, histoire de ne pas avoir l'air trop morte de faim.
« Salut, mes beautés ! » Lança Pierre, moue aguicheuse à l'appui.
Ah, Pierre. Celui-ci n'en manquait jamais une. Je levai les yeux au ciel. Julie gloussa un peu trop fort. Très élégant... Alessio se pencha sur moi pour me faire la bise. Il piquait un peu aujourd'hui, miam. Lorsqu'il se redressa, nos regards se croisèrent. Il me sourit et, trop vite pour que les autres puissent voir, effleura brièvement ma joue de son pouce. Je me sentis fondre, perdue dans ses yeux marine. Ses iris étaient parsemées de petites paillettes d'un bleu plus foncé.
J'avais très envie de passer la main dans ses épais cheveux châtains, surtout là où ils bouclaient joyeusement sur la nuque. Pfff, Alessio. De tas fossettes se creusaient dans ses joues lorsqu'il souriait. Il riait tout le temps. Et il sentait bon. Il mettait toujours le même parfum.
Il était hyper craquant... ne se rendait même pas compte à quel point. Ce qui ne manquait pas de le rendre encore plus charmant.
Mais depuis qu'on était sorti en boîte le week-end dernier, Alessio était triste. Au moins autant que moi qui me remettais moins bien que prévu de notre rupture. Je ne voulais pas rompre, moi. Mais je n'avais pas eu le choix. Lorsqu'on sortait ensemble, quand il me regardait, il voyait une autre fille. Et ça, je n'ai pas pu le supporter très longtemps. Même si je crois que j'étais amoureuse. Comment savoir, d'abord ? Est-ce que c'était bien ça, être amoureuse ? J'avais les jambes en coton qu'il soit juste là, mais je n'avais pleuré que trois jours après qu'on ait cassé.
« Vous faites quoi, ce soir, les filles ? Demanda Pierre. On se fait un strip poker chez moi ? Enfin, je veux dire, une soirée pizza, quoi.
─ Super idée ! Marine ?
─ J'en suis.
─ Si je passe je serai super en retard, s'excusa Alessio, je dois voir Dani jusqu'à 19h... »
Vous voyez, qu'est-ce que je disais ? Je me mordis la lèvre inférieure, agacée. Ah, Dani ! C'était la nana qui l'aidait à remonter ses notes en maths et physique-chimie. Elle était étudiante en maths appliquées. Très intelligente. Comment je sais tout ça ? Notre cher ami Facebook m'en avait longuement parlé, certains soirs où je n'arrivais pas à dormir tellement j'avais peur de ne pas être à la hauteur. Alessio, lui, ne m'avait jamais parlé de Dani de lui-même. De toute façon, il n'en avait pas eu besoin. Je l'avais beaucoup vue en photo, et une fois en personne, au Prescott, le week-end dernier donc ; et ce que j'avais découvert ne m'avait pas trop plu, dirons-nous. La fille était quand même sexy, il fallait le lui reconnaître. Pas forcément plus jolie que moi, hein. Mais voilà, quelque chose chez elle était indéniablement attractif. Peut-être la façon dont elle rejetait la tête en arrière pour rire aux éclats, ou bien la lueur espiègle au fond de ses yeux. On aurait juré du chocolat fondu, d'ailleurs. La garce ! Après, elle avait une petite poitrine, mais elle était toute menue, avait de très beaux cheveux noirs aux grandes boucles naturelles, les mecs devaient adorer.
Je l'enviais un peu, c'est sûr. J'étais plutôt sûre de moi, et je n'avais pas à me plaindre, côté look ou côté admirateurs. Par exemple, Thomas, le beau gosse de la Terminale L2, était des plus intéressés, et je pensais lui donner sa chance. Mais à coté de cette Dani, je ne pouvais que faire petite lycéenne... ça m'avait longtemps énervée, et puis je m'étais fait une raison. Elle avait Alessio. Il n'avait jamais voulu qu'elle depuis qu'il la connaissait, c'est-à-dire, depuis la rentrée en Première, et on était déjà en Terminale. Je m'en étais rendu compte avant lui, pendant qu'il s'inventait des excuses au sujet de Dani. J'avais quand même tenté de sortir avec lui, mais on sait ce que ça a donné, hein...
Voyant que je faisais grise mine, Alessio me prit soudainement le gobelet des mains et le bus d'un trait.
« Hé !! » Je le frappai pour protester. Il retint sans peine mon poignet dans sa main, m'attira à lui et m'ébouriffa soigneusement. Je poussai un cri de goret qu'on égorge. Ah, non ! Pas mes cheveux ! J'avais mis 107 ans à les coiffer ce matin !
Bah, il faisait bien ce qu'il voulait à s'enticher d'une fille plus vieille. Tant pis pour lui. Au moins, avec Thomas, j'étais sûre d'avoir l'attention que je méritais, c'est-à-dire, 90% de toutes ses pensées.
****Ben oui, pardi ! 😋 Mathilde ! Pour un personnage secondaire elle a eu pas mal d'attention dans les commentaires xD Ce passage n'existe pas dans la version initiale du texte, mais disons que cette scène s'est vraiment passée dans l'univers de L'heure bleue, et ce changement de point de vue permet de voir à quoi ressemble Alessio... Je sais qu'il a ses fans 😂
Merci de lire cette histoire, ça me fait vraiment plaisir ♥️
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L'heure bleue
Novela JuvenilDifficile pour Alessio de ne pas craquer pour Daniela, une étudiante qui l'aide en sciences. Elle est jolie, sûre d'elle, sexy... et surtout de cinq ans plus âgée que lui. Résultat, il a la nette et douloureuse impression de n'être qu'un gamin à s...