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   Je l'attrapai par le menton et lui tournai la tête pour le forcer à me regarder.

« Alessio, il faut que je te parle de quelque chose. Franchement ça peut pas attendre. Reviens à la maison avec moi. S'il te plaît.

─ T'es inconsciente d'être sortie comme ça ! S'écria-t-il. Tu vas attraper la crève.

─ Je m'en fous. Serre-moi ».

Je n'attendis pas qu'il le fasse et l'étreignis de toutes mes forces. Les passants nous dévisageaient avec curiosité. Une femme affublée d'une chapka me jeta même un regard courroucé.

« Se donner en spectacle comme ça ! » L'entendis-je râler.

Je lui fis un doigt d'honneur dans le dos d'Alessio.

Il fit mine de me reposer ; je serrai plus fort mes jambes croisées dans son dos.

« Dani..., protesta Alessio.

─ Quoi ? »

Il me força à relâcher mon étreinte et me reposa. Puis il retira sa veste pour m'emmitoufler dedans. Est-ce parce qu'il restait toujours si attentionné alors que je le méritais même pas ? Je me remis à pleurer à chaudes larmes. J'entourai sa taille de mes bras de peur qu'il disparaisse et enfouis immédiatement le nez dans son t-shirt.

« Il faut que tu écoutes ce que j'ai à te dire, hoquetai-je dans le tissu. Me dis pas non. C'est hyper important. »

Il posa les mains sur mes épaules pour me décoller doucement de lui.

« Non, me regarde pas ! braillai-je aussitôt. Ce foutu mascara est pas waterproof ».

Alessio leva les yeux au ciel. Cependant je devinai à son expression qu'il semblait mal à l'aise devant mes larmes.

« D'accord, rentrons, le panda, grommela-t-il en me tirant par la main. Et s'il te plaît, arrête de pleurer, hein ? Je peux pas te voir aussi triste. »

Main dans la main, nous fîmes le chemin en sens inverse. Je ne cessai de lui demander pardon sur le trajet, comme une litanie. Je devais être dans un état de choc, je sais pas. Alors qu'on atteignait la maison, Alessio ralentit et exerça une légère pression sur mon coude.

« Calme-toi, Dani, ça va, me dit-il, doucement mais fermement.

─ Pardon » réussis-je juste à répéter une fois de plus, comme un jouet cassé.

Je sentis une nouvelle larme rouler sur ma joue. Alessio se mordit la lèvre. Brusquement, il m'attira dans ses bras. Il posa la main sur ma nuque et les lèvres sur mon front, puis mon nez, mon menton, embrassa chacune de mes joues et finit son exploration sur mes lèvres.

Alors je me tus.

J'étais partie comme une folle, sans verrouiller la porte. Je la poussai du bout de ma botte.

« Viens dans ma chambre » murmurai-je.

   Il me suivit dans les escaliers et entra à ma suite dans ma chambre. C'était la première fois qu'Alessio y venait, chez mon père. Je le laissai en faire le tour une minute, le temps d'aller me démaquiller à la hâte dans la salle de bains. Je retirai les élastiques des couettes, passai les doigts dans mes boucles noires. Ma main tremblait. J'étais nerveuse à l'idée de la discussion imminente. Qu'est-ce qu'il allait dire ? Est-ce qu'il allait y comprendre quoi que ce soit ? N'allait-il pas me trouver bizarre et réaliser qu'il aimait une drôle de nana ? En revenant, je le trouvai occupé à regarder les photos accrochées au-dessus de mon bureau.

L'heure bleueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant