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A partir de cet instant devant la librairie, je décidai de me montrer sympa avec Alessio. Amicale. J'en étais capable, bon sang. Il me suffisait de me détendre un peu, d'ignorer mes craintes le concernant. Ces craintes n'étaient plus fondées, hein, maintenant que de l'eau avait coulé sous les ponts. « Il-ne-ressent-plus-rien » était devenu mon nouveau mantra. Comme une piqûre de tranquillisant, la phrase me faisait mal mais avait l'étonnant effet d'apaiser mes tourments ensuite. Fort bien. Aussi, lorsqu'il sonna à la porte le vendredi soir, allai-je ouvrir avec un grand grand sourire.

« Salut Alessio ! M'écriai-je d'une voix trop aiguë.

─ Salut », répondit Alessio.

Il avait haussé les sourcils, décontenancé par mon soudain débordement d'enthousiasme à son encontre. Je m'approchai gauchement de lui et lui collai la bise. Une première depuis qu'on s'était revu. J'étais très fière de mon attitude amicale. Il était accompagné de son copain Antoine, que je connaissais depuis longtemps. Je l'attrapai sans façons par le cou, trop contente de le revoir :

« Heeey, Antoine ! Comment ça va ? Tu portes même plus de lunettes, j'en reviens pas !

─ Ça va super bien, et toi, Dani ? Oui, il était temps de passer aux lentilles. Ça fait un bail, dis donc !

─ C'est clair que vous datez, tous les deux. Entrez, entrez ! »

Ils me suivirent jusque dans le salon, où je leur présentai Soraya, Damien et Magali. Léa n'était pas encore arrivée, contrairement aux pizzas. Aussi alluma-t-on quand même la console pour jouer à Mario Kart. Ça dura au moins une heure à rire et à s'égosiller. Ça me rappela beaucoup de souvenirs. A un moment, Alessio et moi échangeâmes un regard complice.

« Comme au bon vieux temps, dit-il en me souriant. Des pizzas et des jeux !

─ Que demande le peuple ? » Renchéris-je en riant.

C'était une phrase qu'on se disait à chaque soirée jeux-pizzas, et ça faisait du bien de l'entendre de nouveau.

Un peu plus tard, en parfaite amie, je lui demandai poliment s'il voulait voir mes photos du Brésil. Il accepta joyeusement et tout à coup, nous nous retrouvâmes seuls dans ma chambre. Les voix des autres, qui jouaient encore à la console, nous parvenaient étouffées par la porte fermée. Alessio regardait tout autour de lui. Ma chambre était petite, je n'aimais pas les grands espaces ; mais elle était super cosy.

Cependant, je toussotai, un peu gênée de le revoir dans mon espace privé, après tout ce temps.

« Tu peux t'asseoir là », lui dis-je en désignant la chaise de bureau.

Il s'exécuta et je me penchai sur la table pour réveiller l'ordinateur. Lequel émergea de son sommeil en ronronnant doucement. Je double-cliquai sur le dossier de photos que je voulais lui montrer.

« Tu vas pas rester debout, quand même ? Demanda Alessio, comprenant soudain mes intentions.

─ Si si, mais t'inquiète pas, ça me dérange pas.

─ Et si moi ça me dérange ? Je vais pas rester assis pendant que tu restes debout. Viens-là » dit-il, et il tendit le bras vers moi.

Je me raidis aussitôt :

« Viens-là ? Viens-là ?

─ Sur mes genoux ? A moins que tu ne préfères qu'on s'asseye tous les deux sur ton lit ? »

Hein ? Mon lit ? Quoi ? Comment ?! Hé là ! Doucement.

« Non. Non, ça ira.

─ J'attends, alors. Ne me dis pas que tu as peur de moi à ce point ? »

L'heure bleueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant